Cette langue étrange, qui n'est pas dans la nature, et qui est la langue de la traduction.
Jacqueline RISSET
Rappelons que déjà Novalis appelait la littérature traduction …
Depuis ses « Grains de pollen », le concept de l’art comme traduction est apparu également dans les écrits en diverses langues, de Proust à Tsvetaïeva ou Hölderlin. Les parallèles sont inéluctables, car ce dépaysement de la langue qu’est la littérature pourrait être lui-même… la traduction d’une volonté de recherche de l’étranger, la quête d’altérité qui serait en même temps la recherche de soi-même.
Pour le formalisme russe, la littérature était un lieu d’étrangeté depuis ses origines, ce que Victor Chklovski évoque dans son célèbre article « L’art comme procédé », en décrivant la langue poétique comme : « langue difficile, obscure, pleine d'obstacles ». Dès ses débuts, elle « doit avoir un caractère étranger, surprenant ; en pratique, c'est souvent une langue étrangère : le sumérien pour les Assyriens, le latin en Europe médiévale, les arabismes chez les Perses, le vieux bulgare comme base du russe littéraire » (T. TODOROV, 2001, 94).
George Mounin met en scène son interprétation cartésienne de l’étrangeté de l’idiome poétique. Pour ce linguiste français, « la musique » des très anciens poètes est née d’exigences mnémotechniques facilitant la transmission de récits historiques.
Quelles que soient les origines de cette étrangeté, nous constatons souvent qu’elle peut être à la base de l’enrichissement de la culture d’accueil. Ainsi, en passant par l’histoire paradoxale de l’apparition de la belle image du Cantique des Cantiques, calquée de l’Hébreu dépourvu de superlatifs, Jorge Louis Borges décrit la traduction littérale comme la source de l’étrange et de la beauté : « si nous jetons les yeux sur la version littérale d'un poème d'origine lointaine, nous nous attendons à un effet d'étrangeté. Si cet effet vient à manquer, nous sommes plus ou moins déçus » (BORGES, 2002, 66).
Ainsi en traduisant un poème, le traducteur poétique travaille d’abord avec l’étrangéisation de la langue, avec ce que Roman Jacobson appelle la fonction poétique de la langue, dominante dans l’œuvre d’art… Les flots répétitifs des formes rhétoriques : les homophonies, les calembours, les chaines rythmiques, représentent à la fois l’inscription des images prototypiques codifiées dans la mémoire collective, mais aussi la création artistique individuelle qui se distingue de l’usage commun par ce que l’on transpose du russe en français par « singularisation », « étrangisation », « défamiliarisation » ou l’étrangeté tout court.
Nous savons que face à cette « étrangeté » du texte original depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, les débats les plus animés s’attachent à la tâche de traduction : les traducteurs doivent-ils transposer au maximum l’étrange du texte (« amener le lecteur à l’auteur » pour Schleiermacher ou faire « des verres colorés » selon les termes de Georges Mounin), ou bien sont-ils tenus de l’atténuer pour « amener l’auteur vers le lecteur » (Goethe , Schleiermacher) et faire « des verres transparents » (Mounin) pour que leur traduction soit parfaite.
Pour Antoine Berman, l’un des traductologues les plus lucides, ayant transformé la pensée de romantiques allemands et de Walter Benjamin sur les liens ontologiques entre l’œuvre et ses incarnations-retraductions, le présupposé de la « traduction parfaite » doit être réévalué en tenant compte de la transmission de l’étrangeté de l’œuvre-source. Il formule ainsi son paradigme de traduction : « J'appelle mauvaise traduction la traduction qui […] opère une négation systématique de l’étrangeté de l’œuvre étrangère » (BERMAN, 1984, 17). La pensée bermanienne est reprise par le philosophe Paul Ricœur : « Traduire, c’est à la fois habiter dans la langue de l’étranger et donner hospitalité à cet étranger au cœur de sa propre langue » (RICŒUR, 1998, 15)
Dans la perspective de la traductologie contemporaine, le concept d’Antoine Berman rejoint la réflexion philosophique sur la complexité des rapports à l’altérité. Cette quête de l’autre, omniprésente dans nos pensées comme activité quotidienne (consciente ou inconsciente) aussi bien reflétée dans la philosophie (Levinas, Sartre) que dans la critique littéraire (Mikhaïl Bakhtine et sa théorie de polyphonie) pourrait expliquer l’intérêt croissant pour la littérature traductologique.
Pour Jorge Luis Borges dont l’œuvre a annoncé la théorie du roman telle qu’elle sera établie par M. Bakhtine ou O. Ducrot, la quintessence du problème de la traduction est le problème de l’original, ce que les difficultés de l’interprétation manifestent pleinement. Selon l’écrivain argentin (et nous pouvons reconnaitre ici le germe de pensée qu’alimentait la réflexion de George Steiner et d’Antoine Berman), « aucun problème n’est aussi consubstantiel aux lettres et à leur modeste mystère que celui que propose une traduction » (BORGES, 1993, 290).
1. Cette obscure tâche de traduction
Relevant de la véritable œuvre d’art, la traduction littéraire suit le chemin parcouru par le texte-source. Agitée par les mouvements du processus-créateur visant à reproduire dans une autre langue un ensemble intégral de métarelations (phoniques, sémantiques et connotatives) du texte original, elle révèle ainsi ces « valences littéraires » représentant pour les poètes-traducteurs tels qu’Ezra Pound, Octavio Paz, Borges ou Yves Bonnefoy une pierre angulaire de leur vision de l’œuvre en tant que telle ainsi que de son double traduit.
Dans le même ordre d’idées, nous pouvons évoquer la formule du formalisme russe qui a jalonné la pensée philologique du XXe siècle, appartenant à Viktor Chklovski :
L’œuvre d'art est perçue en relation avec les autres œuvres artistiques et à l’aide d'associations qu'on fait avec elles... […] toute œuvre d'art est créée en parallèle et en opposition à un modèle quelconque. La nouvelle forme n'apparaît pas pour exprimer un contenu nouveau, mais pour remplacer l'ancienne forme qui a déjà perdu son caractère esthétique (T. TODOROV, 2001, 94).
Cette perception systémique du texte accentue également, comme le remarque Yves Chevrel, la complexité du positionnement de la traduction littéraire non seulement par rapport à la langue-source, mais aussi par rapport à l’auteur, car « …une traduction réussie transmet une œuvre, non une langue. […] Lire une œuvre littéraire en traduction n’est pas lire une traduction de l’allemand ou du grec, c’est lire une œuvre écrite par Goethe ou Hofmannsthal, Eschyle ou Cavafy… » (CHEVREL, 2007, 15).
Les problèmes de distinction entre une œuvre d’art et une « non- œuvre », les questions de début et de limites de l’œuvre d’art, les interrogations sur sa nature imitatrice ou créatrice, sa technicité et son ontologie s’imposent également pour la traduction, surtout pour la traduction poétique qui implique toujours en double les dichotomies imposées par l’œuvre : praxis ou poïesis, fidélité (Baudelaire ou Borges) à la nature / à l’imagination / à l’idée, infidélité, récréation (Pound, Bonnefoy) / translucifération (Haroldo de Campos) ou forme / contenu (son / sens), etc.
Jorge Luis Borges, l’un des traducteurs exerçant une influence majeure sur la littérature moderne , ayant traduit Walt Witman, Rabindranath Tagor, James Joyce, Rudyard Kipling, Herman Melville, Ralph Waldo Emerson, Robert Louis Stevenson, Henri Michaux, Herman Hesse et Guillaume Apollinaire, voit la genèse de l’univers se réaliser dans notre vocation à l’interprétation. Pour l’écrivain argentin, le traducteur est voué au travail d’accomplissement de la Création (dont le but est l’interprétation), non moins signifiant que celui de l’écrivain lui-même.
La vision paradoxale des aléas de la traduction est reflétée dans le célèbre texte de Borges Pierre Ménard, auteur du Quichotte, où la traduction de Ménard, une copie exacte du Quichotte, est estimée être phénoménalement plus abondante que l’original. L’allégorie borgésienne a amené George Steiner à commenter ce texte dans Après Babel d’une manière qu’il qualifie de « cabalistique » en soulevant, notamment, le problème du statut du recréateur et de la recréation :
Reproduire dans une langue étrangère un livre qui existe déjà est le « mystérieux devoir » du traducteur et il y a de quoi l’occuper. C’est une tâche impossible et qui doit être accomplie […] Produire un texte verbalement identique à l'original (faire de la traduction une transcription parfaite) dépasse en complexité les limites de l'entendement… Le vrai traducteur sait que le fruit de son industrie appartient « à l’oubli »… ce qu’il ne sait pas c’est « qui de nous est en train d’écrire cette page » (STEINER, 1978, 79).
Les mouvements de deux textes identiques, dont les différences sont limitées uniquement par leurs réceptions dans des contextes différents, cette vie imprévisible d’une histoire dans l’Histoire, nous font part des contingences du destin de l’œuvre récréée, où le rôle de la traduction apparaît encore plus paradoxal si nous nous rappelons à nouveau l’idée qu’elle porte sur l’œuvre représentant elle-même une traduction :
Tout écrivain est un traducteur d'émotions, ou d'impressions, tout au moins de ses propres émotions... Il n'invente pas un livre – puisque ce livre existe déjà en lui – il le traduit... Ce livre essentiel, le seul livre vrai, un grand écrivain n'a pas, dans le sens courant, à l'inventer, puisqu'il existe déjà en chacun de nous, mais à le traduire. Le devoir et la tâche d'un écrivain sont ceux d'un traducteur (PROUST, 1989, 499).
Nous pouvons retrouver les échos de cette pensée dans la maxime kleeienne « L’art ne reproduit pas le visible, mais rend visible » aussi bien que dans les pensées de Paul Valéry sur l’art de voir ou dans Le chef-d’œuvre inconnu de Balzac.
La tâche de traduction pourrait se révéler encore plus complexe, car malgré maintes définitions existant depuis la nuit des temps, la plupart des poètes modernes affirment que le langage poétique a comme source un mouvement vers une réalité hermétique à peine descriptible, ce qu’Octavio Paz exprime ainsi : « La réalité que révèle la poésie et qui apparaît derrière le langage – cette réalité visible seulement par l'annulation du langage, ce en quoi consiste l'opération poétique – est littéralement insupportable et affolante. En même temps, sans la vision de cette réalité, l'homme n'est pas homme, ni le langage n'est langage » (PAZ, 1972, 122).
L’écrivain, traducteur, poète et créateur de l’Univers-Bibliothèque Jorge Louis Borges nous apprend que « les mots se voient restituer par la vertu de la poésie le caractère magique qu’ils avaient à l’origine » (BORGES, 2002, 78). Ainsi ils nous amènent en plein cœur d’une énigme poétique dont les réalités ne peuvent être enfermées dans un contour logique rigoureux. Elles s’expriment souvent au moyen de symboles échappant à toute définition : « Qu’est-ce que le temps ? Si l’on ne me pose pas de question, je le sais. Si l’on me pose la question, je ne le sais plus. » (BORGES, 2002, 78). Telle était la réponse de Saint Augustin citée par Borges. En analysant dans son article « L’art comme procédé » la formule de la poésie définie comme « la pensée par images », Victor Chklovski fait une remarque quasi-borgésienne. Ainsi le formaliste russe évoque les images poétiques qui « de siècle en siècle, de pays en pays, de poète en poète […] se transmettent sans être changées. […] Plus vous faites la lumière sur une époque, plus vous vous persuadez que les images que vous considériez comme la création de tel poète sont empruntées par lui à d'autres poètes presque sans aucun changement ». (TODOROV, 2001, 77) Il n’est pas étonnant que nonobstant les nombreuses recherches faites par les critiques-généticiens , l’origine du mouvement créateur du processus littéraire reste une valeur incertaine , ce qu’avouent les artistes eux-mêmes.
2. Traduire : le mouvement de l'œuvre vers l'œuvre
Le peintre-poète Paul Klee affirmait qu’il ne savait pas en commençant un tableau quel serait l’aboutissement de cette inspiration. Et c’est là où il rejoint parfaitement la pensée d’un autre poète, Joseph Brodsky, ainsi que les pensées de nombreux artistes s’étant penchés sur le phénomène de leurs créations pour affirmer que l’œuvre ne peut pas être séparée du mouvement de sa genèse.
Quant à la traduction, son perfectionnement stylistique au travers des cadences mouvementées est tout-à-fait similaire à ce que la chercheuse Anne Herschberg-Pierrot appelle « le processus de singularisation de l’œuvre » (HERSCHBERG-PIERROT, 2005, 34). Dans la perspective de la critique génétique, la recherche créatrice du texte original se finalise dans une rencontre entre l’avant-texte et de son individualisation stylistique qui va « relier le détail à l’ensemble, l’analyse micro-textuelle des éléments figuraux, lexicaux, énonciatifs, syntaxiques et rythmiques, à la saisie de configurations discursives et d’un système dynamique où les éléments sont en interaction » (HERSCHBERG-PIERROT, 2005, 34). La transformation créative, « le passage de la phrase à l’œuvre, et du local au global », selon la chercheuse, serait conditionnée par la charge stylistique du texte.
Pour le traducteur, une telle évolution serait plus laborieuse et moins incontestable peut-être. Comme l’a approfondi finement Octavio Paz, si la matière du travail d’un poète est une langue dynamique, mouvementé, c’est un texte statique de l’original que constituera celle-ci pour un traducteur. Son rôle est donc de remettre en mouvement les signes figés du poème et de les faire circuler dans sa langue. Bien que le point de départ d’un tel mouvement ne soit pas connu des auteurs mêmes, ils peuvent toutefois indiquer au traducteur l’orientation de ses vecteurs scripturaux, inter- et para-textuels, lui apprendre son rythme.
Octavio Paz croit que le stade essentiel de la traduction peut être assimilé à un exercice de lecture (c'est-à-dire à la traduction intralinguistique selon la terminologie de Roman Jacobson) et en même temps à l’exercice du critique (création d’interprétation-transposition du poème). Nous pouvons trouver un nombre important de parallèles dans l’histoire de l’art à ce thème du regard du spectateur et de la lecture de l’œuvre : pour plusieurs auteurs, la lecture de l’œuvre poétique représente une activité-créatrice ; et c’est l’idée qui, depuis Edgard Poe jusqu’à Umberto Eco, nourrit les pensées artistiques et critiques.
Selon Cervantès, le lecteur d'une œuvre traduite la verrait comme l’envers des tapisseries de Flandres, tandis que pour Octavio Paz, la poésie représenterait l’envers de la langue, « langage tourné sur soi et qui se dévore et qui s'abolit pour qu'apparaisse l'autre, le démesuré, le soubassement vertigineux, le fondement abyssal de la mesure » (PAZ, 1972, 123). Le poète-traducteur mexicain ne confierait qu’au poète la tâche de la création, la traduction poétique se déroulant sur le terrain d'un art synthétique, l’art qui ne se préoccupe pas de la ratio uniquement, bien que ne la dédaignant pas complètement, comme le souligne un autre spécialiste de renom :
La traduction poétique suppose toujours des agencements différents, des sacrifices, des substitutions. Suivre littéralement l’original, c’est la manière la plus sûre de ne rien pouvoir créer qui ait quelque valeur artistique. La traduction d’un vers à première vue intraduisible n’est possible qu’à travers une recréation, sur la base d’autres lois et dans un autre système linguistique. Le but est de créer non pas un calque ou une copie, mais un équivalent (ETKIND, 1982, 59).
Chaque poème présente une partie du miroir du monde poétique de son auteur et à travers la traduction mot-à-mot, il se révèle décomposé comme les morceaux brisés dans un kaléidoscope. La tâche du traducteur poétique suppose non seulement de recréer l’intégralité de ce miroir, mais également d’arriver à faire refléter dans les lumières de sa langue les jeux des couleurs, ainsi qu’à leur donner des mouvements similaires. Ce panorama des interactions, des sens et des formes qui s’ouvrent devant le traducteur-créateur rime avec le concept d’Umberto Eco d’œuvre ouverte :
Toute œuvre d'art alors même qu'elle est une forme achevée et close dans sa perfection d'organisme exactement calibré, est ouverte au moins en ce qu'elle peut être interprétée de différentes façons, sans que son irréductible singularité soit altérée. Jouir d'une œuvre d'art revient à en donner une interprétation, une exécution, à la faire revivre dans une perspective originale (ECO, 1965, 17).
Dans la traduction littéraire et surtout poétique, ce chemin de l’œuvre-objet vers « l’œuvre ouverte », avec toute sa polyphonie sémantique et historique, contourne plusieurs barrages culturels, linguistiques et contextuels. Comme tout lecteur, le traducteur doit accepter l’invitation offerte par l’auteur « à achever » l’œuvre qui serait, selon la définition de Luigi Pareyson, « un mouvement arrivé à sa conclusion ». Même si le début de ce mouvement de création n’est jamais découvert par les chercheurs-généticiens, même si le poète partant vers l’inconnu emporté par les rythmes de langue ignore souvent son point d’arrivée, le traducteur ne doit jamais oublier où il veut aller : sa tâche est d’élaborer à partir des autres mots et des autres compositions de l’autre langue un poème analogue à l'original, son double impossible. Ainsi, même les plus éminents connaisseurs de la traduction poétique laissent entendre leurs doutes. Citons le traducteur de renom Mikhaïl Lozinsky, qui avoue : « Le poète qui commence à traduire les vers d'un autre poète se retrouve en face d'une tâche irréalisable » (LOZINSKY, 1955, 160), ou Antoine Berman, qui témoigne : « l’une des expériences premières de tout traducteur n’est–elle pas que sa langue est comme démunie, pauvre, face à la richesse de l’œuvre étrangère ? » (BERMAN, 1984, 4). Sans oublier que presque tous les manuels de la traduction d’aujourd’hui se réfèrent à l’affirmation du linguiste Roman Jakobson : « la poésie par définition est intraduisible. Seule est possible la transposition créatrice » (JAKOBSON, 1963, 83).
La réflexion sur la nature des mouvements à l’intérieur de l’œuvre littéraire ainsi qu’à l’extérieure de celle-ci a été développée dans les travaux d’Iouri Lotman. Selon le sémioticien russe, le texte-source ainsi que son hypostase traductive font partie de la sémiosphère culturelle représentant un système dynamique dont les éléments sont en interaction. Pour Lotman, le processus de la création du texte génère son propre espace avec ses strates micro et macrotextuelles et avec ses frontières culturelles. Lors de la traduction entre les systèmes culturels, les frontières jouent un rôle de délimitation entre l’extérieur (« ce qui est aux autres ») et l’intérieur (« ce qui est à nous ») (LOTMAN, 1973). Or, en même temps, elles sont un lieu de transfert et de rencontre entre l’original et le traduit et entre l’étrangère et l’étrange…