Une histoire d’émancipation féminine dans la Venise du 18e siècle : Fiorenza Ravagnin, mécène et collectionneuse

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Il Campiello – Études vénitiennes

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Fiorenza Ravagnin: une mécène oubliée

Tout au long du 18ème siècle, l’histoire de Venise fut riche de personnages féminins que l’on qualifie généralement de « mineurs » mais qui, à y regarder de plus près, acquirent une telle réputation uniquement parce qu’elles exercèrent leur talent sous l’aile protectrice de maris célèbres et puissants.

C’est le cas de Fiorenza Ravagnin. Comme d’autres femmes de culture de l’époque, cette aristocrate a connu un oubli posthume difficile à expliquer si on le compare aux éloges reçus tout au long de sa viei. Et pourtant, les témoignages évoquent une gente dame autonome, à l’aise dans le monde culturel vénitien du milieu du 18ème et qui sut tenir tête aux hommes auxquels elle eut affaire.

Ces témoignages nous permettent de comprendre non seulement le rôle de mécène de premier ordre, mais aussi de « souche » d’une descendance littéraire essentiellement féminineii.

Durant toute son existence qui accompagna presque tout le siècle des Lumières, Fiorenza Ravagnin fut témoin et participante active de l’ultime grande saison de la République Sérénissime caractérisée par une effervescence sociale, philosophique et artistique sans précédent. En même temps, sa vie est emblématique de la crise de ce patriciat vénitien qui,

malgré des difficultés financières réitérées, ne sut renoncer au status symbol du collectionnisme et de la promotion artistique.

C’est justement en s’appuyant sur cette activité que Fiorenza bâtit cette affirmation personnelle qui allait la porter, année après année, au sommet de la Sérénissime. Elle avait compris très jeune le pouvoir du mécénat en tant qu’instrument de sociabilité, de prestige et d’émancipation, et l’importance d’une riche bibliothèque comme centre d’attraction pour artistes et intellectuels.

A l’aide de documents divers publiés ou inédits, nous pouvons aujourd’hui parcourir étape par étape la progression de la promotion sociale et de l’émancipation personnelle de celle qui ne fut à l’origine qu’une des représentantes de la petite noblesse de province.

Les premières années

Fiorenza Ravagnin est née à Venise le 6 mai 1712 de Giulio Ravagnin di Girolamo, descendant d’une ancienne famille aristocrate de la Marche Trévisane, et de Maria Bonfadini di Giovanni. Noblesse aisée certes, mais associée très récemment aux patriciens de la capitale : le trisaïeul avait obtenu son inscription au livre d’or – c’est-à-dire l’accès au Maggior Consiglio pour lui-même et pour ses descendants masculins – en 1682 suite au versement au Trésor public de 100 000 ducatsiii.

On ne sait rien de l’enfance de Fiorenza à part ce que l’on peut extraire de documents plus tardifs : une éducation ordinaire pour une femme de petite noblesse, un esprit religieux sans bigoterie, qui ne l’empêcherait pas, très jeune, d’entrer en contact avec des représentants de la franc-maçonnerie ; marque révélatrice d’un esprit entreprenant, ambitieux, pragmatique et un flair précoce pour les affaires brillamment porté par une lignée qui en matière d’échanges et de relations haut placées avaient construit son ascension sociale.

La vie documentée de Fiorenza commence à 21 ans, au moment où elle convole en justes noces avec Giambattista Recanati : quarante-six ans, sénateur de la République et premier enfant d’une famille aisée elle aussi depuis peu, très peuiv.

Personnage érudit caractéristique du 18ème siècle, Recanati s’était distingué dans toutes les branches de l’éruditionv. Auteur d’une tragédie (Demodice) portée sur scène plusieurs fois avec succès, collaborateur du “Giornale de’ letterati d’Italia” qui était le point de référence culturel des Lumières italiennes, fin collectionneur de tableaux (il fut mécène et ami intime de Rosalba Carriera) et de manuscrits précieux recueillis au cours de divers séjours à l’étranger (parmi lesquels un à Paris en 1718). Recanati était au centre d’un réseau culturel comprenant la fine fleur de l’érudition et de l’archéologie italiennes et européennes : Zeno et Calogerà à Venise, Muratori à Modène, Poleni et Facciolati à Padoue, Maffei à Vérone, sans oublier Crozat, Montfaucon à Paris, Rolli en Angleterre, Nemeitz en Allemagnevi.

C’est justement pour se consacrer entièrement à l’érudition que Giambattista avait renoncé à ses droits d’ainesse et choisit les ordres mineurs. Mais ses projets de calme studieux disparurent soudainement en janvier 1733 quand la mort de l’aîné Philippe, qui n’avait pas d’héritier, et l’entrée en religion du troisième enfant de la famille, Antonio, l’obligea à prendre épouse pour assurer la descendance de la famille.

Le 23 septembre 1733, en l’église de San Giorgio Maggiore, Recanati conduisait donc à l’autel la jeune Fiorenza. De cette brève union ne naquirent pas de descendants. Mais au moins ce très bref mariage joua-t-il un certain rôle dans la formation spirituelle de la gente dame ? Certes, Recanati était plus âgé mais il était tout sauf rabougri, et sa santé fragile ne l’avait pas empêché de mener une vie sociale active, de voyager, de tisser un vaste commerce épistolaire. Il était lettré de niveau national et européen, persuadé qu’il fallait rajeunir la culture italienne en commençant par les forces vives du pays et que les femmes pouvaient contribuer à un tel renouveauvii.

Si c’est grâce à sa famille qu’elle avait appris l’importance des relations sociales et de l’accroissement du patrimoine financier, ce fut certainement grâce à cet homme que Fiorenza apprit l’autre leçon fondamentale de sa vie : qu’à travers la promotion artistique une femme pouvait se faire valoir à l’égal d’un homme, et transmettre aux futures générations un patrimoine culturel et spirituel précieux.

Mariage très bref, disions-nous, et peu détaillé mais riche d’échanges et de rencontres fructueuses. Les époux purent croiser et fréquenter, entre autres, Pietro Giannone, le célèbre libre-penseur anticlérical et proscrit napolitain désormais compté parmi les pères du libéralisme économique, alors soumis à un étroit espionnage, plusieurs fois menacé et finalement expulsé du Gouvernement Vénitienviii.

Fiorenza conserverait longtemps le souvenir de cette fréquentation, qui ne put se prolonger, étant donné que deux mois après la venue du proscrit bourbonien sur la lagune, le 17 novembre 1734, Giambattista s’éteignit brusquement. Il avait 47 ans et ne laissait aucun héritier derrière lui. Sur les Recanati pesait la menace de l’extinction.

Le premier veuvage : un apprentissage culturel

À compter du jour de la disparition de Recanati, Fiorenza se trouva réduite au rang de personnage secondaire. Elle payait pour la faute – nous savons aujourd’hui que ce n’était pas la sienne – de ne pas avoir assuré une descendance à son époux. À la lecture des dernières volontés de ce dernier, il fut clair aux yeux de tous que la vraie bénéficiaire, à défaut de ne pas avoir de descendant direct, était « Madame Laura Recanati Giustinian ma sœur bien aiméeix ».

À Fiorenza ne revenait que la formule exécutoire du legs de la précieuse collection de manuscrits anciens à la Bibliothèque Marcianax, ainsi que la moitié des rentrées d’argent restantes après extinction des dettes. Giambattista laissait par ailleurs à « Madame mon épouse » cette « Bibliothèque privée » (Libreria) rassemblée par tant de voyages et de recherches. Ce fut le legs le moins précieux mais sentimentalement le plus significatifxi.

À tous justes 22 ans, Fiorenza commençait donc un long veuvage qui devint son apprentissage social et culturel.

Une fois passée l’année de deuil traditionnel, et non sans décliner nombre de propositions pour de nouvelles noces, la « veuve Recanati » (c’est ainsi qu’elle signait désormais) se consacra à réorganiser sa vie. Femme active et pragmatique, elle se retrouva inopinément libre de gérer l’héritage matériel de la famille, et qui plus est, l’héritage culturel d’un mari illustre.

Et ce fut justement à partir de la bibliothèque de celui-ci qu’elle commença. Des correspondances et acquisitions libraires de Recanati furent confirmées et gérées personnellement ; des souscriptions et des abonnements s’en vinrent renouvelés.

Un intéressant document inédit nous révèle les moments saillants de ce long “apprentissage” social et commercial. Il s’agit de cinquante lettres que Fiorenza expédia entre 1735 et 1769 à l’imprimeur florentin Domenico Maria Manni : témoignage éclairant non seulement en ce qui concerne l’évolution de la carrière de mécène de Fiorenza Ravagnin, mais également sur sa personnalité et son émancipation sociale.

Descendant d’une importante famille d’imprimeurs, Domenico Maria Manni (1690-1788) fut imprimeur, archiviste, polygraphe, érudit et grammairienxii. En 1726, l’Académie de la Crusca avait confié à Manni la révision ainsi que la quatrième édition du célèbre Dictionnaire académique (1729-1738). L’imprimeur, déjà au centre d’un vaste réseau épistolaire avec la fine fleur de l’érudition italienne, était alors entré en contact avec Giambattista Recanati qui était devenu un fidèle client et référent commercial à Venisexiii.

A la disparition prématurée du patricien vénitien, la jeune veuve succéda à son mari en prolongeant sa correspondance avec Manni. Ce fut le début d’un échange qui allait durer plus de trente ans, que les documents du British Museum nous permettent de parcourir en détail.

Ce sont, pour la plupart, des billets de quelques lignes dictées à la hâte à quelque secrétaire, au bas desquels Fiorenza Ravagnin apposait sa signature. Ces billets nous révèlent un caractère féminin pour qui les livres devenaient avant tout des comptes rendus et des calculsxiv. Dans un monde traditionnellement masculin comme celui du commerce libraire, elle affrontait avec naturel des considérations sur des frais, des budgets, des envois en relation serrée avec l’imprimeur florentin.

Bien que caché sous la froide objectivité des calculs et derrière un rigoureux respect de l’étiquette, ces lettres mettent en lumière le caractère fort singulier de Fiorenza. Femme franche et concrète, très loin du cliché plaintif et capricieux qui était en vogue à l’époque, la gente dame nous dévoile ici une image originale de féminité du 18ème siècle et un profil psychologique tel qu’en lui-même, avec son esprit méthodique rationnel, digne d’une vraie illuministe, sa précision presque maniaque dans les comptes, ses scrupules continuels relatifs à sa propre image publique.

Les lettres constituent donc un témoignage rare et précieux de ce mécénat féminin vénitien qui précisément à cette époque, non seulement grâce à la gestion directe des patrimoines familiaux, mais aussi à travers la création de salons privés et de conversations, jetait les premières bases d’une émancipation socialexv.

La première lettre à Manni remonte au mois d’octobre 1735. Avec quelques jours d’avance sur la fin de la traditionnelle “année de veuvage”, Fiorenza reprit sa correspondance avec l’imprimeur florentin pour lui annoncer une décision drastique, probablement due au désarroi : se défaire des livres du marixvi.

Bien entendu, elle revint rapidement sur sa décision et elle opta pour une vente des meilleures pièces. A cette fin, l’imprimeur la mit en contact avec l’abbé Giovan Battista Casotti, bibliothécaire de la toute nouvelle Bibliothèque Roncioniana di Pratoxvii. A la disparition de ce dernier, survenue en 1737, la dame intensifia sa correspondance directe avec Manni, et redevint un fidèle acquéreur.

Durant ces premières années, les lettres de la jeune veuve montrent la volonté de compléter la bibliothèque du mari dans le but d’honorer sa mémoire. Fiorenza acquérait régulièrement tout ce qui pouvait sortir des presses de l’imprimeur florentin, justement parce que c’était lui le fournisseur officiel des Recanatixviii.

Entre la fin des années Trente et le début des années Quarante, toute référence à l’ancien mari disparait. Les lettres deviennent plus méthodiques et révèlent une stratégie nouvelle, essentiellement commerciale, fondée sur une claire délimitation des objectifs et ayant pour fin la création d’un rapport de confiance avec l’imprimeur.

Comme nous le disions, la correspondance révèle, entre les lignes, une femme d’affaire habile et bien au courant des stratégies commerciales. Il est intéressant de relever, par exemple, la circonspection avec laquelle Fiorenza conduisait ses affaires :

Cela me déplairait que trop de personnes en viennent à connaître nos intérêtsxix.

Le socle fondamental prouvant le rapport de confiance était, naturellement, la recherche d’associés. A partir de 1739, Fiorenza mit à contribution son vaste réseau de contacts héritée par son mari et partit à la recherche de souscripteurs pour les nouvelles éditions de Manni. Elle se proposa en outre comme agent commercial pour les recouvrements et les livraisons. Des noms prestigieux du mécénat deviennent alors fréquents dans la correspondance :

J’ai fait tout ce que j’ai pu pour trouver des souscripteurs pour le livre que vous m’avez conseillé, et j’ai réussi à contacter Monseigneur le Maréchal Scolemburgh [sic] et Monseigneur Giacomo da Riva. Vous me suggérerez la façon dont je dois m’organiser pour pouvoir vous transmettre l’argent nécessairexx.

J’espère que dans le courrier du jour vous avez reçu la nouvelle envoyée par Monseigneur Giacomo de cinq souscripteurs du Décaméron, pour lesquels je vous serai redevable du montant des cinq Originaux qui ont été imprimés sur papier gros format, comme je vous l’ai écrit.

Je vous ordonne d’ajouter Madame Rosalba Carriera, qui elle aussi le désire sur papier gros format, et vous assure que je ne manquerai pas de m’en occuperxxi.

Un amour invétéré de la précision et de la ponctualité, une peur constante de perdre la face en société sont les aspects saillants de cette correspondance. Encore une fois, ce sont de petites phrases révélatrices qui restituent la psychologie de l’épistolière : sa conscience de l’enjeu élevé de chaque échange ou lors du repérage de chaque nouvel associé possible, dans l’encaissement de tel ou tel paiement, dans le solde d’un débit.

Son carnet d’adresses augmenta rapidement. Tout en maintenant un rapport privilégié avec le cercle du premier mari, entre la fin des années Trente et le début des années Quarante, Fiorenza Ravagnin tira profit de son rôle d’agent de confiance de Manni pour tisser d’autres liens culturels surtout en Vénétie et en Toscane.

L’ascension et la consécration

Dans la première moitié des années Quarante, les billets de Fiorenza révèlent une nouvelle prise de conscience et, surtout, une ambition plus mature. De simple acquéreur et agent commercial, la jeune veuve décide en effet de se lancer dans des entreprises libraires de plus grande ampleur. Suivant ainsi une mode européenne qui s’était affirmée depuis désormais une vingtaine d’années, elle fit le choix de s’associer à des éditions de prestige.

En 1744, la « N.D. Fiorenza Ravagnini Recanati » (on notera l’italianisation du nom de jeune fille ainsi que l’élimination du titre de « veuve », devenu encombrant) apparaissait pour la première fois sur la longue liste des souscripteurs, presque tous des hommes, aux volumes des Poesie drammatiche d’Apostolo Zeno, le plus célèbre représentant de l’Illuminisme vénitienxxii. L’année suivante, sous la même signature, Fiorenza s’associait à la Gerusalemme liberata di Torquato Tasso dédiée « à sa majesté sacrée Marie Thérèse d’Autriche », véritable bijou typographique orné de splendides gravures de Piazzettaxxiii.

Dix ans après la disparition de Recanati, Fiorenza faisait ainsi son entrée dans la jet set de la Sérénissime, et commençait à faire parler d’elle non pas en vertu d’un nom d’épouse illustre, mais suite à une initiative totalement personnelle.

Au cours de la décennie suivante, cette même stratégie se poursuivit de plus belle. Une fois encore, en flairant dans la bonne direction, elle s’aperçut que l’élection d’un doge mécène et lettré de profession (à savoir Pietro Grimani, 1741-1752) et la concomitante conjoncture économique favorable revigoreraient la vogue des associations éditoriales.

Les documents datés de la période 1745-1755 témoignent de l’activisme, de la méticulosité, du grand soin apporté à cette stratégie et parallèlement de la popularité croissante de Fiorenza. Femme d’affaires avisée, même dans l’ardeur de l’enrichissement libraire, elle sut se montrer sélective et prudente dans le choix d’œuvres qualitativement impeccables certes, mais accessibles :

J’ai bien votre commentaire sur le Boccace mais il me manque un exemplaire du même auteur à savoir celui qui concerne ses Journées. S’il s’en trouvait un d’une bonne édition à moindre prix, je vous saurai gré de l’avoirxxiv.

L’accès direct aux organes officiels de la censure vénitienne lui était dès lors garanti :

J’ai reçu du Père Inquisiteur les tomes de votre ouvrage Sigilli destinés aux souscripteurs, mais vous ne m’indiquez pas (ou cela m’échappe) combien je dois recevoir pour le paiementxxv.

Au fil des années 1750, la correspondance avec Manni, tout en se raréfiant, confirme le prestige croissant de Fiorenza dans le monde éditorial vénitien. Comptes et recettes disparaissent, et de ses lettres à l’imprimeur – non plus des requêtes, mais de simples réponses – nous comprenons sa proximité accrue avec les hautes sphères de l’état. Désormais, de son approbation, de sa signature pouvait dépendre le succès d’une maison d’édition ou d’un auteur.

Le phrasé de Fiorenza s’en trouve apaisé, et elle rédige elle-même de sa propre main, dans un italien élégant et soigné. Enrichir sa bibliothèque privée se transforme en plaisir :

Je veux absolument enrichir ma Bibliothèque de tous vos célèbres ouvrages et je ne manquerai pas de le faire […] Je vous ferai savoir ceux que je n’ai pas encore pour pouvoir en faire l’achatxxvi.

Non plus agent commercial, mais mécène à titre officiel, Fiorenza Ravagnin pouvait finalement jouir des fruits de son ambition personnelle. Finis les pourparlers pour le compte d’un tiers, pleinement libre, elle faisait maintenant siens non seulement les livres mais aussi les auteurs et les imprimeurs qui, toujours plus nombreux, devenaient ses protégés.

À un tel niveau, les lettres de Fiorenza montrent un ultime paroxysme de ses compétences de mécène : non plus seulement l’habileté dans les relations publiques, mais aussi dans l’étude du target commercial, du caractère des acquéreurs, et dans le fait de suivre personnellement la réalisation d’un livre, de l’idéation au “projet graphique”, de la promotion à la vente. « J’ai reçu les deux frontispices de vos œuvres, […] et je m’emploierai à les proposer à quelques personnes de bon goût pour qu’ils l’acquièrent », écrivait-elle en septembre 1757, montrant ainsi une considération inédite pour la qualité des acquéreurs.xxvii

Fiorenza se montrait aussi consciente que le fait de trouver des associés et de garantir des paiements ne suffirait plus et qu’il fallait établir un lien direct avec ces derniers, afin de les informer de toute nouveauté ou modificationxxviii. Il faut souligner une fois encore le flair commercial grandissant de Fiorenza non seulement pour les achats, mais également sur le fait de se tenir au courant de la concurrence des autres mécènes et qu’il fallait donc ne pas être pris de vitessexxix.

Dans les années 1760, la sphère d’influence de la gente dame avait grandi au point que l’on recourrait à elle non seulement pour des projets éditoriaux, mais aussi en vue de nominations académiquesxxx. L’événement capital de sa vie ne pouvait pas être étranger à cela. En septembre 1750, à la limite de l’âge fertile, elle mettait fin à seize années de veuvage et célébrait son second mariage.

Mariage et patrimoine

Le 8 septembre 1750, Fiorenza Ravagnin, trente-huit ans, convolait en justes noces avec le sexagénaire Pietro Vendramin ai Carmini. L’époux était à nouveau un vieux célibataire en pressante nécessité de descendancexxxi. Mais cette fois l’enjeu était bien plus important.

Membre d’une des familles nobles les plus illustres de l’Etat Vénitien, qui avait donné à la République des doges, des procureurs, des ambassadeurs, des gouverneurs et des prélats, Pietro Vendramin était un homme d’Etat célèbre et estimé depuis près d’un demi-siècle pour son infatigable zèle patriotique. Jeune amiral lors de la dernière guerre contre les Turcs, au cours d’une longue et brillante carrière il avait occupé des postes importants, parmi lesquels plusieurs fois celui de provveditore da mar, c’est-à-dire chef de la flotte et gouverneur des Iles Ioniennesxxxii.

Homme extrêmement religieux et entièrement dévoué à la vie publique arrivé à la soixantaine sans descendant, il accepta de prendre pour épouse Fiorenza Recanati. Vu l’âge de madame, les probabilités d’avoir des enfants étaient faibles, à tel point que Pietro accomplit un pèlerinage au sanctuaire de la Vierge de Loreto afin d’implorer sa grâce et d’avoir ainsi une progéniture masculine.

Loin d’être un célibataire des plus avantageux, Pietro apporta à Fiorenza un nom de famille ancestral mais à la situation financière difficile. Il faut croire qu’il avait entendu parler de ses qualités peu communes d’économe : en l’épousant, il ne lui demanda aucune dot. Elle accepta mais demanda en échange la gestion totale des biens familiaux : chose qui lui fut accordée deux ans plus tard, en 1752xxxiii.

Une fois qu’elle eut emménagé dans le beau palais Vendramin de Dorsoduro (notons, juste à côté de l’habitation de l’érudit et futur doge Marco Foscarini), Fiorenza appliqua immédiatement des mesures vouées à rétablir l’économie de la maison. Elle mit fin à plusieurs dettes de son époux en vendant des biens mobiliers et immobiliers de famille, en payant parfois de sa pochexxxiv. De surcroît, elle réorganisa sa politique de collectionneurxxxv.

Si aucune dot pécuniaire n’avait été versée, elle avait fait don au mari d’un autre capital, probablement plus précieux encore : le très large réseau de contacts culturels hérité du temps de son premier mariage, et élargi – comme nous avons pu le voir – tout au long de son veuvagexxxvi. Pietro ne manqua pas d’en bénéficier : ce fut, entre autre, par l’intermédiaire de son épouse, qu’en avril 1751, il entra en contact avec le professeur Poleni, dont l’œuvre d’ingénieur hydraulique et naval s’avéra bénéfique au vieil amiral et Inspecteur da marxxxvii.

La naissance à distance rapprochée de deux enfants – le tant espéré héritier masculin Francesco (1751) et la cadette Moceniga (1752) – couronna l’heureuse unionxxxviii.

Ceci marqua pour Fiorenza la consécration sociale définitive et peut-être aussi une douce revanche sociale. Non plus seulement garante de l’héritage culturel du premier mari, mais aussi de la survie dynastique du second, elle pouvait maintenant se présenter comme mère providentielle, bienfaitrice publique, matrone de la République. Les productions culturelles qui lui furent dédiées devinrent la réclame de tels mérites.

En 1752, « Son Excellence la Gente Dame Fiorenza Ravagnini Vendramin » n’était plus seulement souscriptrice, mais dédicataire de l’édition des Dissertazioni Vossiane d’Apostolo Zenoxxxix. Même si elle ruisselle de formules et de compliments, la lettre de dédicace témoigne à la fois de la renommée de Fiorenza et de sa proximité au groupe intellectuel progressiste vénitien, dans lequel justement lo Zeno et Recanati étaient les figures de proue :

Si l’illustre Auteur de ces essais pouvait sortir de sa tombe et découvrir qu’on publie sous le Nom respecté de Votre Excellence, je suis absolument certain qu’il en éprouverait une satisfaction singulière. Lui, qui n’avait pas à se donner la peine d’aduler quelqu’un, avait une estime toute particulière votre esprit et vos talents.

Trois ans plus tard, une nouvelle entreprise éditoriale liait le nom de Fiorenza Ravagnin à la fine fleur du mécénat vénitien et aux grands noms de l’Illuminisme italien. En 1755 l’avocat Camillo Manetti faisait paraître à Genève (sous la fausse date de « Palmyra ») les anticuriales et interdites Opere postume di Pietro Giannone in difesa della sua Storia Civile del Regno di Napoli. Des documents découverts récemment ont révélé que les deux mille copies de cette œuvre arrivèrent sur la lagune cette même année au mois de juin, et que c’était effectivement Fiorenza qui avait financé l’impressionxl.

Durant les années qui ont suivi, la dame appuya trois nouvelles éditions illustrées.

En 1756, elle comptait parmi les rares femmes associées à Le rime del Petrarca brevemente esposte per Lodovico Castelvetro (1756) que l’éditeur Antonio Zatta imprimait en élégant format et dédiait à « Son Altesse Royale Marie-Antoinette de Bavière princesse de Pologne »xli.

L’année suivante, elle approuvait de sa signature La Divine Comédie de Dante Alighieri, imprimée en hommage à « Sa Majesté Impériale Elisabeth Petrowna, Impératrice de toutes les Russies »xlii.

En 1766, signant désormais du seul et plus illustre de ses noms, « Son Excellence Madame Fiorenza Vendramin » était la seule femme parmi les nombreux souscripteurs du Corriere letterario, une anthologie périodique de journaux assemblée par l’imprimeur Antonio Graziosi et comprenant, entre autres, des extraits de “Il Caffé” des frères Verri, de “Le Novelle Letterarie” de Lami, et de l’“Encyclopédie universelle” de Paris, et encore d’autres « extraits tirés des meilleurs Journaux d’Europe » et de « nouvelles particulières communiquées par les érudits »xliii.

Un simple coup d’œil au volume témoigne de l’orientation politique et progressiste de toute l’entreprise. Outre les symboles ouvertement maçonniques exhibés dans le frontispice (le compas, l’équerre et l’ancre), la longue liste des souscripteurs étalait la fine fleur de l’intelligentsia réformiste vénitiennexliv.

« Parmi les Matrones Vénitiennes ». Les dernières années

La souscription au Corriere letterario (1766) marque le sommet de l’activité de mécène de Fiorenza Ravagnin. A partir de l’année suivante, soudainement et pendant plus de vingt ans, sa signature disparaissait des lettres de dédicace, des souscriptions et des correspondances d’hommes érudits. Les rares documents de cette période nous présentent un chef de famille plus intéressé par les questions familiales et par son patrimoine vacillant que par la promotion culturelle.

Il fallait caser le premier enfant Francesco, désormais prêt à embrasser la carrière politique et déjà protagoniste de fiançailles de haut rang bien que controversées à en croire les mauvaises langues, et la fille Moceniga, pour laquelle il fallait préparer une dot conséquente. Pour ses deux enfants, la mère – ambitieuse et omnipotente entremetteuse, selon un témoin – assura des noces prestigieuses avec Alba Corner della Ca’ Granda (1771) pour l’un et Jacopo Nani San Trovaso (1772) pour l’autrexlv.

Ensuite, naturellement, le destin du patrimoine. Pour nous informer sur ce propos il existe deux testaments que Pietro et Fiorenza dicteraient quelques années plus tard : quasiment deux autobiographies, intéressantes en ce qu’elles nous révèlent la nature différente des deux conjoints.

Agé de quatre-vingt-cinq ans et souffrant parfois de problèmes de goutte – comme le précisait le notaire –, en 1755 Pietro Vendramin nommait comme héritier universel « Francesco mon enfant [...] et ses descendants mâlesxlvi ». Il ajoutait des informations intéressantes sur l’épouse, pour laquelle il nourrissait une immense reconnaissance, ainsi que sur leur vie conjugale :

Pour toute chose je suis redevable à Fiorenza Ravagnin, ma très chère épouse, à laquelle je n’ai pas voulu demander quelque dot que ce soit, au contraire elle possède à ce sujet un acte notarial de renoncement qui montre clairement que je lui ai laissé au moment de notre mariage tout ce qu’elle possédait à son entière disposition.

Ainsi revivait-il en paroles qui trahissaient l’admiration, les dépenses considérables engagées par la femme en pleine liberté jusqu’aux dettes engagées par cette dernière, que le fils devait dorénavant régler « d’autant plus qu’elles furent contractées pour lui, la sœur et pour la dignité de la maison ».

Vendramin s’éteignit deux ans plus tard, en 1777. Veuve pour la seconde fois, le 14 septembre 1785, Fiorenza Ravagnin, alors âgée de soixante-treize ans, dictait à son tour ses dernières volontés.

Elle commençait par un long et solennel compte-rendu de sa gestion du patrimoine. A chaque mot transparaissaient cette fierté, cette conscience, cet amour de la précision avec lesquels pendant trente-trois ans elle avait administré les biens qui lui avaient été confiés. A son habitude pragmatique et méthodique, avec un style de dissertation, Fiorenza passait en revue les sommes déboursées pour solder les dettes héritées avec le mariage. Elle démontrait, point par point, le respect des directives attribuées par son époux trente ans auparavant et la bonne gestion d’un patrimoine qui, grâce à sa propre œuvre d’économe, avait été conservé et transmis aux descendants.

Elle tenait à mentionner « mon argent personnel employé », et qui aurait dû « lui être restitué par le Fils par devoir, et par justice ». En dressant la liste des nombreuses propriétés, des biens, « les métayages et terrains » laissés par Vendramin, elle n’oubliait pas de mentionner le bien à partir duquel elle avait réalisé son ascension sociale, « la Bibliothèque, où […] j’ai rangé tous les livres de ma propriété », et qui maintenant était « en usufruit commun avec mon Fils ».

Elle évoquait à nouveau la confiance aveugle que Vendramin avait toujours placée dans sa gestion, et elle demandait donc au fils et premier héritier d’éteindre « toutes les dettes engendrées […] pour l’Honneur de la Famille », à savoir principalement pour son onéreux mariage et pour celui de la sœur Moceniga.

Florence nommait enfin Francesco « héritier libre universel » laissant à Moceniga, son exécutrice testamentaire, « toutes les dettes restantes, qui au total représentent une faible somme ».

Comme on peut le voir, malgré la gestion avisée, quelques vieilles dettes restaient encore à régler, et de nouvelles avaient été contractées.

Cinq ans après, le budget des Vendramin était à nouveau dans le rouge. En effet, du mariage de Francesco et Alba Corner étaient nées deux filles, Fiorenza (1772) et Maria (1777), auxquelles s’ajoutait Lucrezia, le premier enfant de Moceniga : trois nouvelles et couteuses dots à prévoir.

Les noces des petits enfants constituèrent le dernier effort de l’infatigable dame et coïncidèrent avec son extrême célébration publique. Elle chercha des prétendants de prestige d’où qu’ils vinssent grâce à son réseau de contacts, et elle en trouva enfin à Venise, dans la Terraferma vénitienne et même dans les Etats Pontificaux. Les trois affaires furent conclues en l’espace d’un anxlvii.

Les traditionnels livrets de noces, bien plus que célébrer les jeunes épouses, se transformèrent en l’énième consécration de la puissante grand-mère. Ils nous témoignent à quel point le prestige et le réseau clientéliste de Madame Vendramin étaient étendus. Le dédicataire Girolamo Trevisan y louait « cette extrême gentillesse » et « ces éminentes vertus qui vous signalent parmi les Matrones Vénitiennes »xlviii.

La fin de siècle réserva un ultime moment de gloire à la famille Vendramin. Ce n’était toutefois que le chant du cygne. Au mois de juillet 1794, le fils Francesco était élu « Riformatore allo Studio di Padova », c’est-à-dire un des trois ministres de l’Instruction de la République Sérénissime. A cinquante ans de l’entrée dans le monde scintillant du mécénat, Fiorenza goûtait à la satisfaction de voir son premier enfant aux commandes de la culture officielle vénitienne. Trois mois plus tard, le même héritier était nommé ambassadeur vénitien à Constantinople, et ce fut alors l’apogée. Il partit pour la capitale ottomane en avril 1796 : par un destin tragique, il ne verrait plus ni la mère, ni sa première née, ni sa patrie indépendante. Durant ces mêmes journées, Fiorenza sentit peut-être venir la fin de tout un monde. Elle qui avait vécu aussi pleinement les derniers fastes de la Sérénissime, sembla s’éteindre avec celle-ci.

Le 1er septembre 1796, malade et sentant la mort imminente, elle fit ajouter un codicille au testament avec de nouvelles dispositions. Elle en rédigea certaines de sa main, avec une graphie tremblante : une hausse de rente pour la fidèle femme de chambre Marietta Manfredi et pour le batelier Piero, qui depuis quelques mois l’assistaient affectueusement. Arguant qu’elle ne reverrait plus son héritier désormais lointain, elle confiait aux deux domestiques « la garde de la Maison jusqu’au retour de mon Fils ».

Pendant les deux mois qui suivirent, depuis le lit dans lequel elle était contrainte de rester alitée, peut-être entendit-elle le grondement des canons. Le 21 novembre, à quatre-vingt-quatre ans, elle finit ses jours dans la maison de famille, sur la fondamenta des Carmini. Quatre jours plus tôt, la bataille du pont d’Arcole avait élevé le général Bonaparte au rang de maître absolu de la Vénétie, ce qui avait mis fin, de fait, à la souveraineté de la République de Saint-Marc.xlix

Note de fin

i

Parmi les essais qui ont fait mention de Fiorenza on rappellera Opere di Pietro Giannone, dans Illuministi Italiani, éd. S. Bertelli, G. Ricuperati, Milan-Naples, Ricciardi, 1971, vol. I, p. XXVIII; M. Infelise, L’editoria veneziana nel ’700, Milan, FrancoAngeli, 1999, p. 353; R. Carriera, Lettere, diari, frammenti, éd. B. Sani, Florence, Olschki, 1985, II, ad indicem; M. Magrini, I pastelli di Rosalba Carriera della collezione Recanati, dans Per sovrana risoluzione. Studi in ricordo di Amelio Tagliaferri, sous la direction de G.M. Pilo et B. Polese, Monfalcone, Editions della Laguna, 1998, p. 539-546; G. Pavanello-A. Mariuz, La collezione Recanati, “Atti dell’Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti”, t. CLIX (2000-2001), Classe di scienze morali, lettere ed arti, p. 65-175; P. Del Negro, Rosalba Carriera: la famiglia e la società veneziana, dans Rosalba Carriera «prima pittrice de l’Europa», sous la direction de G. Pavanello, Venise, Marsilio - Istituto di Storia dell’Arte Fondazione Giorgo Cini, 2007, p. 33-39; B. Sani, Rosalba Carriera 1673-1757. Maestra del pastello nell’Europa ancien régime, Turin, Allemandi, 2007, ad indicem; P. Del Negro, Giovanni Poleni e i Riformatori dello Studio di Padova. Una carriera universitaria nel XVIII secolo, dans “Quaderni per la storia dell’Università di Padova”, 46 (2013), p. 3-60; ID., Giovanni Poleni e la Repubblica delle Lettere: i periodici, le accademie, i corrispondenti, dans Giovanni Poleni tra Venezia e Padova, sous la direction de P. Del Negro, Venise, Istituto Veneto di Scienze Lettere ed Arti, 2013, p. 131 e 173. Au cours de notre étude nous citerons les lettres inédites de Fiorenza Ravagnin conservées dans la British Library de Londre, Manuscripts Additional 22964 (I) - 22971 (VIII), (dorénavant “BL, I-VIII”). Je tiens à remercier Pietro Del Negro, Giuseppe Gullino, Mario Infelise, Mathilde Rossi et Anne Blanchon pour leur relecture ainsi que pour les remarques et conseils dont ils m’ont fait part.

ii Sur les femmes Vendramin cf. C. Chiancone, Le lettere d’amore di Alba Corner Vendramin al Bertola (1793-1795), dans “Archivio veneto”, CLXVII (2006), p. 155-192; ID., Le lettere inedite di Fiorenza Vendramin Sale a Luigi Cerretti (1795-1796), dans “Quaderni veneti”, 40 (2004), p. 121-164.

iii Cf. Biblioteca del Museo Civico Correr, Ms. P.D. 2536 / 6, De Ravagnina familia Summarium Historicum, manuscrit latin datant de 1685 environ. Pour ce qui est de la date de naissaonce de Fiorenza cf. Magrini, cit., p. 545.

iv Cf. D. Raines, Idee di nobiltà nel dibattito sulle aggregazioni (1685-1699 et 1704-1718), dans Venezia e la guerra di Morea: guerra, politica e cultura alla fine del ’600, sous la direction de M. Infelise ed A. Stouraiti, Milan, FrancoAngeli, 2005, p. 94.

v Cf. Del Negro, Rosalba, cit. Sur les ouvrages de Recanati cf. E. Cicogna, Saggio, cit.; E. Lugato, Alla ricerca del codice pliniano di Giambattista Recanati (1687-1734), bibliofilo veneziano, dans “Studi umanistici piceni”, 19 (1999), p. 54-67; ID., “…Breve, fugitiva relazione..”. Una lettera di Giambattista Recanati ad Apostolo Zeno, dans Humanistica Marciana: saggi offerti a Marino Zorzi, sous la direction de S. Pelusi ed A. Scarsella, Milan, Biblion, 2008, p. 165-173.

vi Cf. Del Negro, Rosalba, cit., p. 195. De nombreuses correspondances de Recanati sont signalés dans C. Viola, Epistolario italiano del Settecento, Verona, Fiorini, 2004, ad vocem. Ses lettres à Montfaucon sont conservées à la Bibliothèque Nationale de France, Manuscrits Français, 17711 (XI).

vii Cf. Poesie italiane di rimatrici viventi raccolte da Teleste Ciparissiano pastore arcade, Venise, 1716.

viii Cf. A. Merlotti, Giannone, Pietro, dans Dizionario Biografico degli Italiani, vol. 54 (2000).

ix Cf. Magrini, cit., p. 542-543.

x Cf. M. Zorzi, La Libreria di San Marco, Milano, Mondadori, 1987, p. 250-252.

xi Cette bibliothèque se trouvait dans l’élégant nymphée du jardin de Palazzo Vendramin, qui existe toujours.

xii Cf. M.B. Guerrieri Borsoi, Manni, Domenico Maria, in Dizionario Biografico degli Italiani, vol. 77 (2012).

xiii Six lettres de G.B. Recanati a D.M. Manni (datant de la période 1731-1734), sont conservées dans BL, I, ff. 74, 76, 96, 101, 141, 191.

xiv Cf. Infelise, cit., p. 9-61.

xv Sur les femmes vénitiennes gérant les patrimoines familiaux cf. G. Gullino, I Pisani Dal Banco e Moretta. Storia di due famiglie veneziane in età moderna e delle loro vicende patrimoniali tra 1705 e 1836, Rome, Istituto storico italiano per l’età moderna e contemporanea, 1984. Sur les salons cf. B. Craveri, Madame du Deffand e il suo mondo, Milan, Adelphi, 1983;  EAD., La civiltà della conversazione, Milan, Adelphi, 2001 (2ème ed. 2006) [traduction française, L’âge de la conversation, Paris, Gallimard, 2002] ; cf. aussi Salotti e ruolo femminile in Italia : tra fine Seicento e primo Novecento, sous la direction de M.L. Betri et E. Brambilla, Venise, Marsilio, 2004.

xvi Venise, le 29 octobre 1735 (BL, I, f. 281).

xvii Cf. les lettres envoyées depuis Venise datées du 16 mars, 5 mai, 25 août et 23 novembre 1736 (BL, II, f. 11, 20, 35, 39).

xviii Venise, le 12 octobre 1738 (BL, II, f. 123).

xix Venise, le 8 septembre 1742 (BL, III, f. 342).

xx Venise, le 30 janvier 1739 [1738 more veneto] (BL, II, f. 91). Johann Matthias von der Schulenburg (1661-1747) fut le lieutenant général de l’armée vénitienne de 1715 al 1745, ainsi que l’un des plus importants collectionneurs de son époque, cf. A. Binion, La galleria scomparsa del maresciallo von der Schulenburg. Un mecenate nella Venezia del Settecento, Milan, Electa, 1990.

xxi Venise, le 9 juillet 1740 (BL, III, f. 105).

xxii Cf. Poesie drammatiche di Apostolo Zeno già poeta e istorico di Carlo VI imperadore e ora della S.R. maestà di Maria Teresa regina d’Ungheria e di Boemia, Venise, Pasquali, 1744, 10 vol.

xxiii Cf. La Gerusalemme liberata di Torquato Tasso con le figure di Giambatista Piazzetta alla sacra real maestà di Maria Teresa d’Austria regina d’Ungheria, e di Boemia, Venise, Albrizzi, 1745.

xxiv Venise, le 9 décembre 1747 (BL, IV, f. 200).

xxv Venise, le 4 mars 1747 (BL, IV, f. 168).

xxvi Venise, le 16 juillet 1769 (BL, VIII, f. 244).

xxvii Venise, le 18 septembre 1757 (BL, VI, f. 82). Mon italique.

xxviii Venise, le 12 août 1758 (BL, VI, f. 128).

xxix s.d. [peu après le mois de février 1758] (BL, VI, f. 224).

xxx Venise, le 16 juillet 1769 (BL, VIII, f. 244).

xxxi ASV, Libro d’Oro, Matrimoni.

xxxii Les informations sur Pietro Vendramin sont tirées de D.M. Pellegrini, Della prima origine della stampa in Venezia, 1794, p. VI-VII, et Epitalamio di C. Valerio Catullo volgarizzato, p. 5.

xxxiii Nous rappellerons, entre autres, le doge Andrea Vendramin (1393-1478) et le patriarche et cardinal Francesco Vendramin (1555-1619).

xxxiv Cf. infra, en référence au testament de Fiorenza Ravagnin.

xxxv Cf. Magrini, I pastelli di Rosalba Carriera, cit., p. 252.

xxxvi Sur la correspondance Recanati-Poleni (datée de 1733-34) cf. Bibliotèque Nationale Marciana, Mss. it. cl. X 135-136 (6713-6714) et Mss.it. cl. X 318 (6558).

xxxvii Cf. P. Del Negro, Giovanni Poleni e la Repubblica delle Lettere, cit., p. 131.

xxxviii Pour la date de naissance de Francesco (5 juillet 1751) cf. ASV, Libro d’Oro, Matrimoni. Pour l’année de naissance de Moceniga cf. Archivio Patriarcale de Venise, San Marco, Morti, reg. 10, le 8 avril 1834.

xxxix Cf. Dissertazioni Vossiane di Apostolo Zeno, cioè Giunte e Osservazioni intorno agli Storici Italiani, che hanno scritto latinamente, rammentati dal Vossio nel III libro De Historicis Latiniis, en deux tomes.

xl Cf. Opere postume di Pietro Giannone in difesa della sua Storia Civile del Regno di Napoli: con in fine la di lui professione di fede, Palmyra [idest Genève], all’insegna della Verità, 1755. Cf. aussi G. Bonnant, Pietro Giannone à Genève et la publication de ses oeuvres en Suisse au XVIIIe et au XIXe siècles, dans “Annali della Scuola speciale per archivisti e bibliotecari dell’Università di Roma”, III, 1-2 (1963), p. 131; Opere di Pietro Giannone, dans Illuministi Italiani, cit., p. XXVIII; Infelise, L’editoria veneziana, cit., p. 353.

xli Cf. Le rime del Petrarca brevemente esposte per Lodovico Castelvetro, Venise, Zatta, 1756.

xlii Cf. La Divina Commedia di Dante Alighieri con varie annotazioni, e copiosi rami adornata, Venise, Zatta, 1757.

xliii Cf. Il Corrier Letterario già pubblicato in fogli periodici, Venise, Graziosi, 1766.

xliv On y trouve, entre autres, les hommes politiques et réformateurs Angelo Querini et Giorgio Pisani, le diplomate et collectionneur anglais Joseph Smith, les professeurs Carlo Antonio Pilati et Natale Dalle Laste, le typographe G.B. Albrizzi, le journaliste Domenico Caminer, le médecin (et futur jacobin) Rocco Melacini.

xlv Sur les fiançailles de Francesco Vendramin cf. les lettres de ce dernier à Giulio Perini datant de 1771 (Archivio di Stato de Florence, Acquisti e Doni, b. 94, ins. 255). Sur l’autorité de Fiorenza Ravagnin dans l’organisation des mariages de ses petites-filles cf. les Mémoires et confessions de Mad. Vendramin Sale de Francesco Testa (Biblioteca Civica Bertoliana de Vicence, Ms. 1916).

xlvi ASV, Canc. Inf., Miscell., 31.D, n.° 3831.

xlvii En 1792, la fille aînée de Francesco, elle aussi appelée Fiorenza, et Lucrezia convolèrent à justes noces avec le marquis vicentin Luigi Sale l’une, et le noble vénitien Lorenzo Sangiantoffetti l’autre. L’année suivante, Maria épousa Francesco Ricci, un riche marquis de Macerata.

xlviii Cf. Epitalamio di C. Valerio Catullo volgarizzato per le faustissime nozze del Nob. Sig. March. Luigi Sale di Vicenza e di Sua Eccellenza Fiorenza Vendramin N.V., Padova, nella Stamperia del Seminario con permissione, 1792, et cf. Poema di Catullo sulla Chioma di Berenice tradotto dal signor abate Antonio Conti di nuovo pubblicato per le nozze di S.E. la N.D. Maria Vendramin patrizia veneta e del sig. marchese Francesco Ricci gentiluomo maceratese, Crisopoli [idest Parme], co’ tipi bodoniani, 1793.

xlix Archivio Patriarcale de Venise, San Raffaele, Morti, 22 (1796-1805).

Citer cet article

Référence électronique

Claudio Chiancone, « Une histoire d’émancipation féminine dans la Venise du 18e siècle : Fiorenza Ravagnin, mécène et collectionneuse », Line@editoriale [En ligne], 8 | 2016, mis en ligne le 09 mars 2023, consulté le 20 avril 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/lineaeditoriale/1638

Auteur

Claudio Chiancone