Transmission patrimoniale des écrits historiques de Guillaume Du Bellay

Des premiers manuscrits aux éditions du XXIe siècle

Résumés

Cet article retrace chronologiquement les conditions de transmission puis les éditions successives des écrits historiques de Guillaume Du Bellay. S’appuyant sur les différents paratextes, il en examine les principaux enjeux et réceptions, de la Renaissance à nos jours.

This article chronologically traces the conditions of transmission and then the successive editions of the historical writings of Guillaume Du Bellay. Drawing on the various paratexts, he examines the main issues and receptions, from the Renaissance to the present day.

Plan

Texte

Ce travail n’a d’autre ambition que de recueillir et rassembler l’ensemble des informations disponibles sur les traces écrites laissées par Guillaume Du Bellay, Seigneur de Langey. Il veut être une vision actualisée et chronologique des aléas subis par ses écrits historiques et les enjeux des différentes et successives publications, des premiers manuscrits jusqu’à nos jours. On s’attachera pour cela à rappeler les principales étapes de leur création et de leurs premières diffusions, largement étudiées par la critique, avant de s’intéresser plus précisément à la chaîne des éditions qui les ont transmises jusqu’à notre époque, sous l’angle de leurs textes liminaires et programmatiques.

Guillaume Du Bellay (1491-1543), seigneur de Langey, est l’aîné de la prestigieuse fratrie qui a joué un rôle de premier plan à la cour de France au xvie siècle. Ses puînés ont chacun occupé de hautes fonctions : Jean, évêque de Paris puis cardinal, René, évêque du Mans, Martin et Jacques, dans l’armée. Guillaume, lui, s’est indéfectiblement illustré, à partir de 1526 et jusqu’à sa mort en 1543, dans d’incessantes missions diplomatiques ou militaires au service de François 1er, en Espagne, en Italie, en Angleterre, en Allemagne, au Piémont enfin, parcours que l’historien Victor-Louis Bourrilly a brillamment retracé dans une thèse de référence, en 19041 et que les travaux récents de Lionel Piettre viennent largement compléter2 et parfois nuancer. Dix-sept années d’intense et épuisante activité qui auront raison de sa santé mais qui feront de Langey un témoin majeur de la scène politique européenne dans la première moitié du siècle.

Les Ogdoades

Rappelons brièvement les circonstances bien connues qui ont entouré ses premiers écrits. Dès les débuts de sa « carrière » diplomatique et militaire, Langey se préoccupe de rassembler les matériaux de premier plan et de première main qui devraient lui permettre de réaliser un projet qu’il murit depuis longtemps, celui d’écrire une histoire du règne de François 1er. L’idée lui en serait venue, selon V.-L. Bourrilly, au « début de la lutte entre François 1er et Charles-Quint3 ». Jeune encore, il ne s’agit pas pour lui d’un repli sur soi et sur son propre passé, mais bien plutôt de déployer, conjointement à son engagement dans l’action, une conception personnelle de l’Histoire4 (qu’il nomme dans son Prologue « la vraye et diligente exposition des choses faites5 »), ainsi que des devoirs qui incombent selon lui à qui se veut historien : « il ne suffit dire (quand on voudra escrire l’histoire) cecy fut dict, cela fut fait : Sans remontrer comment, par qui, par quel moyen, à quel titre & a quelle fin » car, affirme Guillaume Du Bellay « il fault reciter les causes finales, & inductives », deux adjectifs aux échos aristotéliciens6.

Il souhaitait faire le récit de ce qu’il avait lui-même vu et appris, sans négliger pour autant le témoignage ou la mémoire d’autrui lorsque le besoin s’en ferait sentir, pour pallier ses propres manques puisque l’histoire ne peut se réduire à la mémoire d’un seul homme. Il place ainsi la vérité, celle des faits plus que de la neutralité, au cœur de sa réflexion, les historiens ne pouvant et ne devant relater que « les choses veuës par eux ou entenduës par le fidelle & bien certain raport d’autruy ». L’auteur reprend alors la hiérarchie traditionnelle à son époque qui donne une supériorité indiscutable à la vue sur l’ouïe : « car non obstant qu’en un tesmoing de veuë à plus de foy, qu’en dise d’ouye & que S. Jean pour estre creu, asseure qu’il parle de choses veuës ». Il veut de fidèles et vrais témoins de l’histoire, à commencer par lui-même7.

Fin lettré et homme de la Renaissance, Guillaume Du Bellay a alors en tête de prestigieux modèles : les historiens grecs comme Hérodote, Thucydide, Diodore de Sicile, Plutarque, Appien, Justin, Xenophon… d’autant que Claude de Seyssel et Jean Lascaris publient des translations de ces œuvres à partir de 15278. Pour les latins, les Commentaires sur la guerre des Gaules ou sur la guerre civile de Jules César ainsi que Les Décades de Tite-live ont été imprimés bien plus tôt et de nombreuses réimpressions circulent dans le royaume. Suétone, Salluste sont également publiés dans les années vingt. Les Chroniques du Moyen Âge constituent un autre modèle possible : Froissart et Grégoire de Tours… Trois contemporains enfin n’ont pu manquer d’imprégner l’esprit de Langey : Paul-Émile, l’historiographe officiel de Louis XII, Philippe de Commynes dont les Mémoires paraissent en 1523 mais aussi Jean Lemaire de Belges dont Les Illustrations de Gaule et singularitez de Troye, publiées en 1509, sont encore très populaires au moment où Guillaume Du Bellay entreprend son propre ouvrage. Plus proches chronologiquement, Paul Jove et Sleidan ont gravité autour du clan des Du Bellay et ont sans doute eu leur part d’influence dans les débats autour de la question de l’Histoire9.

Langey se met une première fois au travail, vraisemblablement vers 1523. Ce premier manuscrit est rédigé en latin, langue par excellence de l’historien, mais c’est au grec qu’il en emprunte le titre, Les Ogdoades, de ογδοάς « huit, huitaine ». Sur le modèle des Décades de Tite-live, Langey avait, en effet, projeté d’organiser son ouvrage en groupes de huit Livres10, ce qui témoigne une fois de plus de son souci de rigueur, de son envie de hiérarchiser les événements, les faits et les lieux. Il multiplie pour ce faire les remarques étymologiques, les descriptions, le contenu des traités, etc. De cette première rédaction latine ne subsistent que quelques fragments dont la Bibliothèque nationale de France et les Archives du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères conservent des manuscrits11.

On y trouve au mieux les trois premiers livres et le début du quatrième de la Première Ogdoade : le premier est un résumé des grandes périodes de l’histoire de Noé à François 1er, dans lequel Langey se fait l’écho des légendes sur les origines troyennes des Gaulois et des Français, dans la lignée de Jean Lemaire de Belges12.

Les autres livres relatent très rapidement les premières années du règne de François 1er, gardent un silence relatif sur les années 1515-1520 mais détaillent plus amplement l’année 1521. Martin Du Bellay affirme dans les Mémoires que son frère « avoit composé sept Ogdoades latines » mais Richard Cooper cite les témoignages contradictoires des contemporains Robert Breton et Jean de Morel13, qui viennent brouiller ces chiffres. À Rome, à la Bibliothèque du Vatican, a été récemment découvert le manuscrit Reg. Lat. 97014 sur lequel figurent des fragments latins d’une partie du cinquième livre, et que les héritiers de Guillaume ne semblaient pas connaître15. Quoi qu’il en soit, ses activités, ses affaires personnelles et parfois même la maladie le contraignirent à laisser de côté son projet jusqu’au début de la décennie suivante.

À partir de 1536, Langey se remet à la rédaction de son ouvrage, alors qu’il se trouve à Turin, capitale du Piémont, dont il sera par la suite Lieutenant général. Il écrit à son frère Jean le 24 juillet 1538 : « Je ne puys si tost envoyer l’histoire que demandez car j’ay faict transporter hors de ceste ville tous mes papiers, propter metum Judeorum16». Quelques mois plus tard, le 21 mars 1539, son frère témoigne de l’avancée des travaux : « Monseigneur de Langey se reffaict a Paris pour vous aller trouver, et de la a Thurin. Cependant, il s’employe a escripre une des belles choses que je viz onc, ou ne sont oubliez ceulx qui ont merité de la chose publique17 ». François 1er ayant lu, comme d’autres, des extraits de ce texte latin, demanda à Langey de le traduire en vernaculaire français pour le rendre accessible à un plus grand nombre et suivre l’élan de l’ordonnance de Villers-Cotterêts.

Lorsqu’il reprend son ouvrage, Guillaume Du Bellay ne se contente pas d’une simple transposition du latin au français, il enrichit le texte, lui donne de l’ampleur, car, outre son conseil linguistique, le roi lui ouvre aussi l’accès à la documentation royale18. En 1539, Langey déclare dépouiller en ce sens des correspondances particulières et en transcrire de larges extraits19. Il demande même à son frère Jean de lui faire un récit précis des événements auxquels il a pris part20, afin de disposer d’informations plus directes. Il reste de ce travail effectué par le cardinal une douzaine de feuillets autographes, intitulés postérieurement Mémoires pour le fait d’entre le Pape et le roi d’Angleterre auquel le Roi s’estoit entremis, ecrit de la main du cardinal du Bellai 21.

À l’inverse, sur les conseils de ses premiers lecteurs, Langey retranche tout le début de son texte latin, « un recueil, sommaire, & abrégé récit de la première origine & du premier nom & descente tant des Gaulois que des Françoys. […] Lequel abregé recit, pour ce qu’il semblait à aucuns mes amys estre aliene en cest endroit, & non servant mon propoz, j’ay resequé, & totalement osté ». Ces premiers livres, contenant « choses controuvées & fabuleuses » sur les origines légendaires des Gaulois, ne sont finalement pas supprimés, mais au contraire développés dans une Ogdoade à part entière. Ainsi, peu à peu, l’œuvre prend forme (tout indique que le Prologue général est vraisemblablement composé à ce moment-là22) et commence à être connue, par rumeur ou par lectures ; Marguerite de Navarre l’évoque dans son poème « Les prisons23 » sous le nom de « chronique ». Étienne Dolet, Salmon Macrin, les clients et amis des Du Bellay, aux abords des années quarante, célèbrent en lui « le nouveau Tite-Live ». Les six ou sept dernières années de sa vie, Langey n’aura de cesse, mais en vain, de mener l’entreprise à son terme.

Fragments de la première Ogdoade latine de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey,publiés avec une introduction et des notes par Victor-Louis Bourrilly, Paris, Société Nouvellede Librairie et d’Édition, 1905.

Fragments de la première Ogdoade latine de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey,publiés avec une introduction et des notes par Victor-Louis Bourrilly, Paris, Société Nouvellede Librairie et d’Édition, 1905.

Le 9 janvier 1543, alors qu’il traverse la France pour rejoindre son roi, Guillaume Du Bellay, malade et fatigué par ses activités incessantes, meurt à Saint Symphorien dans le Massif Central, entouré de quelques compagnons de voyage, parmi lesquels se trouve François Rabelais24. Dans l’émotion et la confusion de l’événement, des documents appartenant à Langey disparurent dans des circonstances non éclaircies et que rapporte quelques jours après son jeune frère Martin au cardinal :

Monsieur mon frere, je vous ay cy davant escrit touchant la mort de nostre frere, M. de Langey, et tesmoigné le desplaisir et le regret que j’avois eu de ne l’avoir pas conduict jusques au lieu ou il rendit l’esprit. Mais ce regret m’a bien augmenté lorsque j’ay sceu que tous les memoires qu’il avoit emportez avec luy ne se sont point trouvez. Je ne sçay qui accuser de les avoir pris qu’un de ses serviteurs, Alleman, qui s’est retiré en son pays. Neantmoins, ce n’estoit pas un homme a estre envieux de ces choses. Le medecin Rabelais s’excuse et m’a escrit qu’il n’avoit jamais pensé a la conservation de ces mémoires, qu’il estimoit estre renfermez dans les coffres de muletz qui ne furent point ouverts. […]25 

Dans l’avis au lecteur de l’Epitomé26 qu’il publie en 1556, soit treize ans plus tard, Martin Du Bellay revient sur cet épisode dont il livre une nouvelle interprétation :

Mais, hélas, il ne m’est facile à discerner si je doys plus tost me congratuler de la fruition des petitz fragmentz qui en sont demeurez, que deplorer la mauvaise fortune, qui nous en a laissé perdre la plus grande partie. Car luy mort à Saint Saphorin sus le mont Tarare à son retour d’Italie, ayant en ses cofres ses œuvres, & lors estant absent Monseigneur le Cardinal du Bellay son frere pour le service du Roy, & Messire Martin du Bellay son autre frere demeuré gouverneur, & Lieutenant du Roy à Thurin, ses livres luy furent desrobez par quelques uns qui veulent, ainsi qu’il est a presuposer, se vestir comme la corneille Esopique des belles plumes d’autruy.

Selon lui, c’est une partie des Ogdoades qui a été dérobée dans l’incident, mais cette hypothèse est aujourd’hui sujette à caution. V.L. Bourrilly déclare qu’entre le 9 et le 30 janvier de nombreux documents appartenant à Langey furent volés ou perdus. Aucune trace ne permet de s’en faire une idée précise et il s’agissait peut-être simplement de documents diplomatiques ou de courriers27. Richard Cooper formule une autre hypothèse : Guillaume Du Bellay disposait d’une « équipe de collaborateurs pour rédiger ses idées sous sa dictée28 », équipe dont Rabelais aurait fait partie. Le fameux livre aujourd’hui perdu des Stratagemata29 serait le fruit de ce travail de secrétaire et représenterait une « section imparfaite des Ogdoades », rédigée en latin par Rabelais sous la dictée de Langey et simultanément traduite en français par Massuau pour répondre à l’injonction royale.

D’autres notes de travail sur la stratégie et la science militaire que Langey aurait également dictées et voulu remettre en main propre au roi (au vu de la situation en Piémont) auraient également été dérobées. Ce qui a été publié par Rabelais et Massuau ne serait finalement que « ce qui restait de ces documents précieux », le « chant du cygne de leur patron30 »…

Lionel Piettre suppose à son tour que l’œuvre devait déjà être relativement imposante et que la perte subie est plus importante que ne le reconnaît Bourrilly31. Il nous est néanmoins impossible de connaître la nature exacte de ces documents, ni le degré d’achèvement des Ogdoades, ni le nombre de copies qui en circulaient pour pouvoir estimer réellement la perte subie lors de cet épisode.

Des fragments latins et français de la première Ogdoade, des fragments français de la Cinquième, dont l’ambiguïté générique demeure encore aujourd’hui32, voilà ce que recevaient en héritage le reste des Du Bellay. Se posa dès lors la question de leur transmission. Qui devait et pouvait préserver ou poursuivre l’œuvre de Guillaume ? Jean, sans doute le plus proche de l’aîné par l’âge et l’importance politique33, rappela le pacte qu’il aurait fait avec son frère peu de temps avant sa mort :

Monseigneur, estant l’an passé feu mon frere, vostre tant devotieux serviteur […] et ayant retiré de moy, comme il avoyt cherché à faire de tous aultres, les harangues ou deductions d’affaires par moy proposées ès voyaiges passez afin de les insérer au vray en l’histoire qu’il tissoyt , les approuva fort, comme facile luy estoyt d’approuver chose partant de son sang pour peu digne d’approbation qu’elle feust, et, après qu’eusmes passé plusieurs journées en la lecture de son œuvre, il me prya très fort que, si je demouroye le dernier en la peregrination de ceste vie, je misse, tant en ce qu’il avoyt laissé d’imparfait qu’en ce ou il ne seroyt encores entré, paine d’embrasser et la revision et la continuation de sadicte euvre34.

Jean en appelle aux liens du sang et à la confiance fraternelle que lui accordait Guillaume pour légitimer l’héritage des Ogdoades. La suite de la lettre, après quelques protestations d’humilité, révèle que le cardinal a décidé de céder à la requête de son frère, qu’il a, à cet effet, entrepris de se forger un style et qu’il demande à son destinataire ainsi qu’au Roi d’émettre un avis sur ce premier jet. Selon leur réponse, « ou [il] continueroy[t son] tableau ou bailleroy[t] le pinseau a meilleurs paintres ». Rien n’indique si l’avis fut défavorable ou si Jean dut renoncer à ce projet pour d’autres raisons, mais ces « revision » et « continuation » en restèrent là35.

Martin, que V.-L. Bourrilly juge sévèrement moins brillant que ses deux aînés36, était devenu en octobre 1542 le légataire universel de Guillaume. Le Seigneur de Langey avait choisi, en effet, de transmettre ses terres, son titre et les armes de sa maison au seul de ses frères survivants ayant une descendance, en l’occurrence Marie Du Bellay, qui, à défaut d’héritier masculin, pouvait garder le nom37. C’est donc Martin, le capitaine et « roi d’Yvetôt » par son mariage avec Isabeau Chenu, qui, « estant quelquesfois en repos des armes, et employant [son] temps afin de n’estre pas réputé oisif38 », décida de publier les écrits français de son frère.

L’Antiquité des Gaules et de France, épitomé de 1556

En 1556, Martin fait donc paraître chez le libraire parisien Vincent Sertenas un ouvrage intitulé Epitome de l’antiquité des Gaules et de France, par feu Messire Guillaume du Bellay, seigneur de Langey, Chevalier de l’ordre du Roy, & son Lieutenant general en Piedmont. Sous ce titre qui fait explicitement référence à Jean Lemaire de Belges et au premier livre de Guillaume sur les origines troyennes des gaulois, sont rassemblés « le Prologue ou Preface sus toute son hystoire ; ensemble les Epitomes des quatre premiers livres de l’antiquité des Gaules & de France : aussi quelque oraison, & Espitres faites en latin par luy, & translatées par luy mesmes de latin en françoys39 », tous textes écrits en vernaculaire français.

Dans l’avis « Au lecteur » de l’Epitomé, Martin Du Bellay justifie la publication de l’œuvre de son frère par la volonté de compenser le vol des fameux « mémoires » au mois de janvier 1543, allant même jusqu’à supposer une usurpation du titre d’auteur à une époque où la perception de l’auctorialité évolue (« ses livres luy furent desrobez par quelques uns qui veulent, ainsi qu’il est a presuposer, se vestir comme la corneille Esopique des belles plumes d’autruy »). Mais il rappelle également l’importance pour tout homme de connaître « l’estat des choses passées » et plus encore « comme de son temps le monde se gouverne ». Et qui mieux que le seigneur de Langey, « lequel ayant conjoint les armes avec les lettres » pouvait mettre « par escript l’origine & les gestes des Françoys […] » et « specialement des choses advenues du regne du Roy, de tresheureuse mémoire Françoys premier de ce nom » ? Après un éloge appuyé de la personne de son frère, Martin insiste sur la qualité et sur la nouveauté de son travail, celles d’avoir « aproché de Titelive, en la deduction des causes de chacune entreprise & evenement, description des lieux & personnes, concions & harangues, & non moins en la phrase hystorique, purité de distion, artifice & richesse d’eloquence ». L’idée de mettre en avant les « causes » est directement empruntée au Prologue de Guillaume, car c’est bien dans la recherche d’un enchaînement logique que réside la spécificité de la démarche40. Martin reconnaît néanmoins que ce « peu d’histoire », « ces pièces » qu’il présente au public sont « imparfaites, autant toutesfois louables de doctrine, comme tresrecommandables pour le regard de la vérité ».

Le lecteur contemporain est à bon droit surpris quand il découvre les fragments publiés ici par Martin à la suite du Prologue général : les quatre épitomés correspondent en réalité aux quatre premiers livres de l’Ogdoade consacrée aux origines fabuleuses des Gaulois, bien loin de notre conception de la vérité historique mais qu’il faut replacer dans le contexte renaissant des liens entre mythe et histoire41. On ignore d’ailleurs ce que sont devenus les quatre derniers résumés de l’Ogdoade et l’Ogdoade elle-même42.

La publication de ces pièces peut paraître décevante et la critique s’est interrogée sur la stratégie de Martin et sans doute également de Jean qui ne pouvait y être totalement étranger. La concurrence d’autres ouvrages historiques et la volonté de frapper vite et fort autour du nom de Langey, encore éblouissant, ont peut-être précipité les choses43. Ce choix éditorial en tout cas explique le titre retenu par Martin d’Antiquité des Gaules et de France.

Les textes ajoutés à la fin de l’ouvrage sont les seuls en rapport avec le règne de François 1er. Ils ont été écrits par Guillaume en diverses occasions pour défendre la politique française, notamment en Allemagne. Leur retentissement avait été à la hauteur de leur éloquence et Charles-Quint avait reconnu lui-même que « la plume de Langey [lui avait] trop plus fait la guerre que toute lance bardée de la France44 ». Plus que les fragments, ce sont eux qui témoignent du talent et de l’engagement de Guillaume dans son siècle.

À la fin de l’avis « Au Lecteur », Martin promet cependant de poursuivre ses recherches et d’ajouter ce qu’il pourra trouver des manuscrits de son frère. Il semble évoquer le projet resté à l’état de notes qui aurait dû constituer « deux livres45 dudit feu Messire Guillaume du Bellay » de la Cinquième Ogdoade. Il précise qu’il a l’intention d’ajouter « des choses que luy mesmes à veuës » et, qu’en toute modestie il déclare avoir écrites « en son stile &langage de soldat, non correspondant à celuy de son frere », mais « à tout le moins si près de la verité, qu’il ne craint d’encourir la reprehension dont plusieurs historiographes sont à bon droit blasmez ». Sur les traces de son frère, Martin revendique pour lui-même ce souci de la vérité. Malheureusement, il meurt en 1559 et ne pourra pas réaliser lui-même cet ambitieux programme.

Les Mémoires de Messire Martin Du Bellay (édition princeps 1569) 

Dix ans après la mort de Martin Du Bellay paraissent chez Pierre L’Huillier ses Mémoires46, dont le titre porte son seul nom bien que les écrits de Guillaume y aient leur place. Le terme de Mémoires les range dans un genre auquel ils ne correspondent pas tout à fait47, mais qui sera justifié par René dans son texte liminaire.

Cette édition, pour notre étude de l’œuvre historique de Guillaume, est particulièrement intéressante d’abord parce qu’elle constitue la première véritable publication de son récit du règne de François 1er, ensuite parce qu’elle met en scène quatre strates d’écriture.

Les Memoires de Messire Martin du Bellay, Seigneur de Langey. Contenant le discours de plusieurs choses advenues au Royaume de France, depuis l’an M. D. XIII. jusques au trespasdu Roy François premier, ausquels l’Autheur a inseré trois livres, & quelques fragmens des Ogdoades de Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey son frere. Œuvre mis nouvellement en lumiere, et presenté au Roy par Messire René du Bellay, Chevalier del’Ordre de sa Majesté, Baron de la Lande, heritier d’iceluy Messire Martin du Bellay. Paris, chez Mathieu Guillemot, 1588.

Les Memoires de Messire Martin du Bellay, Seigneur de Langey. Contenant le discours de plusieurs choses advenues au Royaume de France, depuis l’an M. D. XIII. jusques au trespasdu Roy François premier, ausquels l’Autheur a inseré trois livres, & quelques fragmens des Ogdoades de Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey son frere. Œuvre mis nouvellement en lumiere, et presenté au Roy par Messire René du Bellay, Chevalier del’Ordre de sa Majesté, Baron de la Lande, heritier d’iceluy Messire Martin du Bellay. Paris, chez Mathieu Guillemot, 1588.

Guillaume

Si l’on suit l’ordre chronologique, la première de ces strates est constituée par le texte même de Guillaume. Sont, en effet, enfin imprimés les fragments français de la Cinquième Ogdoade placés ici aux Cinquiesme (f. 137r), Sisiesme (f. 165r) et Septiesme (f. 197v) Livres de l’ouvrage sous le nom de leur véritable auteur (Pour le Huictième Livre, le nom de Guillaume sur de nombreux exemplaires est barré et corrigé à la main en « Martin », f. 235r). Ils sont précédés du « Prologue des Ogdoades de messire Guillaume de Langey, de la perte desquelles ne reste, que les trois livres qui ensuyvent avec quelques fragmens espars en cest œuvre, & les Epitomes de l’antiquité des Gaules qui sont imprimées à part » (n.p.) soit dix folios déjà parus avec l’Epitomé. À la fin du Quatriesme Livre, juste avant le Prologue, Martin a pris soin d’introduire (f. 136v) le changement d’auteur :

Vous verrez par cy apres deux livres [sic] que j’ay recueillis des fragments de ceux qu’avoit composé feu Messire Guillaume du Bellay mon frere, puis apres je finiray au mieux qu’il me sera possible, & au plus pres de la verité, ce qui est advenu jusques au trespas du feu Roy François de bonne mémoire premier de ce nom.

La période couverte par le récit de Langey va de la mort de François II Sforza, duc de Milan, en 1535, jusqu’au séjour de Charles Quint dans la ville d’Aix en 1536, au cours de la huitième guerre d’Italie.

Martin

La seconde strate est la « continuation » de l’œuvre de Guillaume par Martin qui a enchâssé l’œuvre de son frère dans ses propres chapitres, les quatre précédents et les trois suivants (puisque les Mémoires en comptent dix au total). Le long titre du premier précise la qualité de l’auteur ainsi que l’objet, et par conséquent les dates, de son récit :

Premier Livre des Mémoires de Martin du Bellay, Seigneur de Langey, chevalier de l’ordre du Roy, Capitaine de cinquante hommes d’armes de ses ordonnances, et son lieutenant general en ses païs & Duché de Normandie, en l’absence de Monseigneur le Dauphin : Des choses avenües depuis l’an mille cinq cens & treze qu’il vint à la Cour, jusques au trespas du Roy de tres-louable mémoire François premier de ce nom.

De 1513 à 1547, c’est donc, en commençant par les dernières années de Louis XII, l’ensemble du règne de François 1er qui est peint dans cette vaste entreprise. Les dix Livres ainsi enchaînés sont introduits par une « Préface de l’Autheur », rédigée par Martin lui-même, légèrement différente de l’avis au lecteur figurant dans l’Epitome de 1556, et dans laquelle il revendique pour son frère une égale valeur à celle de ses prédécesseurs Paul Émile ou Paul Jove :

Mais quant aux particularitez de ce Royaume, & ce qui concerne les guerres que le feu Roy de tresloüable mémoire François premier de ce nom a esté contraint soustenir & entreprendre, je n’ay veu homme qui se soit employé à les descrire tant amplement & par le menu, que feu mon frere messire Guillaume du Bellay, seigneur de Langey […]

Martin revient ensuite sur les sept Ogdoades latines qu’auraient écrites et traduites son frère avant d’attirer l’attention du lecteur sur les deux intérêts majeurs de l’œuvre, celui d’abord de montrer comme en un « clair miroir » le « pourtrait des occurrences de ce siecle », celui ensuite de révéler la « dexterité d’escrire » de Guillaume, « merveilleuse & à lui peculiere selon le jugement des plus sçavans » : l’intérêt littéraire de l’œuvre est au moins égal pour lui à l’intérêt historique.

La suite indique que c’est bien son amertume face au vol honteux subi en 1543 qui a poussé Martin, dans ses heures de loisir, à faire publier les trois livres restants et à « les accompagner d’autres sept contenans plusieurs briefs memoires tant de la paix que de la guerre, dont je puis parler en partie comme tesmoing oculaire ».

On voit qu’il reprend la question de l’authenticité du témoignage oculaire, même si, comme Guillaume, il ne refuse pas les paroles d’autres, alors mieux placés que lui pour être « au plus pres de la verité », cette vérité qui est le socle de tout écrit historique et qu’il défend pour son frère : « y en a beaucoup qui se sont permis telle licence, d’escrire à la volée tout ce qui leur tomboit en l’esprit, qu’en maints endroits ils nous ont depaint des fables plus que pueriles en lieu d’histoire »…Il réclame enfin la bienveillance du lecteur puisque son statut de soldat ne lui a pas permis de « farder [son] ouvrage des couleurs de Rhétorique », et qu’il s’est contenté de « preparer le chemin à ceux qui sont plus savants que [lui] ».

René

À cette conséquente deuxième strate, s’ajoute le texte liminaire de René Du Bellay, Baron de la Lande et époux de cette Marie, fille de Martin, qui avait hérité du nom. Car c’est bien lui, le gendre qui, une génération après, publie l’œuvre de son beau-père, restée jusque-là dans le patrimoine familial. Dans l’adresse initiale (n.p.) à Charles IX (dont il espère au passage prolonger l’amitié des rois de France envers la famille Du Bellay), René raconte comment il a découvert le texte dans la riche bibliothèque dont il a hérité :

[…] en laquelle recherchant par apres plus curieusement ce qui estoit de rare & singulier, j’arrivay sur quelques volumes escrits la plus part de la main d’iceluy [Martin], lesquels ayant lu à loisir, trouvay estre une belle histoire des choses advenües de son temps en vostre Royaume & païs circomvoisins, laquelle toutesfois par modestie, il voulut seulement appeler memoires, estimant (comme je croy) que le tiltre d’histoire emportast quelques ornemens d’eloquence, plus grans qu’il ne pensoit y estre employez : ou bien qu’il eut propose ne [sic] de la faire imprimer, mais la laisser en ceste librairie comme annales privees & particulieres pour nostre maison du Bellay. Et de fait le doute que telle fut sa volonté, m’a retardé depuis dix ans qu’il est decedé, de faire imprimer ceste histoire.

René ne se contente pas de relater les circonstances de cette (re)découverte, il soumet à son lecteur des hypothèses intéressantes pour nous sur le choix du titre et les intentions de l’auteur sur le devenir du texte. Il souligne l’intérêt que peut représenter cette œuvre pour le roi, pour le Royaume et pour la postérité (c’est à Philippe de Commynes que, pour sa part, il la compare) et ce faisant, justifie sa propre démarche éditoriale. René imagine que ce serait pour le roi un « singulier plaisir » de connaître comment son aïeul a affronté les turbulences du pouvoir et les aléas de ses combats ; que les « anciens capitaines » de ce temps-là y trouveraient également « quelque soulagement en leur vieillesse » à l’évocation d’un passé commun ; enfin, que ce serait un « aiguillon » exemplaire pour la vertu de la jeunesse…

La valeur historique et morale prend ici le pas sur l’aspect littéraire. De plus, le statut de son auteur la protège des critiques traditionnellement adressées aux historiens qui n’ont pas connu le terrain, et puis elle se distingue, toujours selon René, des autres écrits historiques contemporains par la nouveauté de certaines informations de première main.

Comme Guillaume et comme Martin avant lui, le Baron de la Lande insiste sur la valeur du témoignage et la responsabilité de celui qui transmet l’histoire, il s’applique à montrer l’impartialité des Du Bellay qui ne cachent rien des fautes ou des prouesses des acteurs des deux camps, celui de François 1er ou celui de Charles Quint. Hormis ce texte liminaire, rien ne garantit que René ait pu seul mener le travail de reconstitution qu’impliquaient les documents originaux épars. Henri de Mesmes (dont le nom figure au bas du Privilège) et Guillaume Cappel48 auraient joué un rôle majeur dans l’élaboration de cette édition.

Pierre l’Huilier

Enfin, l’intervention de l’éditeur (Pierre L’Huilier ?) vient comme une véritable quatrième et dernière strate, bien qu’elle se situe en tête de l’ouvrage. Dans « Le libraire au lecteur » (n.p.), le successeur de Josse Bade et « imprimeur du Roi » a éprouvé le besoin de rappeler la difficulté de la mise sous presse de ces mémoires dans le contexte des guerres civiles. Ses remarques préliminaires, sans doute exagérées par calcul, sont néanmoins elles-mêmes un précieux témoignage sur les conditions de travail et les difficultés de son métier. Elles nous renseignent par la même occasion sur le manuscrit qu’il a eu entre ses mains, puisque, dit-il, s’il y a des erreurs et des coquilles dans le livre qu’il présente au public, c’est que

L’escriture de la main de monsieur de Langey estoit malaisée à lire, comme ainsi celle du secrétaire qui escrivoit quelques fois sous luy, pleine de lettres ambigües

L’imprimeur s’excuse par avance de ces fautes, il relève par exemple l’erreur d’attribution du huitième livre, invite le lecteur à se référer à la « table d’errata » établie en fin d’ouvrage et promet une seconde édition de meilleure qualité. Au-delà de la démarche toute commerciale, Pierre L’Huillier a le mérite de présenter cette vaste entreprise en d’heureuses formules finales :

Jouïssez donc (Lecteur) à la bonne heure de la diligence de ces deux Chevaliers qui ont voulu profiter à leur patrie de leur vivant & apres leur mort. Jouïssez pareillement du plaisir que vous fait le sieur Baron de la Lande leur heritier, lequel ne voulant estre chiche d’un tel bien, l’a communiqué liberallement à la postérité.

À en croire ses nombreuses rééditions jusqu’à la fin du xvie siècle, l’ouvrage connut un grand succès :

- Paris, Pierre L’Huillier, 1569 (édition princeps)
- Paris, Pierre L’Huillier, 1570
- Heidelberg, pour Jean Mareschal, 1571 (2ème édition)
- Paris, Pierre L’Huillier, 1571
- Paris, Pierre L’Huillier, 1572 (3ème édition qui présente la particularité d’introduire la distinction typographique entre le « u » et le « v », entre le « i » et le « j », distinction qui ne sera systématique en imprimerie qu’à la fin du XVIIe siècle)
- La Rochelle, Pierre Davantes, 1573
- Paris, chez Gilles Beys, 1573
- Paris, Pierre L’Huillier, 1573
- Paris, Gabriel Buon, 1582
- Paris, Pierre Le Voirier, 1582
- Paris, Pierre Le Voirier chez Abel L’Angelier, 1582
- Paris, Pierre Le Voirier chez Gervais Mallot, 1582
- Paris, Pierre Le Voirier chez Gilles Bey, 1582
- Paris, Pierre Le Voirier chez Guillaume Auvray, 1582
- Paris, Pierre Le Voirier chez Thomas Brumen, 1582
- Paris, Pierre Le Voirier chez Thomas Périer, 1582
- Paris, pour Abel L’Angelier, 1585
- Paris, pour Abel L’Angelier, 1586
- Paris, chez Mathieu Guillemot, 1588
- Paris, Pierre Le Voirier chez Félix Le Mangnier, 1588
- Paris, Pierre Le Voirier chez Jean Houzé, 1588
- Paris, Pierre Le Voirier chez Michel de Roigny, 1588
- Paris, Pierre Le Voirier et Pierre L’Huillier, 1588
- Paris, Le Blanc, 1589
- Genève, pour Jacques Chouet, 1594

C’est dans l’une de ces éditions que Montaigne a lu les récits de Guillaume et Martin Du Bellay pour en tirer le commentaire que l’on sait49 sur leur prétendue impartialité :

Il ne se peut nier qu’il ne se decouvre évidemment, en ces deux seigneurs icy, un grand dechet de la franchise et liberté d’escrire […] C’est icy plustost un plaidoier pour le Roy François contre l’Empereur Charles cinquiesme qu’une histoire. Je ne veux pas croire qu’ils ayent rien changé quant au gros du faict ; mais, de contourner le jugement des evenemens, souvent contre raison, à nostre avantage, et d’obmettre tout ce qu’il y a de chatouilleux en la vie de leur maistre, ils en font mestier.

Les Mémoires de Messires Martin et Guillaume Du Bellai-Langei (1753)

Nulle trace, nulle mention à ce jour d’une édition des Mémoires datant du xviie siècle. Ils ne semblent réapparaître qu’au milieu du siècle suivant, en 1753, chez Nyon à Paris, sous l’impulsion de l’Abbé Lambert à qui l’on devait déjà, depuis 1750, une ambitieuse Histoire générale civile, naturelle, politique et religieuse de tous les peuples du monde. Avec des observations sur les mœurs les coutumes les usages et caractères, gouvernement, mythologie, etc.

Ce sont cette fois neuf volumes in-12 qui regroupent les Mémoires de Martin et Guillaume du Bellai-Langei mis en un nouveau style : auxquels on a joint les Mémoires du Maréchal de Fleuranges qui n’avoient point encore été publiés et le journal de Louise de Savoie50. La mère de François 1er côtoie ici le duc Robert III de la Marck, compagnon d’armes de ce roi et devenu Maréchal au cours de son long emprisonnement ordonné par Charles-Quint.

Joindre les écrits de tels acteurs et témoins du règne prouve à quel point le projet de l’Abbé Lambert est d’y apporter un éclairage synchronique. Le sous-titre, « Le tout accompagné de notes critiques & historiques, & de pièces justificatives pour servir à l’histoire du règne de François 1er », confirme cette ligne.

Pour faciliter la lecture comme la compréhension du texte, et sans doute dans un élan propre au XVIIIe siècle, souvent didactique, des manchettes ont été ajoutées à chaque page pour indiquer l’année où se déroulent les événements relatés (élément qui ne figure jamais dans le texte d’origine), quelques précisions sur les lieux ou les personnes concernées, et, pour plus d’aisance, chose que V.-L. Bourrilly reprochera amèrement à cette édition51, le texte adopte une orthographe modernisée que l’auteur appelle « en nouveau style ».

Un impressionnant dispositif de huit textes successifs présente les livres des frères Du Bellay dont les deux noms figurent côte à côte pour la première fois dans le titre général de l’ouvrage :

- Une dédicace, adressée à un ministre et non au roi, « À Monseigneur le Marquis d’Argenson52, ministre d’État », signée de l’Abbé Lambert (n.p.) qui y dépeint le règne de François 1er comme le « temps de la renaissance des Héros » et souligne à bon entendeur qu’il n’y a pas que le domaine des armes pour servir son Roi.
- Un « Avis de l’éditeur » (n.p.), qui complète sans doute après coup sa Préface, prévient le lecteur de ce que le « style » de René et de Martin dans les deux textes liminaires suivants n’a pas été modifié, car relevant « d’une noble simplicité ». On attire son attention sur deux autres choix opérés, l’éviction notable du Prologue de Langey et la modernisation de la langue : « J’aurois pu joindre ici le Prologue des
Ogdoades dont parle l’Auteur dans sa Préface ; mais ce qui m’a déterminé à le supprimer est que ce morceau, rempli de l’érudition la plus profonde, ne m’a pas paru avoir un rapport assez marqué avec les Mémoires que j’offre au Public, & dont je n’ai fait que rafraîchir le style ». L’importance conceptuelle de ce Prologue au regard de la démarche historiographique n’a pas été retenue.
- Le texte de René Du Bellay, qui était déjà en tête de l’édition de 1569 et relatait la découverte de l’ouvrage, intitulé cette fois, et de manière erronée, « Épître dédicatoire de l’auteur
53 », est adressé « Au Roy très-chretien », Louis XV (VII).
- Une « Préface de l’Autheur » (orthographié « Auteur » à l’intérieur des feuillets) qui est, à l’identique, celle de Martin Du Bellay présentant le texte de son frère (XV).
- Une « Préface de l’éditeur » (XX) : les
Mémoires sont présentés comme « ce que nous avons de parfait, & de plus achevé en ce genre d’Ouvrage. Personne n’ignore qu’ils ont servi de guides à nos meilleurs historiens ». L’argument de vérité est une nouvelle fois avancé (« Qui pouvoit être mieux instruit de la vérité que les deux illustres Auteurs de ces Mémoires ? »). Ils seront très utiles à qui veut « acquérir une parfaite connoissance de l’Art Militaire ou pour un Négociateur » (où l’on retrouve la dimension didactique), et de citer un large extrait du Prologue de Guillaume non reproduit. Autre intérêt de l’ouvrage selon l’éditeur, rien n’est superflu dans l’espace des quarante années relatées, tout y est « suivi », « lié », « intéressant ». L’Abbé revient enfin sur la modernisation de la langue : « Tout mon soin a été de rajeunir le style d’un Auteur qu’on ne lisoit plus & qu’on devroit lire toujours. Ainsi ce n’est ici qu’une espèce de traduction mais une traduction fidelle […]. » Outre les indications sur les raisons de ce parti pris, l’auteur révèle peut-être pourquoi on ne trouve pas de réédition avant lui, et pourquoi il a voulu donner une nouvelle vie à ce livre que « on ne lisoit plus ». Il explique également la nécessité de « suppléer » à certaines omissions, « d’éclaircir par des notes » certains passages, mais les notes les plus fréquentes concernent les erreurs relevées chez d’autres historiens. Les Du Bellay sont ainsi érigés en référence absolue. Néanmoins, afin de trouver la « confirmation » de leurs dires (ce qui semble contradictoire), il a joint quelques pièces justificatives, comme autant de preuves…
- Un « Éloge historique de Guillaume Du Bellai » (XXIX). Texte évidemment à la gloire de Langey dont on souligne sans nuance la haute naissance, la parfaite éducation, les exploits guerriers, les ambassades majeures auprès de Charles-Quint puis des protestants, l’action fondatrice en Piémont et le dévouement sans borne pour son roi et maître… C’est un véritable panégyrique qui se termine par le récit de sa mort à « Saint Saphorin » et l’évocation du « superbe monument » dressé pour lui au Mans, que « l’on voit encore aujourd’hui », comme un lien indéfectible entre Guillaume Du Bellay et le lecteur contemporain.
- Un « Éloge historique de Martin Du Bellai » (XLIX) : on retrace de même ses exploits militaires et sa fougue au combat depuis son entrée au service du roi jusqu’à sa mort. La fin du texte est consacrée à l’écriture des
Mémoires : « Ce fut dans sa retraite qu’il composa la belle Histoire des choses les plus mémorables arrivées en son temps. Cet excellent ouvrage parut pour la première fois en 1569. & on en donna depuis quatre différentes éditions ; sçavoir en 1572, en 1573, en 1587, & en 1594. Hugues Sureau donna une traduction Latine de ces Mémoires, & la publia à Francfort ». Avec le retour au latin, la boucle semble bouclée, et Lambert semble confirmer qu’il n’y a pas eu, de 1594 jusqu’à lui, de nouvelle édition.
- Enfin, un « Éloge historique de Jean Du Bellai » LXII) : il peut paraître étonnant qu’un éloge soit consacré à Jean qui n’a pas pris part à la rédaction des
Mémoires. Lambert salue son esprit supérieur, qui le fit exceller dans toutes les sciences, et son style aussi beau que celui de Cicéron. C’est d’abord l’homme de Lettres qui est mis en valeur ici, avant même l’ambassadeur. Comme pour Guillaume, les échecs de ses stratégies ne sont pas de son fait et l’amitié du roi pour lui reste indéfectible, ce que l’on sait être faux. Lambert ne doute pas que Jean Du Bellay fût devenu pape si le temps l’avait permis.

Cette édition à la gloire du règne de François 1er et de la famille Du Bellay a été parfois décriée pour son contenu partial et pour être une simple copie « traduite » d’un original fautif. Elle est néanmoins de belle facture et son ambition didactique en fait un objet d’étude intéressant.

Les Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay seigneurs de Langey (1786)

Tout autre est le projet de l’édition de 178654, œuvre de Jean-Antoine Roucher, ce poète de la fin du XVIIIe siècle, longtemps éclipsé par son ami André Chénier dont il partagea le sort malheureux qui les conduisit à l’échafaud en 1794. On garde de ce Roucher un poème monumental en douze chants, Les Mois (1779), des portraits dans la prison Saint-Lazare par son autre ami et codétenu Hubert Robert55, ainsi que les témoignages de son intense activité d’éditeur, comme le souligne son premier biographe, Antoine Guillois, presque un siècle plus tard :

En prose, il recherchait l’honneur d’être utile à la littérature et à l’instruction générale de ses contemporains. Si pour vulgariser dans les hautes classes les doctrines économiques, Roucher songeait déjà à traduire l’ouvrage de Smith sur la Richesse des Nations, il n’oubliait pas non plus les femmes, pour lesquelles, avec Lacépède, Lalande et Imbert, il créait cette Bibliothèque universelle des Dames, où il s’était réservé un petit cours de philosophie à l’usage de ses belles lectrices. Il collaborait aussi avec Panckoucke, Berquin, Imbert, et surtout avec d’Ussieux et Duchesnay, à la Collection des Mémoires relatifs à l’histoire de France56.

Cette monumentale « collection », dont le nom même porte une empreinte encyclopédique, ne comporte pas moins de 72 volumes publiés entre 1785 et 1807 par Roucher, ses collaborateurs et, plus tard, ses continuateurs. Ce projet avant tout pédagogique réunissait, dans un dispositif cette fois diachronique, les mémoires de personnages plus ou moins importants, de Joinville à Brantôme, en passant par Gaspard de Coligny ou encore Marguerite de Valois57. Les Mémoires de Martin et Guillaume Du Bellay occupent les volumes 17 à 21 et font suite à ceux du seigneur de Fleuranges et au Journal de Louise de Savoie. Ils sont suivis à leur tour par les Commentaires de Blaise de Montluc.

Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay seigneurs de Langey, dans la Collection universelle des mémoires particuliers, relatifs à l’Histoire de France, tomes XVII-XVIII-XIX-XX-XXI, Londres, Paris, 1786.

Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay seigneurs de Langey, dans la Collection universelle des mémoires particuliers, relatifs à l’Histoire de France, tomes XVII-XVIII-XIX-XX-XXI, Londres, Paris, 1786.

Ce nouveau projet éditorial affiche une démarche plus critique que les précédents, développée dans les quelque vingt pages de présentation et d’explications que comporte la « Notice des éditeurs sur la personne et les Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay, seigneurs de Langey58 ».

Les éditeurs (rien ne permet d’identifier personnellement l’un des porteurs du projet) déclarent s’être appuyés sur l’édition de 1582, « laquelle […] a été confrontée exactement avec les autres, & surtout avec celle de 1569 ». Dans un réel souci d’édition scientifique, ils « se sont assujettis à suivre [les variations] les plus anciennes, comme devant être les plus conformes au manuscrit original ». Cependant, l’édition de 1582 présente l’avantage à leurs yeux de donner « plusieurs notes marginales, où sont expliquées quelques expressions surannées. On a attribué ces notes à M. de Meme, Seigneur de Malassisse, Maître des requêtes, & Magistrat connu dans son tems par son amour pour les Lettres » (note b, p. xvii).

Les éditeurs ont inséré à leur tour de nombreuses notes dans leurs pages de présentation, comme une note descriptive sur le mausolée du Mans (note a, p. xii ), sur les titres honorifiques de Martin (note a, p. xiii) ; sur l’œuvre littéraire de Jean Du Bellay avec une allusion à la dernière parution en date de celle de Rabelais, en 1783, chez Jean-François Bastien (note a, p. xv), sur les erreurs d’attribution des textes liminaires par La Croix du Maine (note a p. xvii), etc. Ces notes comprennent également de larges citations tirées des Prologues de Guillaume et de Martin qui, pour la première fois, ne sont pas reproduits dans le corps de l’ouvrage. On a remplacé leurs textes liminaires par la Notice des éditeurs qu’on jugeait mieux informée. En outre, figurent en fin de chaque volume des « observations », longs développements sur le contexte politique et diplomatique ou sur des personnalités évoquées dans le texte, et une table des sommaires qui ouvrent chacun des Livres.

Pour terminer sur l’accompagnement dévolu au lecteur dans ces pages, citons ces lignes où sont expliquées la composition et l’intention des Mémoires, mais de manière à valoriser la continuité historique entre le travail de Guillaume et celui de Martin, quitte à gommer le fait que les motivations et l’écriture des deux auteurs différaient :

Sur dix Livres que contiennent ces Mémoires, les quatre premiers & les trois derniers sont de Martin : les autres appartiennent à Guillaume du Bellay. Langey avoit rédigé les Mémoires de son tems en sept Ogdoades ; c’est ainsi qu’il les intituloit. Les trois Livres que son frère nous a conservés, étoient une partie de sa cinquième Ogdoade : c’est là tout ce qui nous reste de son travail. Martin du Bellay a réuni ces fragmens avec ses propres Mémoires, de manière qu’il n’existe aucune interruption dans la chaîne des évènemens, depuis les deux dernières années du règne de Louis XII, jusqu’à la mort de François 1er (p. XVIII, XIX, XX)

Néanmoins, pour la première fois, avec cette édition de 1786, on porte un jugement de valeur sur les styles respectifs de Martin et de Guillaume et l’on établit une hiérarchie dont toutes les éditions ultérieures s’empareront. Chez Martin on note « tant de complaisance » à raconter « tout ce qu’il a vu, qu’il ne fait grâce d’aucun détail » (p. XX), scrupuleuse fidélité qui confine parfois à la lourdeur et que l’on attribue à sa qualité « d’ancien militaire ».

Chez Guillaume, au contraire, « on reconnaît l’homme d’état qui médite toujours, & pense profondément », on savoure son « espèce d’éloquence naturelle », les formes oratoires qui affleurent « jusques dans ses récits59 ». Dès lors, les éditeurs n’auront de cesse de souligner la supériorité des écrits de Guillaume sur ceux de Martin, sans en faire pour autant la démonstration, la qualité du style semblant aller de pair avec l’homme de qualité.

En contrepartie de cet éloge, la Collection universelle ne passe pas sous silence les reproches que l’on peut faire à Langey : d’abord des critiques sont officiellement émises sur les fables de son Epitome, non pas sur la place du mythe mais sur le fait « d’avoir été le premier qui ait jetté des nuages sur le merveilleux de l’Histoire de Jeanne d’Arc. Il s’est efforcé de la reléguer dans la classe de nos Fables historiques […] Langey en tournant [le sujet] en ridicule a malheureusement eu quelques imitateurs » (note a, p. viii-ix).

Ensuite, le rapport des Du Bellay à la vérité est interrogé (« Nous ne dissimulerons pas qu’on a accusé Langey de partialité. La critique a prétendu que son ouvrage avoit le ton d’un Factum, dirigé personnellement contre Charles-Quint. On a fait le même reproche à Martin Du Bellay » (p. XXII). La Notice cite même « un de nos anciens Moralistes », en qui tout lecteur aura reconnu Montaigne, et avec lequel elle engage un dialogue fictif, arguant que le même reproche fut fait à « Comines » en son temps, et que, si les Du Bellay ont défendu leur roi avec un peu trop de zèle, c’est que le siècle obligeait à choisir son camp, témoins tous ces auteurs qui prirent largement le parti de Charles-Quint…La Notice trouve des excuses à leur manque d’objectivité, mais, ce faisant, elle reconnaît sa réalité.

Un autre intérêt de cette longue présentation est de nous plonger dans la polémique qui semble faire rage autour de la publication des Mémoires. Une trentaine d’années sépare l’édition de la Collection universelle de celle de l’Abbé Lambert dont nous avons parlé précédemment, et pourtant, une violente rivalité les oppose. Proposant de détailler la « manière dont [ils ont] préparé [leur] édition », les éditeurs vont prendre pour cible et contre-exemple la version de leur prédécesseur : « Des critiques, faits pour nous en imposer, ont donné des éloges à l’édition de l’Abbé Lambert, quand elle parut. » Ils citent même l’extrait élogieux du Journal des Sçavans du mois de mai 1754 (note b, p. xxv) qu’ils vont s’employer à démonter dans les dernières pages de la Notice.

Déjà, dans les premiers feuillets, plusieurs remarques pouvaient attirer l’attention des lecteurs sur ce parti-pris, remarques où étaient relevées des erreurs antérieures sur le décompte des éditions des Mémoires (« L’Abbé Lambert réduit ces éditions à cinq, tandis qu’il en existe neuf, sans compter la traduction latine de Hugues Sureau en 1574. La dernière de ces éditions fut faite à Genève en 1594 » (note b, p. xvii), ou sur le dispositif des textes liminaires (« C’est cette Epitre dédicatoire que l’Abbé Lambert, dans le premier Volume de son édition de Du Bellay, intitule : Préface de l’Auteur. En la lisant, il aurait dû voir qu’elle n’a point été composée par Martin Du Bellay, véritable Auteur des Mémoires, mais par le Baron de la Lande son gendre, & Editeur de l’Ouvrage60 », (note d, p. xvii-xviii)). Mais c’est surtout à la question de la langue jugée inauthentique, que les éditeurs vont s’en prendre. Le choix du « nouveau style » par Lambert ne serait qu’une concession facile au public, un désir de plaire auquel l’édition de 1786 se refuse de céder :

Ce sont les originaux que nous avons promis, & non pas des traductions. Mais eussions-nous souhaité de plaire au public, en nous écartant de notre plan, une comparaison suivie du texte de du Bellay, avec la traduction de l’Abbé Lambert, auroit bientôt terminé notre irrésolution. Comme cet ouvrage est très répandu, l’amour de la vérité nous force de déclarer que ceux qui croyent lire du Bellay dans l’édition de l’Abbé Lambert, se trompent. On peut regarder sa traduction comme une espèce de paraphrase. (p. xxvi)

Ce qui aurait dû n’être qu’un argument en faveur de leur propre édition prend une telle proportion dans le discours que la suite semble avoir pour seul but de disqualifier définitivement l’édition précédente, encore trop présente à leur goût sur le marché. La concurrence éditoriale en cette fin de XVIIIe siècle est particulièrement féroce et il faut lutter pour imposer son ouvrage et en assurer les ventes. Une succession de reproches très précis en découle :

Souvent il prête à du Bellay, ce que du Bellay n’a point dit. Les noms y sont mutilés ou omis : quelquefois de deux personnages il n’en fait qu’un. Tout ce qui a pu embarrasser est retranché ; il a supprimé des réflexions piquantes, & des faits curieux. Il paroit surtout qu’il n’aimoit pas les anecdotes […] L’Abbé Lambert a rejetté tous ces faits, & beaucoup d’autres de ce genre. (p. xxvi-xxvii)

Mais le reproche majeur concerne ce fameux style oratoire, si éloquent, de Guillaume Du Bellay et qui fait la saveur essentielle du texte : « Si on compare sa traduction avec le texte, on s’apperçoit que le sens est toujours affoibli, & que les prétendus synonymes qu’il y substitue, ne rendent qu’imparfaitement cette originalité & cette précision, qui caractérisent le style de l’Auteur » (p. XXVII). La Notice se livre alors à une véritable comparaison stylistique entre l’original et sa « traduction », à travers un exemple longuement analysé et suivi de cette conclusion relativement acerbe : « nous osons inviter le Lecteur à consulter les Observations & les Notes qui accompagnent notre édition. Quoiqu’on n’y ait relevé que les fautes essentielles de l’Abbé Lambert, on verra sans peine combien le texte a perdu entre ses mains » (p. XXVII).

Malgré tout, l’édition de 1786 a concédé quelques emprunts à celle de 1753, preuve qu’elle n’était pas si mauvaise. Cette dette, la Notice la reconnaît en partie (« il y auroit quelque injustice à ne pas avouer qu’il l’a enrichi[e] de notes & de pièces justificatives, intéressantes & curieuses […] on a aussi emprunté de sa traduction plusieurs harangues […] », mais la plus grande part des similitudes reste implicite et cependant assez nette.

Comme l’Abbé Lambert, les éditeurs ont choisi de commencer par l’éloge de la famille Du Bellay et de « l’antiquité de sa noblesse », par les portraits flatteurs de Guillaume, Martin, et là encore de Jean, même si, contrairement à l’édition précédente, l’ajout est légitimé par le rôle actif du personnage (« Après avoir peint Langey & Martin du Bellay, qu’il nous soit permis de dire un mot d’un autre de leurs frères, de Jean Du Bellay. Compagnon de leur gloire, & l’émule de leurs vertus, il fut comme eux, un des ornements du seizième siècle.

On le verra souvent jouer un rôle important dans leurs Mémoires » (p. XIV-XV)). Comme l’Abbé Lambert, les éditeurs chantent la beauté et la qualité de l’œuvre en des termes qui sont directement empruntés à leur prédécesseur et que nous avons cités plus haut : « tout y est lié, tout y intéresse : aussi ces Mémoires ont-ils servi de guides à nos meilleurs Historiens ; & on ne peut étudier l’Histoire de François 1er, sans les avoir sous la main61 » (p. XXIV-XXV).

Quel fut le destin marchand de cette édition de 1786 ? Pour peu que l’on prête foi aux paroles qu’un autre éditeur (aux prises avec les mêmes interrogations commerciales) prononça quelques années après, et moyennant quelques précautions, nous pouvons nous en faire une idée :

En 1785, M. Boucher [sic], l’auteur du poëme des Mois, et deux autres écrivains moins connus, entreprirent de les faire paroître par souscription. Ils n’avoient pas de dessein arrêté, et leur plan semblait subordonné au succès qu’obtiendroient les premiers volumes. Leur travail, souvent interrompu, ne fut terminé qu’en 1791 […]
La Collection des Mémoires sur l’Histoire de France fut terminée au moment où l’on tendoit évidemment à renverser le trône, et où les persécutions forçoient une multitude innombrable de familles à sortir du royaume. Plusieurs souscripteurs, mécontens du ton des derniers volumes, avoient refusé de les recevoir ; d’autres, ruinés ou en fuite, n’avoient pu compléter leur collection : ce qui restoit d’exemplaires dans les magasins en 1792, 1793 et 1794, n’inspirant aucun intérêt à des hommes qui s’étoient fait une loi d’abjurer tous les souvenirs, se détériora ou se perdit. Il résulta de cette réunion de circonstances, qu’il devint très-difficile de se procurer par la suite des exemplaires complets de la Collection des Mémoires sur l’Histoire de France. Cette Collection, si intéressante pour nous, si curieuse pour les étrangers, n’existe donc que dans un très-petit nombre de bibliothèques, et n’est point dans le commerce62.

Ainsi parle Claude-Bernard Petitot, « inspecteur général des études » et auteur de quelques tragédies méconnues, lorsqu’il préface en 1821 sa propre Collection des mémoires relatifs à l’Histoire de France. Aussi partial soit-il, le tableau qu’il brosse de l’œuvre de son prédécesseur Roucher nous en apprend beaucoup sur la réception et la diffusion des textes de 1786 : manque de planification réelle, ton trop polémique, difficultés dans l’aboutissement final semblent expliquer la rareté de ces volumes sur le marché du livre, et par conséquent, justifier une nouvelle édition.

Les Mémoires de Messire Martin Du Bellay (1821)

Alors qu’il ôte le nom de Guillaume dans les Mémoires des Du Bellay, Petitot adjoint l’adjectif « complète » au titre de sa Collection dans l’idée d’assurer la continuité qui manquait, selon lui, dans celle de Roucher, à l’image peut-être de ce qu’avait fait Martin pour le texte fragmentaire de son frère. Comme on peut s’y attendre, l’éditeur est assez sévère à l’égard de l’édition précédente : née « à l’époque de la Révolution », ses auteurs se sont laissés entraîner « sans doute malgré eux par l’esprit qui régnoit, ils prirent un ton peu convenable pour un commentaire historique ; leurs réflexions devinrent amères ; ils se permirent des digressions qui ressemblèrent à des diatribes ». La qualité même de leur travail est remise en cause puisqu’ils « n’ajoutèrent que des notices et des observations faites à la hâte, et peu propres à répandre de la lumière sur les passages obscurs ».

D’emblée l’ambition affichée par Petitot n’est plus vraiment didactique mais morale. La distance63 qui nous sépare des événements n’engage plus tout à fait la réflexion historique et politique du lecteur mais bien plutôt son positionnement éthique :

La crainte qu’on devoit avoir au commencement de la révolution, de retracer les dissensions du seizième siècle, n’a plus aucun fondement de nos jours. Après une lutte sanglante de vingt-cinq années, c’est sur les événemens récens que les ressentimens s’exercent, et non sur des événemens arrivés il y a trois siècles ; c’est pour ou contre les contemporains qu’on prend parti, et non pour ou contre les Coligny ou les Guise. Ainsi, loin de pouvoir aigrir nos discordes, le récit des malheurs et des fautes de nos pères nous transporte pour ainsi dire dans un monde nouveau ; il nous offre les suites funestes des passions des hommes sur des objets très-importans alors, nuls aujourd’hui ; nous montre ainsi le néant de l’orgueil humain dans la destruction totale de ce qui servoit d’aliment à ses fureurs, et nous engage à mettre moins de chaleur et d’opiniâtreté à soutenir des théories qui périront peut-être avec nous. Tel est l’avantage de cette lecture, qu’en retraçant sous les couleurs les plus fortes les résultats des guerres civiles, elle nous dispose à la modération et à la paix, sans nous rappeler aucun souvenir qui puisse rouvrir nos plaies et réveiller nos ressentimens64.

S’il a jouté des « notices sur chaque auteur et des observations sur chaque ouvrage », Petitot a globalement conservé la mise en forme de la collection : les Du Bellay occupent les volumes xvii à xix de la première série et sont à nouveau entourés d’un côté de Louise de Savoie et de l’autre, de Montluc. La notice présente là encore les trois frères, mais, cette fois dans un ordre différent puisque Jean succède à Guillaume et que Martin vient ensuite, suivant l’ordre de naissance. La présence de Jean est justifiée, comme en 1786, par son rôle dans la famille Du Bellay que l’on glorifie à travers les destins croisés de ces trois plus illustres représentants.

Les mêmes anecdotes que dans l’édition Roucher sont rapportées et on peut mesurer à quel point Petitot s’en est inspiré : même construction, même contenu. Bien que le discours soit élogieux et que jamais les échecs ne soient directement imputables à la fratrie, l’auteur insiste davantage néanmoins sur ce qu’il nomme la « disgrâce » des frères, qui après la mort de Guillaume semblent contraints à la retraite65, sujet qui n’était pas évoqué dans les éditions précédentes. Curieusement, le texte tend à faire de leurs trois parcours individuels une destinée commune dont témoigne le « ils » constamment utilisé et leur évocation respective à chaque phrase. À ce titre d’ailleurs, il associe Martin et Guillaume dans la même catégorie des « guerriers », ce qui lui fait regretter que « le cardinal leur frère, dont il nous reste des lettres pleines d’intérêt, n’ait pas contribué à ce monument précieux de notre histoire ».

Les défauts des Mémoires sont clairement relevés : défauts de construction dans les disproportions engendrées par le manque de temps dont disposait Martin pour compléter à la même échelle le texte de son frère ; défauts de forme dans le caractère « trop » officiel des écrits de deux frères qui, « se croyant obligés par leur position à garder de grands ménagements, évitent de traiter les matières délicates ». S’il cite longuement Montaigne, il n’est plus du tout question pour lui de convoquer une quelconque objectivité des auteurs. Et pour corriger ce défaut, Petitot a rédigé lui-même une Introduction nourrie des avancées de la science historique de son temps afin de mieux « lier » le récit à « l’Histoire générale » de son siècle, sorte de contextualisation à la lumière contemporaine.

Claude-Bernard Petitot termine sa notice par un rappel de l’histoire éditoriale des Mémoires et, dans un souci revendiqué de rigueur scientifique, attire notre attention sur les variations de format : l’édition princeps de 1569 par René, les réimpressions « dans le même format [volume in-folio] en 1572, 1582, 1588, et dans le format in-8 en 1570 et 1586. L’abbé Lambert les traduisit en 1753, en français moderne ; mais sa version, foible et decolorée, fut loin d’obtenir le succès […] ». À la lecture de cette liste, il peut paraître étrange que l’édition de Roucher de 1786, pourtant largement commentée dans le « Discours préliminaire » de la Collection, ne soit pas même mentionnée ici. La dernière remarque sur la traduction de l’Abbé Lambert permet en contrepoint d’avancer l’argument d’authenticité déjà rencontré dans l’édition précédente :

Les connaisseurs préférèrent l’original, que nous reproduisons aujourd’hui, et dont le style, quoique moins agréable que celui d’Amyot, offre une franchise, une énergie et une vigueur qui conviennent très bien au genre historique.

Cette sorte d’appel aux « happy few » institue par la même occasion un « genre historique » dont les fondements semblent reposer sur les « progrès » de la connaissance historique apportés par les contemporains, et de ce fait chaque livre des Mémoires est augmenté d’un exposé historique année par année de l’Histoire de France et ses rapports avec le reste de l’Europe.

Enfin Bourrilly vint… ?

Victor-Louis Bourrilly est le premier, au tournant du XIXe siècle, à faire de Guillaume Du Bellay et de ses écrits historiques un objet de recherches universitaires. Ce professeur d’Histoire au Lycée de Toulon lui a consacré plusieurs ouvrages et plusieurs années, en s’appuyant au départ sur les travaux de Barthélémy Hauréau qui, en 1890, publie des Notices et Extraits de quelques manuscrits latins de la Bibliothèque nationale66 dans lesquels sont signalés « Les Ogdoades de Guillaume Du Bellay, ouvrage important pour l’histoire du règne de François 1er ». En 1905, Bourrilly publie un ouvrage de référence encore aujourd’hui, sa thèse de doctorat, une monographie sur Guillaume Du Bellay, Seigneur de Langey 1491-154367 dont il retrace en historien scrupuleux la vie, les engagements et la postérité. Le septième et dernier chapitre, « Les Ogdoades et l’œuvre historique de Guillaume Du Bellay68 », établit une histoire des manuscrits latins et français jusqu’à leur publication par l’Abbé Lambert en 1753, sans mention des éditions de la fin du xviiie ni du xixe siècle.

La même année 1905, Bourrilly édite les Fragments de la Première Ogdoade de Guillaume Du Bellay, seigneur de Langey69 dont l’Introduction fournit avec précision les sources manuscrites de la BnF ou des archives « du Ministère des Affaires étrangères » (cinq au total70) ainsi que la description de leur état de conservation et de leur contenu. Il détaille aussi le fruit de ses recherches avec une analyse de cette Ogdoade71. Il s’agit là du premier établissement du texte d’après les manuscrits et de la première édition de l’Ogdoade latine, ce qui nous la rend précieuse. On peut lui reprocher néanmoins un certain parti-pris, puisque l’historien se refuse à publier l’intégralité de ces textes latins, soit le début de l’Ogdoade, où sont résumés « à grands traits les principaux épisodes de l’histoire antérieure. Il fait remonter jusqu’à Noé l’origine des Gaulois ». Il s’en explique aussitôt dans un jugement sans appel :

Cet exposé, comme on peut s’en convaincre par le résumé que nous en donnons, n’est qu’un tissu de fables, de légendes et d’absurdités alors courantes et popularisées par l’ouvrage de Lemaire de Belges. Nous avons cru préférable de ne pas le reproduire textuellement72.

Néanmoins, fort de ce long travail de recherche préalable, Victor-Louis Bourrilly entreprend dès 1908 de publier, « pour la Société de l’Histoire de France » et par souscription, les Mémoires de Martin et Guillaume Du Bellay73. Il n’achève ce vaste projet qu’en 1919 avec la parution du quatrième volume.

C’est à la tête de celui-ci que se trouve paradoxalement l’introduction générale terminée par le fameux « Tableau généalogique simplifié de la famille Du Bellay74 » dépliant. Les Mémoires sont introduits dans le premier volume75 par l’épître « Au Roy trè-chrétien » adressée par René Du Bellay à Charles IX, suivie de la « Préface de l’Autheur » rédigée par Martin. V. L. Bourrilly précise qu’il n’a pas « cru indispensable de reproduire » « l’avertissement au lecteur » ainsi que le sommaire des dix Livres, présents dans l’édition de 1569. Il faut noter que le « Prologue des Ogdoades de Messire Guillaume Du Bellay, seigneur de Langey » n’est reproduit qu’en Appendice, à la fin du quatrième volume76.

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Comme tous ses prédécesseurs, Bourrilly commence dans son introduction par la peinture de la famille Du Bellay, mais il privilégie la cohésion familiale en dressant le portrait de l’ensemble de la fratrie, les deux filles et les quatre fils, par ordre d’importance sociale : d’abord brièvement les deux filles, qui ne semblent exister que par leur mariage, puis presque aussi brièvement les deux derniers fils, Nicolas et Jacques. Il enchaîne avec les ecclésiastiques René (qui fut lié à Peletier du Mans et à Ronsard77) et Jean sur lequel il s’attarde plus longuement, renvoyant à ses propres travaux sur le personnage78.

Viennent ensuite les « auteurs » des Mémoires « qui nous intéressent plus directement ». Si la biographie de Guillaume est succincte (cinq pages tout de même), c’est que Bourrilly refuse de détailler ce qu’il a déjà écrit dans sa monographie et dont il ne veut reprendre que les principales analyses, notamment sur le rôle joué par Langey face à Charles-Quint et sa « manière douce » en Piémont. Il termine par Martin cette histoire très documentée et précise, n’hésitant pas à soumettre des incertitudes et des hypothèses, à laisser des questions sans réponse, ce qui contraste avec les affirmations définitives de ses prédécesseurs.

Les quarante pages qui lui sont consacrées s’appuient non seulement sur les éléments donnés par les Mémoires mais de nombreuses autres sources (lettres, archives, travaux d’autres historiens etc.), sont aussi sollicitées. Jamais le « cas » Martin n’avait été à ce point étudié pour lui-même. Le détail de son parcours s’achève sur sa descendance et les traces laissées par ses deux filles, Marie (son mariage avec le baron de La Lande, éditeur des Mémoires) et Catherine, à la cour de Jeanne d’Albret.

La deuxième partie de cette Introduction s’intéresse à l’histoire du texte, résume le travail de Guillaume en latin et en français, les ébauches préparatoires, les parties rédigées, la perte de certains papiers, les fragments restants, les velléités de continuation par Jean, la charge qui en incombait à Martin. À celui-ci, d’emblée, sont refusés le titre d’écrivain et la capacité à atteindre le « beau style79 », mais Bourrilly reconnaît la valeur de son travail et de sa démarche. Il en retrace les différentes étapes depuis 1555, ses premières publications de l’Epitomé, le manque d’information sur les avancées successives de ses propres livres, l’analyse de sa part personnelle dans l’œuvre80.

Partant du principe que seuls les livres IX et X sont entièrement « comme fond et comme forme81 » de sa main, l’auteur se fonde sur eux pour « caractériser l’œuvre de Martin et en apprécier la valeur ». Selon lui, Martin a privilégié les événements auxquels il a participé ou dont il a été le témoin : « le reste a été sacrifié, sinon tout à fait passé sous silence, sans souci de la proportion, ni même de la vérité ». C’est là pour Bourrilly qui réside la grande différente entre le travail des deux frères, résumée en une formule : « Guillaume du Bellay avait entrepris de composer une histoire ; Martin, lui, se borne vraiment à écrire ses mémoires82 ».

Il manque à Martin l’analyse et la forme du discours, mais on lui reconnaît néanmoins plus d’impartialité, « il ne tombe pas dans l’apologie, comme trop souvent Guillaume ». Si les termes sont plus élogieux à l’égard de Langey, on sent chez Bourrilly la volonté néanmoins de rendre justice à la personnalité historique et au travail de Martin qui n’avait pas bénéficié jusque-là, à la différence de son frère, des recherches et des publications de l’historien. La suite du texte raconte la redécouverte et la publication des Mémoires par René, les imperfections de l’édition Princeps, le succès et les rééditions corrigées jusqu’à la fin du XVIe siècle, avant de conclure :

Des éditions publiées ultérieurement et qui, plus ou moins correctement, reproduisent les deux premières, une seule doit être mentionnée, c’est celle que, vers le milieu du xviiie siècle, procura l’abbé Lambert. Il eut la bonne idée de joindre aux Mémoires de du Bellay, en guise d’éclaircissement, ceux de Fleuranges, le Journal de Louise de Savoie et de nombreuses pièces justificatives ; mais il crut devoir, le malheureux, les mettre « en nouveau style » ! C’est-à-dire que le texte en fut défiguré. L’exemple de l’abbé Lambert ne fut heureusement pas suivi. Les Mémoires ne furent plus réimprimés que dans des collections ; on revint au texte des éditions du xvie siècle ; mais, approximativement, et pour n’être plus « « nouveau », le style était loin de présenter toute garantie83.

Bourrilly indique qu’il a utilisé l’édition de 1569, la jugeant « plus fidèle à l’esprit de Martin du Bellay », mais en la corrigeant à l’aide de celle de 1570 et, ce qui est nouveau, des deux manuscrits, celui des ébauches de Guillaume et le ms. 3733 conservé à la Bibliothèque de l’Arsenal. Ce dernier porte la trace de deux écritures différentes (Martin et René ?), ce qui a incité Bourrilly à préférer le texte de l’édition qu’il juge plus authentique car, dit-il, « les Mémoires des du Bellay n’ont qu’une valeur historique ». Il s’est donc mis au service de cette valeur historique première « par des renvois aux documents originaux, par la comparaison avec d’autres récits contemporains, par l’identification des noms de personnes et de lieux84 ». C’est là la réalité et l’intention de son travail, créer un outil, « rendre aisément utilisable par les historiens une des sources narratives les plus importantes [..], la seule qui intéresse en sa totalité le règne de François 1er »85.

Voilà l’ambition de cette édition qui nous est précieuse, la première depuis le XVIe siècle à être dévolue aux seuls écrits de Martin et Guillaume Du Bellay, et la première à adopter une démarche qui se voulait scientifique. Malheureusement, comme le souligne Lionel Piettre, V. L. Bourrilly en digne héritier du positivisme ne parvient pas à se détacher de sa propre conception de l’histoire, « celle de l’histoire entendue comme discipline historique, telle qu’elle s’est constituée à la fin du xixe siècle86 », et à l’aune de laquelle il juge le travail des Du Bellay. On peut contester ce qu’il affirme de manière réductrice à la fin de son introduction : « Les Mémoires des du Bellay n’ont qu’une valeur historique87 » …

Il faut dire un mot, pour conclure, de la tentative de publication la plus récente des Mémoires des frères Du Bellay, celle des Éditions clermontoises Paléo88 qui, entre 2002 et 2014, leur a consacré cinq volumes dans leur collection « Sources de l’Histoire de France ». Cette collection entend livrer tel quel, avec un appareil de notes réduit au strict minimum, le texte intégral et original des « sources majeures de notre Histoire ». Cette publication, intitulée Mémoires du règne de François 1er, sans référence au terme de Mémoires ni au nom ostensible des frères Du Bellay, a opéré un découpage des Livres par date, soulignant une unité thématique et/ou historique que traduisent les différents titres donnés : tome I (1513-1524) « De Marignan à Pavie » ; tome ii (1524-1535) « La politique universelle de Charles Quint » ; tome iii (1536) « La diplomatie de Paul iii » ; tome IV (1536-1540) « La Guerre de Provence » ; tome V (1540-1546) « Dernier voyage du Roy ». Les deux premiers sont attribués à Martin seul, les trois derniers portent le nom associé des deux frères. Dans une langue modernisée, cette publication a pour ambition de confronter directement le lecteur au texte brut, de le lui rendre accessible matériellement et typographiquement. Après cinq siècles de diffusion, le texte retrouvait ainsi sa relative nudité initiale, celle de 1569 où la parole revenait à la seule famille, Guillaume, Martin, René.

La tendance actuelle tendrait à libérer les écrits historiques de Langey de toutes les gangues dans lesquelles ils ont été jusque-là enserrés. Ni textes liminaires, ni écrits fraternels, rien qui ne soit sorti de la plume de l’aîné. Dissocier radicalement l’œuvre de Guillaume de celle de Martin comme le suggérait Nathalie Guillot89 et comme l’a entrepris Lionel Piettre en rapprochant plutôt le cadet de Blaise de Montluc90. « Réexaminer […] l’œuvre de Langey comme historien »91 ainsi que Richard Cooper nous y invitait déjà en 1997, sans se limiter à l’aspect historiographique. Réunir dans une nouvelle édition tous les fragments latins et français des Ogdoades, rédigés ou à l’état d’ébauche92, auxquels on intègrerait le manuscrit de la Bibliothèque vaticane93, mais aussi tous les textes polémiques et surtout la correspondance…Un véritable chantier qui nécessiterait « un travail collectif associant des compétences historiques, paléographiques et littéraires94 » est peut-être en train de s’ouvrir…

Bibliographie

Œuvres de Guillaume Du Bellay

Fragments de la première Ogdoade latine de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey, publiés avec une introduction et des notes par Victor-Louis Bourrilly, Paris, Société Nouvelle de Librairie et d’Édition, 1905.

Epitome de l’antiquité des Gaules et de France, par Feu Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey, Chevalier de l’Ordre du Roy & son Lieutenant général en Piedmont. Avec ce, un prologue ou preface sus toute son histoire, et le catalogue des livres alleguez en ses livres de l’antiquité des Gaules et de France. Plus sont ajoutées une Oraison, & deux Espitres, faictes en latin par ledit Autheur, et par luy mesmes traduistes du latin en Françoys. Paris, Vincent Sertenas, 1556.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6479020n.texteImage

Les Memoires de Messire Martin du Bellay, Seigneur de Langey. Contenant le discours de plusieurs choses advenues au Royaume de France, depuis l’an M. D. XIII. jusques au trespas du Roy François premier, ausquels l’Autheur a inseré trois livres, & quelques fragmens des Ogdoades de Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey son frere. Œuvre mis nouvellement en lumiere, et presenté au Roy par Messire René du Bellay, Chevalier de l’Ordre de sa Majesté, Baron de la Lande, heritier d’iceluy Messire Martin du Bellay. Paris, A l'Olivier de P. L' Huillier rue S. Jacques, 1569.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86246509/f11.item

Mémoires de Martin et Guillaume du Bellai-Langei mis en un nouveau style : auxquels on a joint les Mémoires du Maréchal de Fleuranges qui n’avoient point encore été publiés et le journal de Louise de Savoie. Le tout accompagné de notes critiques & historiques, & de pièces justificatives pour servir à l’histoire du règne de François 1er, par M. l’Abbé Lambert, Paris, Nyon, 1753.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1042913m/f15.item

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1042915f.image

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10429178.image

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10429193.image

Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay seigneurs de Langey, dans la Collection universelle des mémoires particuliers, relatifs à l’Histoire de France, tomes XVII-XVIII-IX-XX-XXI. Londres, Paris, 1786.

Les Mémoires de Messire Martin Du Bellay, contenant le discours de plusieurs choses advenues au Royaume de France, depuis l’an 1513, jusques au trépas du Roy François I ; auxquels l’autheur a inséré trois livres, et quelques fragmens des Ogdoades de Messire Guillaume Du Bellay, seigneur de Langey son frere. Œuvre mis en lumiere et présenté au Roy, par Messire Rene Du Bellay, chevalier de l’Ordre de Sa Majesté, baron de La Lande, héritier d’iceluy messire Martin Du Bellay, dans la Collection complète des mémoires relatifs à l’Histoire de France, par M. Claude-Bernard Petitot, (traduction de Charles Du Fresne Du Cange), Paris, Foucault, 1821-1824 (Première série, 52 volumes ; Deuxième série, 77 volumes et une Table Générale). URL : https://fr.wikisource.org/wiki/Collection_compl%C3%A8te_des_m%C3%A9moires_relatifs_%C3%A0_l%E2%80%99histoire_de_France

Mémoires de Martin et Guillaume Du Bellay, par V.-L. Bourrilly et F. Vindry, Paris, Société de l’Histoire de France, t. I 1908, t. II 1910, t. III 1912, t. IV 1919.

Martin et Guillaume Du Bellay, Mémoires du règne de François 1er, t. I à V, Clermont-Ferrand, Paleo, 2002-2014.

Études

Bourrilly, Victor-Louis, Guillaume Du Bellay, Seigneur de Langey, 1491-1543, Paris, Société nouvelle de librairie et d’édition, 1905.

https://archive.org/details/guillaumedubella00bour/page/12/mode/1up

Bourrilly, Victor-Louis, « Rabelais et la mort de Guillaume du Bellay », RER, 2 (1904), p. 51-54. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k19478c/f73.item

Cooper Richard, Rabelais et l’Italie, Genève, Droz, Études Rabelaisiennes, XXIV, 1991. (843.3 RAB ETU 24) ; et Litteræ in tempore belli, Études sur les relations littéraires italo-françaises pendant les guerres d’Italie, Genève, Droz, Travaux d’Humanisme et Renaissance, CCCVIII, 1997. (809.03 COO).

Guillod Nathalie, « Jean Du Bellay, la tentation de l’histoire », dans Le cardinal Jean Du Bellay. Diplomatie et culture dans l’Europe de la Renaissance, Cédric Michon et Loris Petris (dir.), Presses Universitaires de Rennes, 2013, p. 167-180.

Guillois Antoine, Pendant la terreur. Le poète Roucher, 1745-1794, Paris, Calmann Levy, 1890. https://archive.org/details/pendantleterreur00guil

Haureau Barthélémy, Notices et Extraits des manuscrits de la Bibliothèque nationale, « La première Ogdoade de Guillaume Du Bellay », Bibliothèque de l’École des Chartes, 1890, t. XXIII, 2eme partie, p. 195-243.

Piettre Lionel, Se mêler d’histoire : Conseils et jugements de l’action politique dans l’histoire-jugement, chez Guillaume du Bellay, Martin du Bellay, Monluc et Montaigne. Littératures. Université Grenoble Alpes, 2017. Français. NNt : 2017GREAL033. tel-01835257 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01835257

La Charité Claude, « Rabelais et l’humanisme militaire dans Gargantua », Op. cit., Revue des littératures et des arts, [En ligne], « Agrégation Lettres 2018 », n°17, automne 2017, mis à jour le 14/11/2017, URL : https://revues.univ-pau.fr/opcit/261

Scheurer Rémy, Correspondance du Cardinal Jean Du Bellay, Paris, Klincksieck, t.3, 2008.

Note de fin

1 Victor-Louis Bourrilly, Guillaume Du Bellay, Seigneur de Langey, 1491-1543, Paris, Société nouvelle de librairie et d’édition, 1905.

2 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire : Conseils et jugements de l’action politique dans l’histoire-jugement, chez Guillaume du Bellay, Martin du Bellay, Monluc et Montaigne. Littératures. Université Grenoble Alpes, 2017. Français. NNT : 2017GREAL033. tel-01835257 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01835257

3 Victor-Louis Bourrilly, Guillaume Du Bellay, p. 381.

4 Lionel Piettre y voit la recherche « sans l’écriture sur l’Histoire le moyen de saisir par le jugement une réalité politique qui échappe parfois à son action », Se mêler d’histoire, p. 210. Sa thèse étudie précisément la « conception langéenne de l’historiographie et sa pratique de l’écriture historique », et développe le principe de « l’histoire-jugement » ; on s’y reportera avec profit.

5 Epitome de l’antiquité des Gaules et de France, par Feu Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey, Chevalier de l’Ordre du Roy & son Lieutenant général en Piedmont. Avec ce, un prologue ou preface sus toute son histoire, et le catalogue des livres alleguez en ses livres de l’antiquité des Gaules et de France. Plus sont ajoutées une Oraison, & deux Espitres, faictes en latin par ledit Autheur, et par luy mesmes traduistes du latin en Françoys. Paris, Vincent Sertenas, 1556. Ce Prologue est publié par son frère Martin.

6 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit.,p. 312.

7 « Cette idée, qui n’a rien de nouveau depuis Aristote, mais que les res gestae du Moyen Âge, le merveilleux des légendes et le miraculeux des hagiographies, avaient reléguée au second plan, est réaffirmée avec force à la Renaissance, à un moment où l’histoire accède lentement à un statut scientifique et acquiert ses lettres de noblesse et son autonomie face aux enseignements traditionnels […] dont elle ne constitue longtemps qu’un sous-genre », Nathalie Guillod, « Jean Du Bellay, la tentation de l’histoire », dans Le cardinal Jean Du Bellay. Diplomatie et culture dans l’Europe de la Renaissance, Cédric Michon et Loris Petris (dir.), Presses Universitaires de Rennes, 2013, p. 170.

8 Chez Jacques Colin en 1527 pour Thucydide, 1529 pour Xénophon, 1530 pour Diodore de Sicile.

9 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit., p. 251 et suivantes.

10 « Celuy est le tiltre que j’ay imposé aux Tomes, ou particuliers nombres des livres de mes memoires », Epitomé, 1556, « Prologue ».

11 BnF, ms 5976, ff.25-26 ; ms 6205, ff. 4-51 ; ms 9793 (55 ff. in 4°) ; ms 46 des Mélanges Colbert ff. 650 721. Rien n’indique si ces manuscrits sont des copies ou des autographes. Victor-Louis Bourrilly en fait le détail dans son édition des Ogdoades : Fragments de la Première Ogdoade de Guillaume Du Bellay, seigneur de Langey, Paris, Société Nouvelle de Librairie et d’Édition, 1905, p. I à III de l’introduction. Il s’appuie sur le travail antérieur de Barthélémy Haureau, Notices et Extraits des manuscrits de la Bibliothèque nationale, Bibliothèque de l’École des Chartes, 1890, t. XXIII, 2eme partie, p. 195-243.

12 Voir Les Illustrations de Gaule et singularitez de Troyes, 1509.

13 Richard Cooper, Litteræ in tempore belli, Études sur les relations littéraires italo-françaises pendant les guerres d’Italie, Genève, Droz, Travaux d’Humanisme et Renaissance, CCCVIII, 1997, p. 28.

14 Ibid.

15 Pour une analyse de ces manuscrits latins, on se réfèrera aux travaux de Lionel Piettre : « Au-delà de leur très réelle portée propagandiste, les premiers brouillons latins des Ogdoades ont donc une valeur morale et politique que leur auteur construit par des réflexions de portée générale », Se mêler d’histoire, op. cit., p. 393-396.

16 Scheurer Rémy, Correspondance du Cardinal Jean Du Bellay, Paris, Klincksieck, t.3, 2008, p. 121. (Cité par V. L. Bourrilly p. 382).

17 Ibid., p. 153.

18 « J’ay laissé ce porteur pour me apporter le gect que le Roy m’a dict avoir faict des choses passées de son règne, qu’il me vouloit bailler, aussi pour vous soubzvenir de dire à MM. Bayart et Bouchetel qu’ilz facent apporter à Bloys les despèches qu’ilz ont receues et faictes » (BnF, Ms 3079, f.105) cité par V.-L. Bourrilly p. 381.

19 Pour l’utilisation des sources et des discours par Langey voir Lionel Piettre, Se mesler d’histoire, op. cit. p. 412.

20 Comme en témoigne une lettre du cardinal : « estant l’an passé feu mon frere […] et ayant retiré de moy, comme il avoyt cherché à faire de tous aultres, les harangues ou deductions d’affaires par moy proposées ès voyaiges passez afin de les insérer au vray en l’histoire qu’il tissoyt » (Scheurer Rémy, Correspondance du Cardinal Jean Du Bellay, Paris, Klincksieck, t.3, 2008, p. 232) cité par V.-L. Bourrilly p. 385.

21 BnF, orig. autog., Dupuy 33, fos 52-64, ce texte est donné en intégralité par Nathalie Guillod dans Le cardinal Jean Du Bellay. Diplomatie et culture dans l’Europe de la Renaissance, annexe 2, op. cit., p. 308-314.

22 Voir V.-L. Bourrilly, Guillaume Du Bellay, p. 382. Pour une analyse détaillée de ce Prologue, voir Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, p. 303 et suivantes.

23 « Qui du seigneur de Langey sa Cronique/ Verra, sçaura qu’il [François 1er] a eu la pratique/ De gouverner, soit en paix, soit en guerre,/ Tout son royaulme ou myeux toute la terre… »

24 « Finalement le sieur de Langey voyant qu’on ne vouloit executer ce dont il avoit tant travaillé, & fait de si gros frais, tant à l’entretenement des hommes que pour la fourniture de ce qui y estoit necessaire, considera bien que le pareil luy seroit fait en autres choses à ces causes, pour la debilité de ses membres (car il estoit perclus à cause des longs travaux) avecques le congé du Roy, partit de Turin en une littiere, pour venir devers luy, auquel il desiroit avant que de mourir declarer beaucoup de choses pour son service, qu’il ne vouloit mettre en la bouche d’autruy, craignant de faire tort à ceux qui en luy s’estoient fiez, mais il ne luy fut possible d’y parvenir : car le neufièsme jour de Janvier mil cinq cens quarante deux, il trespassa à S. Saphorin sur le mont de Tarare, au grand regret de plusieurs gens de bien, de sçavoir & d’experience. », Mémoires de Martin du Bellay, Livre IX, p. 94. (Les citations des Mémoires se font dans l’édition de V.-L. Bourrilly et F. Vindry, Mémoires de Martin et Guillaume Du Bellay, Paris, Société de l’Histoire de France, t. I 1908, t. II 1910, t. III 1912, t. IV 1919.)

25 Scheurer Rémy, Correspondance du Cardinal Jean Du Bellay, t.3, p. 201-202. (Lettre du 1er février 1543). »

26 Epitomé de l’antiquité des Gaules et de France, par Feu Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey, Chevalier de l’Ordre du Roy & son Lieutenant général en Piedmont, Paris, Vincent Sertenas, 1556 (« Au lecteur », p. 2).

27 V.L. Bourrilly, Guillaume Du Bellay, op. cit., p. 366-367.

28 Lionel Piettre parle d’une « œuvre à plusieurs mains mais dont Langey reste le maître d’œuvre », Se mêler d’histoire, op. cit., p. 231.

29 Des Stratagemata (Lyon, Sébastien Gryphe, 1539 puis 1542), il ne reste aujourd’hui qu’une notice d’Antoine Du Verdier dans sa Bibliothèque de 1584 et le témoignage, en 1949, de Charles Perrat qui en aurait feuilleté un exemplaire chez un bouquiniste parisien (« C’était un recueil de documents diplomatiques, présentés dans l’ordre chronologique, reliés entre eux par une narration suivie et destinés à justifier la politique de Langey en Italie, en Allemagne et en Suisse »). Lire à ce sujet : Claude La Charité, « Rabelais et l’humanisme militaire dans Gargantua », Op. cit., Revue des littératures et des arts, p 5-6, [En ligne], « Agrégation Lettres 2018 », n°17, automne 2017, mis à jour le 14/11/2017, URL : https://revues.univ-pau.fr/opcit/261

30 Richard Cooper, Litteræ in tempore belli, op. cit., p. 11-12.

31 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit., p. 232-234.

32 Ibid., p. 225.

33 Voir les portraits comparatifs qu’en fait V.-L. Bourrilly, Guillaume Du Bellay, op. cit., p. 403.

34 Scheurer Rémy, Correspondance du Cardinal Jean Du Bellay, t.3, op ; cit , p. 232- 233.

35 Jean Du Bellay abandonna également le projet d’écrire ses propres Mémoires : « dès le temps du feu Roy ma vraye resolution estoyt, comme sçayt le Roy, de me retirer a mes estudes, estant après si long service temps de penser a quelque aultre chose. […] Et, si je puys une foiz avoir acquis ce paradis terrestre, d’une chose me tiendz-je seur, c’est que je ne seray ennuyelx a personne ; d’une aultre ceulx qui sont maistres du mestier m’asseurent, je ne sçay si c’est par flatterie ou aultrement, c’est que si je me veulx applicquer a laisser par escript la memoyre de mes maistres, seigneurs et amys, elle sera bien receue et pour durer bien longtemps. Et, puysque je veoy ceste opinion, comme dict est, en ceulx qui se y cognoissent, voyla en quoy je vouldroye passer le demourant de mes jours. Je vous ay, ce jour donné au Sainct-Esperit, faict ma confession par escript », Correspondance, t. 5, p. 239-240. Voir à ce sujet l’article de Nathalie Guillod, « Jean Du Bellay, la tentation de l’histoire », dans Le cardinal Jean Du Bellay. Diplomatie et culture dans l’Europe de la Renaissance, op. cit., p. 167-180.

36 V.-L. Bourrilly, Guillaume Du Bellay, op. cit, p. 291.

37 Ibid. p. 361.

38 Mémoires, t. 1, « Préface de l’Autheur », op. cit., p. 9.

39 Epitome de l’antiquité des Gaules et de France, par Feu Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey, Chevalier de l’Ordre du Roy & son Lieutenant général en Piedmont. Avec ce, un prologue ou preface sus toute son histoire, et le catalogue des livres alleguez en ses livres de l’antiquité des Gaules et de France. Plus sont ajoutées une Oraison, & deux Espitres, faictes en latin par ledit Autheur, et par luy mesmes traduistes du latin en Françoys. Paris, Vincent Sertenas, 1556. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6479020n.texteImage . « Au lecteur », comprenant : Prologue de l’auteur, un Catalogue des autheurs alleguez es huit livres de l’antiquité des Gaules, & France, les « epitomes ou abreges » proprement dits de quatre livres des Antiquités des Gaules & de France contre les huit annoncés dans le catalogue, d’une Translation d’une oraison, faite en la faveur du roy Jan de Hongrie, de la guerre contre le Turc, une Translation d’une lettre escrite a un allemant, sur les querelles et differens d’entre Charles cinqiesme Empereur, & le treschrestien Roy de France, Françoys premier de ce nom, enfin, une Translation des lettres escrites par le treschrestien Roy de France, Francois premier de ce nom aux Princes, villes & autres estatz d’Allemaigne responsives aux calumnies semées par ses malveillans contre l’honneur de sa maiesté.

40 Pour une analyse de fond de cet Epitomé, voir Lionel Piettre : « Langey attribue les grands bouleversements de l’histoire à des facteurs humains, aux intentions ou « causes finales » des princes dont le jeu introduit progressivement l’instabilité dans les nations les plus prospères », Se mêler d’histoire, op. cit., p. 396.

41 Ibid., p. 276-277.

42 Dans le Prologue, Guillaume Du Bellay l’évoquait en ces termes : « en laquelle Ogdoade j’ay recueilly et compris en huit livres, premierement l’antiquité des Gaulois & Françoys […]. »

43 Voir Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit.,p. 236 et suivantes.

44 V.L. Bourrilly, Guillaume du Bellay, op. cit., p. 250. Ce sont essentiellement des lettres, certaines publiées en recueil par Robert Estienne, et qui furent largement distribuées, traduites et colportées jusqu’en Suisse et en Allemagne à des fins de propagande.

45 « Projet d’histoire des années 1531, 1532, 1533, par Guillaume du Bellay, seigneur de Langey. » Archives du Ministère des Affaires étrangères, Mémoires et Documents, France, vol. 752, f. 279-348. Cité par Bourrilly, Guillaume Du Bellay, p. 384.

46 Les Memoires de Messire Martin du Bellay, Seigneur de Langey. Contenant le discours de plusieurs choses advenues au Royaume de France, depuis l’an M. D. XIII. jusques au trespas du Roy François premier, ausquels l’Autheur a inseré trois livres, & quelques fragmens des Ogdoades de Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey son frere. Œuvre mis nouvellement en lumiere, et presenté au Roy par Messire René du Bellay, Chevalier de l’Ordre de sa Majesté, Baron de la Lande, heritier d’iceluy Messire Martin du Bellay. Paris, A l'Olivier de P. L' Huillier rue S. Jacques, 1569. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86246509/f11.item

47 Nathalie Guillod conteste ce terme de « Mémoires » : « Le titre de Mémoires, sous lequel sont rassemblés les écrits de Guillaume aujourd’hui, ne rend pas justice à son travail et peut prêter à confusion. En effet, si l’on s’en tient à la définition que donnent les spécialistes du genre, les critères qui permettent de circonscrire le genre des mémoires les distinguent en partie des écrits historiques : un destinataire ou un commanditaire généralement identifié, une démarche de justification souvent née d’une injustice ou d’un affront, la revendication d’une certaine désinvolture dans la forme comme dans le fonds, une représentation consciente du moi – la première personne étant généralement utilisée-, qui se prolonge dans une vision manifestement subjective, mâtinée de considérations morales, de notes personnelles, de jugements. Chez Langey, la démarche, la forme et les objectifs sont autres ; la filiation avec Tite-Live, revendiquée en particulier dans le choix du titre, implique une posture manifeste d’historien. » voir « Jean Du Bellay, la tentation de l’histoire », p. 170. La question du genre littéraire est au cœur des analyses de Lionel Piettre qui revendique le terme de Mémoires mais en lui adjoignant la notion de « subjectivité étendue » (Se mêler d’histoire, p. 423 et suivantes).

48 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit., p. 239-241.

49 Michel de Montaigne, Les Essais, II, X. (Quelques années plus tôt, René Du Bellay affirmait exactement le contraire dans son texte liminaire de l’édition de 1569 : « Feu monsieur de Langey s’est bien gardé de tomber en ce peché car comme il ne cele les actes louäbles d’aucuns soyent des nostres ou des estrangers : aussi il ne s’espargne à remarquer leurs fautes […] (n.p.)).

50 Mémoires de Martin et Guillaume du Bellai-Langei mis en un nouveau style : auxquels on a joint les Mémoires du Maréchal de Fleuranges qui n’avoient point encore été publiés et le journal de Louise de Savoie. Le tout accompagné de notes critiques & historiques, & de pièces justificatives pour servir à l’histoire du règne de François 1er, par M. l’Abbé Lambert, Paris, Nyon, 1753.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1042913m/f15.item

51 V.-L. Bourrilly, Guillaume Du Bellay, p. 399 : « Malheureusement [l’Abbé Lambert] ne se contenta pas de réimprimer, à la suite, des pièces justificatives tirées des manuscrits et de les accompagner des Mémoires de Fleuranges et du Journal de Louise de Savoie ; il crut bon de les mettre « en nouveau style ». Sous prétexte de l’embellir, il défigura un texte qui n’était déjà que trop défectueux dans l’édition princeps ».

52 René Louis de Voyer de Paulmy, marquis d’Argenson, secrétaire d’État des Affaires étrangères de Louis XV, diplomate donc comme les Du Bellay avant lui, et auteur lui-même de Mémoires.

53 Les éditeurs de 1786 relèveront cette erreur : René n’est pas l’auteur des Mémoires.

54 Collection universelle des mémoires particuliers, relatifs à l’Histoire de France. Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay seigneurs de Langey. Tomes xvii-xviii, contenant les Mémoires de Mess. Martin Du Bellay. Tomes ix-xx-xxi. Londres, Paris, 1786.

55 Le poète Jean-Antoine Roucher attendant son transfert de la prison de Sainte-Pélagie à la prison de Saint-Lazare quelques jours avant son exécution, Hubert Robert, 1794.

56 Antoine Guillois, Pendant la terreur. Le poète Roucher, 1745-1794, Paris, Calmann Levy, 1890, p. 103.

57 T. 1-2 : Jean, sire de Joinville, Histoire de Saint Louis. Dissertations sur l’histoire de Saint Louis / Charles Du Fresne, seigneur Du Cange. T. 3 : Manuscrits arabes relatifs au règne de Saint Louis ; Du Cange, Dissertations (suite). T. 3 (suite)-5 : Vie de Du Guesclin / trad. Jacques Lefevre, prévôt d’Arras. T. 5 (suite) : Christine de Pisan, Mémoires sur la vie de Charles V ; Pierre de Fenin, Mémoires, recueillis par Gérard de Tieulaine. T. 6 : Mémoires de Boucicaut. T. 7 : Mémoires de la Pucelle / Denys Godefroy ; Guillaume Gruel ; Chronique d’Arthur de Richemont / Théodore Godefroy ; Florent d’Illiers, Mémoires / réd. par D. Godefroy. T. 8-9 : Mémoires d’Olivier de La Marche. T. 9 (suite) Mémoires de Jacques Du Clerc, seigneur de Beauvoir-en-Ternois. T.  0-12 : Mémoires de Philippe de Commynes / éd. et préfacé par Lenglet Du Fresnoy, tableau généalogique dépliant. T. 13 : Chroniques de Jean de Troye. T. 14 : Guillaume de Villeneuve, Mémoires sur l’expédition de Naples ; Jean Bouchet, Mémoires de Louis II, seigneur de La Trémoille. T. 14 (suite)-15 : Jacques de Mailles, Mémoires de Bayard. T. 16 : Mémoires de Robert de La Marck, seigneur de Fleuranges ; de Louise de Savoie [mère de François Ier]. T. 17-21 : Mémoires de Guillaume et Martin Du Bellay, seigneur de Langey. T. 22-26 : Mémoires de Blaise de Montluc. T. 26 (suite)-28 : Mémoires de Gaspard de Saulx, seigneur de Tavannes. T. 28 (suite)-33 : Vincent Carloix, Mémoires de François de Scepeaux, sire de Vieilleville. T. 33 (suite)-37 : Mémoires de François de Boivin Du Villars. T. 37 (suite)-39 : Mémoires de François de Rabutin. T. 39 (suite)-40 : Mémoires de Bertrand de Salignac T. 40 (suite) Mémoires de l’amiral Gaspard de Coligni ; de Claude de La Châtre ; de Guillaume de Rochechouart, seigneur de Jars. T. 41 : Mémoires de Jean de Mergey. T. 41 (suite)-46 : Mémoires de Michel de Castelnau. T. 46 (suite) : Mémoires d’Achille Gamon, de Jean Philippi. T. 47 : Mémoires de François de La Noue. T. 47 (suite)-49 : Mémoires de Henri de La Tour d’Auvergne,duc de Bouillon. T. 49 (suite) : Mémoires de Guillaume de Saulx, seigneur de Tavannes. T. 50-52 : Mémoires de Philippe Hurault de Cheverny. T. 52 (suite) : Mémoires de Marguerite de Valois, reine de France. T. 53-54 : Mémoires de Jacques Auguste de Thou. T. 54 (suite) : Mémoires de Mathieu de Merle ; de Jean Choisnin. T. 55-60 : Mémoires de Pierre Victor Palma Cayet. (Histoire de la guerre sous le règne de Henri IV). T. 61 : Mémoires de Jacques Pape, seigneur de Saint-Auban en Dauphiné. T. 61 (suite)-62 : Mémoires de Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroi. T. 62 (suite) : Mémoires de Charles de Valois, duc d’Angoulême. T. 63 : Testament et codicilles de Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme – Dames illustres. T. 64-65 : suite – Dames galantes. T. 66 : suite de la collection universelle, Paris, 1806, dédiée à son altesse impériale le Prince Joachim – suite Brantôme. T. 67-68 : suite Brantôme. T. 69-70 : chronologie septennaire, dernier tome daté 1807. 2 volumes de tables datés 1790 et 1791.

58 Collection universelle des mémoires particuliers, relatifs à l’Histoire de France, « Notice des éditeurs sur la personne et les Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay, seigneurs de Langey », pages numérotées vii à xxviii.

59 Lionel Piettre analyse les artifices rhétoriques de Langey comme « une dimension explicative » intrinsèque à sa démarche d’historien, et affirme qu’ils « participent du jugement de l’action politique », Se mêler d’histoire, op. cit.,p. 208.

60 Il y a ici confusion : la « Préface de l’Autheur » est bien le texte de Martin Du Bellay. L’auteur de la Notice veut parler de l’erreur faite sur l’intitulé de « l’Epitre dédicatoire de l’auteur » rédigée par René qui effectivement n’est pas l’auteur des Mémoires.

61 On trouvait presque mot pour mot dans la Préface de l’Abbé Lambert que « [ces Mémoires sont] ce que nous avons de parfait, & de plus achevé en ce genre d’Ouvrage. Personne n’ignore qu’ils ont servi de guides à nos meilleurs historiens » ainsi que l’idée insistante que rien n’était superflu dans l’espace des quarante années relatées, tout y était « suivi », « lié », « intéressant ».

62 Collection complète des mémoires relatifs à l’Histoire de France, par M. Petitot, (traduction de Charles Du Fresne Du Cange), Paris, Foucault, 1821-1824 (Première série, 52 volumes ; Deuxième série, 77 volumes et une Table Générale), « Discours préliminaire ».

https://fr.wikisource.org/wiki/Collection_compl%C3%A8te_des_m%C3%A9moires_relatifs_%C3%A0_l%E2%80%99histoire_de_France

63 Distance qui est aussi une forme de condescendance assez courante au xixe siècle : « si [ces hommes] n’offrent pas la précision des écrivains de notre grand siècle, ils conservent et nous rappellent du moins l’aimable et franche naïveté de nos pères », « Discours Préliminaire ».

64 Ibid., « Discours préliminaire »

65 « A la mort de François I, les deux frères, éloignés de la cour, trouvèrent dans la culture des Lettres des consolations qui leur firent supporter la disgrâce. Le cardinal alla se fixer à Rome, où il jouissait de la plus grande considération, et Martin Du Bellay se retira dans son château de Glatigny, où, n’ayant pu recueillir qu’une faible partie des manuscrits de Langey [Petitot abonde dans la thèse du vol en 1543], il s’efforça de compléter les mémoires que ce dernier avait composé sur le règne de François I. »

66 Barthélémy Hauréau, Notices et Extraits de quelques manuscrits latins de la Bibliothèque nationale, Paris, Klincksieck, 1890, tome xxiii, 2e partie, p. 195-243.

67 Victor-Louis Bourrily, Guillaume Du Bellay, Seigneur de Langey, 1491-1543, Paris, Société nouvelle de librairie et d’édition, 1905.

https://archive.org/details/guillaumedubella00bour/page/12/mode/1up

68 Ibid., p. 376 à 400.

69 Fragments de la première Ogdoade latine de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey, publiés avec une introduction et des notes par Victor-Louis Bourrilly, Paris, Société Nouvelle de Librairie et d’Édition, 1905.

70 BnF, latin ms. 5976 ff. 25.66 ; ms. 6205 ff. 4-51 ; ms. 9793 (55ff.) ; ms 46 Mélanges Colbert ff. 650-721 / Arc. Min, ms. 5499. Bourrilly ne pouvait avoir connaissance du manuscrit latin de la Bibliothèque Vaticane découvert récemment.

71 Fragments de la première Ogdoade latine de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey, Introduction p. i à xviii.

72 Ibid., p. 1, « Liber Primus ».

73 Mémoires de Martin et Guillaume Du Bellay, par V.-L. Bourrilly et F. Vindry, Paris, Société de l’Histoire de France, t. i 1908, t. ii 1910, t. iii 1912, t. iv 1919.

74 Mémoires de Martin et Guillaume Du Bellay, t. iv, p. lxxix.

75 Ibid., t. i, p. 1-10.

76 Ibid., t. iv, p. 337-368.

77 « Introduction » p. iii.

78 Voir la note 4 p. iii de l’introduction qui cite différentes articles parus entre 1887 et 1907, dont il n’est pas le seul auteur.

79 « Il avait donc de la lecture, joutez de l’esprit naturel, une certaine verve […]. Tout cela donne de la valeur à son témoignage, mais ne suffisait pas à faire de lui un écrivain » Introduction, p. lvii.

80 « Mais dans ces livres tout est-il de Martin du Bellay ? Oui, à l’en croire. En fait, la part de Guillaume est plus considérable que Martin ne voudrait nous le persuader » Introduction, p. lix. Bourrilly analyse à travers des exemples précis tout ce que Martin a repris des plans et travaux préparatoires de son frère, surtout pour les quatre premiers livres.

81 Introduction, p. lxi.

82 Introduction, p. lxii.

83 Ibid., p. lxiv-lxv. En ce qui concerne les Collections, Bourrilly cite celles de Buchon, Petitot, Michaud et Poujoulat, mais jamais celle de Roucher.

84 Introduction, p. lxvii. Il y ajoute un « Index alphabétique ».

85 Ibid., p. lxviii.

86 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit., p. 208.

87 Introduction, p. lxvii.

88 Martin et Guillaume Du Bellay, Mémoires du règne de François 1er, t. i à v, Clermont-Ferrand, Paleo, 2002-2014.

89 « Il faut toutefois soigneusement distinguer ce qui est de la main de Martin de ce qui nous vient de Guillaume, sous peine de méjuger la démarche de ce dernier. Et il est peut-être regrettable que les deux productions soient aujourd’hui aussi étroitement fondues parce qu’elles sont de nature et de teneur fort différentes, ce à côté de quoi beaucoup de commentateurs et de lecteurs sont passés. », Nathalie Guillod, « Jean Du Bellay, la tentation de l’histoire », art. cit., p. 169-170.

90 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit., p. 467 et suivantes.

91 Richard Cooper, Litteræ in tempore belli, Études sur les relations littéraires italo-françaises pendant les guerres d’Italie, Genève, Droz, Travaux d’Humanisme et Renaissance, CCCVIII, 1997, p. 26 et 28.

92 Archives du Ministère des Affaires étrangères, Mémoires et Documents, France, vol. 752, f° 279-348.

93 BAV, Reg. Lat. 970, f° 96-127 v°

94 Lionel Piettre, Se mêler d’histoire, op. cit., p. 208.

Illustrations

  • Fragments de la première Ogdoade latine de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey,publiés avec une introduction et des notes par Victor-Louis Bourrilly, Paris, Société Nouvellede Librairie et d’Édition, 1905.

  • Les Memoires de Messire Martin du Bellay, Seigneur de Langey. Contenant le discours de plusieurs choses advenues au Royaume de France, depuis l’an M. D. XIII. jusques au trespasdu Roy François premier, ausquels l’Autheur a inseré trois livres, & quelques fragmens des Ogdoades de Messire Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey son frere. Œuvre mis nouvellement en lumiere, et presenté au Roy par Messire René du Bellay, Chevalier del’Ordre de sa Majesté, Baron de la Lande, heritier d’iceluy Messire Martin du Bellay. Paris, chez Mathieu Guillemot, 1588.

  • Mémoires de Martin et de Guillaume Du Bellay seigneurs de Langey, dans la Collection universelle des mémoires particuliers, relatifs à l’Histoire de France, tomes XVII-XVIII-XIX-XX-XXI, Londres, Paris, 1786.

Citer cet article

Référence électronique

Carine Roudière-Sébastien, « Transmission patrimoniale des écrits historiques de Guillaume Du Bellay », Line@editoriale [En ligne], 12 | 2020, mis en ligne le 07 février 2024, consulté le 24 avril 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/lineaeditoriale/1486

Auteur

Carine Roudière-Sébastien

Il Laboratorio (EA 4590) Université Toulouse Jean Jaurès

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