(Hétéro)normer et contrôler : les dispositifs du ministère de l’Éducation vis-à-vis des élèves trans

  • Transgender pupils in schools: How Japanese Ministry of Education measures are controlling and gendering bodies
  • トランスジェンダー児童生徒に対する文部科学省の支援策―異性愛の規範、異性愛への規制―

La situation des personnes trans au Japon n’a eu de cesse d’évoluer à partir de la promulgation de la Loi n°111 du 16 juillet 2003. Si le changement de sexe à l’état civil et la réassignation sexuelle sont proposés aux personnes majeures dans cette loi, aucun dispositif national n’encadre pour le moment les mineurs. Cet article examine la logique qui sous-tend les politiques adoptées par le ministère de l'Éducation japonais, première institution concernée par l’inclusion des élèves trans. L’examen des documents du ministère, au regard des retours d’expériences des enseignants et élèves documentés dans la littérature scientifique récente, met en évidence la volonté de celui-ci d’uniquement proposer aux enfants une réassignation sexuelle médicalisée pour leur majorité, ce qui correspond à un modèle hétéronormatif.

The situation of trans people in Japan kept evolving since the enactment of Law no. 111 on 16 July 2003. Although this law enables legal gender change on koseki and sex reassignment for adults, there are currently no national provisions for minors. This article examines the rationale behind the policies adopted by Japan's Ministry of Education, Sports, Science and Technology, the first institution concerned with the inclusion of trans students. An examination of the Ministry's documents, in the light of feedback from teachers and pupils documented in recent literature, highlights the Ministry's desire only to offer children medicalized gender reassignment when they reach the age of majority, which corresponds to a heteronormative model.

2004年7月16日から施行された「性同一性障害者の性別の取扱いの特例に関する法律」により、戸籍上の性別記載を変更できるようになった。この特例はトランスジェンダーを取り巻く環境を変えたものの、現時点では未成年者に対しては適用されない。本研究の目的は、2003年にはじまった、性的マイノリティの児童と生徒に対する文部科学省の支援策の論理を明らかにすることである。トランスジェンダーの児童生徒への対応を余儀なくされ、日本の文部科学省が採用した政策の根拠を検証する。教職員や生徒による実践と文部科学省の支援策を比較すると、児童生徒のニーズ等は把握されていなかったり、支援策はあくまでも対症療法でしかなかったりすることが浮かび上がる。

Plan

Texte

Introduction

Le 25 octobre 2023, la Cour suprême japonaise a estimé « inconstitutionnelle » l'obligation légale faite aux personnes trans de subir une opération afin de changer de sexe à l’état civil, selon les conditions édictées par la « Loi sur les particularités de traitement de la distinction de sexe chez les personnes atteintes de dysphorie de genre » (Seidōitsusei shōgaisha no seibetsu no toriatsukai no tokurei ni kan suru hōritsu 性同一性障害者の性別の取り扱いの特例に関する法律), promulguée en 2003 et révisée en 20081. Par ailleurs, le 3 juillet 2024, la Cour suprême a jugé inconstitutionnelle la loi eugéniste en vigueur entre 1948 et 1996 qui a conduit à la stérilisation d’environ 16 500 Japonais. Cette question de la stérilisation place la régulation biopolitiques des corps sur le devant de la scène médiatique et interroge notamment la situation des personnes trans.

Dans le contexte des années 2020, amené à évoluer2, le terme « personnes atteintes de dysphorie de genre » (seidōitsusei shōgaisha 性同一性障害者) désigne de manière générale au Japon des adultes, plutôt que des enfants ou adolescents. Si certains pays proposent aujourd’hui les premières législations et réglementations des traitements hormonaux et de réassignation concernant les enfants et jeunes trans, ce n’est pas le cas de ce pays 3. Néanmoins, le système scolaire demeure l’un des cadres premiers dans lequel évoluent les enfants et adolescents japonais ; on peut donc s’interroger sur l’existence de mesures prises par le ministère de l’Éducation pour s’inscrire dans le sillage de la reconnaissance juridique des personnes trans. Comment ce ministère considère-t-il les élèves trans et prend-il en charge leur parcours identitaire ?

L’objectif de cet article est ainsi d’examiner le discours porté par le ministère de l’Éducation sur les élèves trans. Notre analyse portera uniquement sur le corpus de textes produits par ce dernier à partir de la promulgation de la loi de 2003 : une note de 2010, les résultats d’une enquête de 2014, la préconisation d’une série de mesures à appliquer au sein des écoles élémentaires, collèges et lycées de 2015 et 2016, les directives sur la prévention des brimades de 2017 et enfin les instructions générales pour l’encadrement des élèves de 2022. Les contenus des manuels scolaires ne seront pas pris en compte, car seuls trois manuels de morale de collège comportent, à partir de 2019, des mentions concernant les minorités sexuelles, dont celle d’un collégien « atteint de dysphorie de genre », qui plus est édités par des maisons d’édition minoritaires4. De ce fait, les associations LGBT et les groupes trans continuent de demander depuis 2003 l’inclusion de la référence à la loi dans les manuels d’éducation domestique (kateika 家庭科) de lycée ou bien dans ceux de morale (rinri 倫理)5. L’ensemble des documents édités par le ministère concerne directement ou indirectement les enfants trans scolarisés dans les établissements placés sous sa tutelle. Ce choix d’un corpus restreint se justifie, d’une part, par la rareté relative des documents concernant les élèves trans et, d’autre part, par l’intérêt que suscite la rhétorique déployée par le ministère, à commencer par le choix des différents termes utilisés pour désigner les élèves trans ou LGBT. Ce faisant, il est possible de sonder le degré de conformité des manuels aux discours politiques portés sur les personnes trans, que ce soit dans les médias ou dans le corpus juridique, depuis les préparatifs de la loi de 2003 jusqu’à sa révision en 2008 et les récents avis d’inconstitutionnalité portés envers cette dernière. On s’appuiera également sur des documents scientifiques de seconde main, principalement en langue japonaise, en mentionnant toutefois le fait que la littérature sur la transidentité est récente et de fait relativement peu importante lorsqu’il s’agit de considérer les enfants trans et le dispositif scolaire.

Cette analyse des documents officiels du ministère de l’Éducation ne donnera toutefois qu’un aperçu partiel du point de vue adopté in fine par les bureaucrates du ministère et, dans une certaine mesure, du contexte politique et juridique qui les entoure. Elle ne donnera pas à voir les pratiques concrètes au sein des établissements scolaires, pour lesquelles il serait nécessaire mener un travail de terrain – commencé par plusieurs chercheurs japonais – afin de percevoir les différentes interprétations et pratiques mises en place sur l’ensemble du territoire6. Cette contribution, qui a pour objectif d’interroger la situation des enfants et jeunes trans dans le cadre scolaire, présentera dans un premier temps le cadre général dans lequel le ministère déploie sa rhétorique, puis la façon dont celui-ci préconise de mettre en places différentes mesures.

1. Encadrer et hétéronormer les élèves par la « dysphorie de genre »

Intéressons-nous tout d’abord au vocabulaire utilisé par le ministère de l’Éducation pour rendre compte de la « dysphorie de genre », un vocabulaire qui relève exclusivement de l’ordre de la pathologie médicale. Revenons pour ce faire brièvement sur la loi de 20037. Cette loi n° 111 du 16 juillet 2003, intitulée comme on l’a vu Loi portant sur la réglementation des exceptions concernant le traitement de la distinction de sexe chez les personnes atteintes de dysphorie de genre8 se rencontre également sous la forme abrégée de Loi spéciale sur le traitement de la distinction de sexe chez les personnes atteintes de dysphorie de genre (Seidōitsusei shōgaisha tokurei hō 性同一性障害者特例法) voire de Loi spéciale (Tokurei hō 特例法), ce qui était son nom dans la première mouture, ou bien encore selon son numéro pour l’année 2003, la Loi 111. Notre choix de traduction rend les termes japonais seibetsu 性別 par « distinction de sexe » et seidōitsuei shōgaisha 性同一性障害者 par « personnes atteintes de dysphorie de genre ». Ce vocabulaire est choisi à dessein pour refléter l’intention du législateur et pour éviter deux autres termes du vocabulaire contemporain, issu des études de genre ou du militantisme LGBT. Plutôt que de parler de « distinction de sexe » et de « personnes atteintes de dysphorie de genre », les personnes féministes ou LGBT ou toute personne convaincue par la terminologie proposée par les études de genre parleraient de « genre » (jendā ジェンダー) et de « personnes trans » (toransu トランス) ou « transgenres » (toransjendā トランスジェンダー). Plus précisément, en japonais seidōitsuei shōgaisha correspond littéralement à « personnes handicapées par une dysphorie de genre ». C’est le terme issu du vocabulaire médical du manuel de psychiatrie, telle la dernière version du DSM américain (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux), terme qu’on trouve parfois en japonais sous la forme de GID, écrit en alphabet latin, qui reprend la formulation en langue anglaise Gender Identity Trouble. Même si le terme « personne atteinte de dysphorie de genre » est péjoratif envers les personnes trans, nous le conserverons dans ce texte pour toutes les occurrences de seidōitsuei shōgaisha en japonais.

La Loi spéciale précise qu’il est nécessaire de faire la demande de changement d’état civil en se conformant à un encadrement et un suivi médical strict, qui repose sur le diagnostic d’au moins deux médecins ayant l’expérience et les connaissances nécessaires9. Fournir une attestation de diagnostic de « dysphorie de genre » est obligatoire. L’encadrement médical prime sur toute autre considération, ce qui est annoncé d’emblée dans le titre de la loi – et c’est précisément ce qui a permis à la loi d’être adoptée par une majorité constituée notamment de parlementaires hommes conservateurs10. Le choix de ces termes a permis à la classe politique conservatrice qui a examiné le projet d’écarter toute référence aux termes tels que « transgenre », « LGBT », « minorité sexuelles », de la même façon que le terme « égalité de genre » (jendā byōdō ジェンダー平等) avait été rejeté en 2000 pour nommer la « Loi sur l’égalité des sexe », littéralement loi sur la « participation conjointe des hommes et des femmes » (danjo kyōdō sankaku 男女共同参画)11.

Ces questions de terminologie lors de la création des politiques en faveur de l’égalité des sexes ne cessent de traverser les discours et rhétoriques des conservateurs qui agitent la peur du chaos social qui pourrait découler d’une véritable « égalité des sexes » (danjo byōdō 男女平等) ainsi que des théories du genre (jendāron ジェンダー論). C’est d’ailleurs grâce à ce choix d’un vocabulaire médicalisé et « hors genre » que la loi a pu être adoptée au plus fort du mouvement de dénigrement de l’éducation gender free (jendāfurî ジェンダーフリー), au moment du lynchage médiatique qui avait pour cible l’éducation sexuelle dispensée à l’école spécialisée Nanao à l’été 200312. Les acteurs politiques conservateurs et opposés à l’égalité des sexes à l’école n’ont pu prendre en compte l’encadrement de la transsexualité que comme une façon de corriger des individus pour atteindre la norme des idéaux masculins et féminins qu’ils défendaient alors de la façon la plus rigoureuse dans le domaine de l’éducation, et continuent par ailleurs de défendre13.

La version de 2003 de la Loi spéciale imposait au juge de vérifier si les personnes requérantes remplissaient les conditions suivantes :

  • avoir plus de 18 ans au moment de la demande (20 ans, dans la dernière version d’avril 2022) ;

  • ne pas être marié·e ;

  • ne pas avoir d’enfant(s) au moment de la demande de changement d’état civil (disposition remplacée par « sans enfant(s) mineur(s) » (gen ni miseinen no ko ga inai 現に未成年の子がいない) lors de la révision de 2007) ;

  • ne pas avoir de gonades sexuelles/ne plus avoir, de façon définitive, l’usage des capacités de reproduction des gonades sexuelles ;

  • posséder des organes génitaux ayant une apparence très proche de ceux de l’autre sexe.

Les conditions les plus critiquées à l’époque et encore maintenant, par les personnes concernées, les mouvements LGBT et les mouvements de défense de droits de l’homme, portent sur l’absence d’enfant, la stérilisation des capacités reproductives et l’apparence conforme aux organes génitaux du sexe opposé14. On retrouve dans d’autres pays des législations (concernant les personnes trans) qui ont été modifiées pour supprimer cette condition de stérilisation obligatoire, à l’exemple de celles d’Angleterre ou d’Espagne. Les militants LGBT japonais espèrent une inflexion juridique similaire à moyen terme : les décisions de la Cour suprême de 2023 et 2024 leur laissent espérer la possibilité d’une suppression de la condition de stérilisation et de réassignation sexuelle chirurgicale15. Cette dernière disposition, outre le fait de réaffirmer la binarité des corps et des sexes, établit une hiérarchie entre les personnes souhaitant recourir à la chirurgie de réassignation sexuelle et celles n’en ressentant ni l’envie, ni le besoin, ou celles qui n’ont pas les moyens financiers pour. Ce sont ces deux dernières dispositions, placées sous la définition du diagnostic de « dysphorie de genre » qui imposent un recours à une intervention chirurgicale, qui sont aujourd’hui mises en cause à travers la déclaration en 2023 d’inconstitutionnalité de la Cour suprême.

Examinons à présent les autres termes employés par le ministère de l’Éducation dans les différents documents qu’il a publiés. On ne trouve pas de mention relative aux personnes concernées par la Loi spéciale avant le 23 avril 2010, date à laquelle le ministère publie un avis « Sur l’ensemble des consultations à l’école pour résoudre les problèmes que peuvent rencontrer les écoliers et les collégiens » (Jidō seito ga kakaeru mondai ni taishite no kyōikusōdan no tettei ni tsuite 児童生徒が抱える問題に対しての教育相談の徹底について)16. Le titre n’est pas très explicite, mais on trouve juste après une précision qui indique que ne sont concernés que « les écoliers et les collégiens présentant des syndromes de la transsexualité » (seidōitsusei shōgai no aru jidō seito 性同一性障害のある児童生徒). La note précise d’emblée ce que signifie la dysphorie de genre, en reprenant mot pour mot l’explication donnée dans l’article 2 de la Loi spéciale.

À la suite de l’avis publié en 2010, le ministère de l’Éducation publie le 13 juin 2014 une « Enquête sur la situation relative aux mesures adoptées pour les personnes présentant les syndromes de dysphorie de genre à l’école » (Gakkō ni okeru seidōitsusei shōgai ni kakaru taiō ni kansuru jōkyō chōsa ni tsuite 学校における性同一性障害に係る対応に関する状況調査について)17. On retrouve encore le même vocabulaire avec la publication le 30 avril 2015 de la « Mise en œuvre des mesures détaillées concernant les écoliers et les collégiens vis-à-vis de la dysphorie de genre » (Seidōitsusei shōgai ni kakaru jidō seito ni taisuru kimekomakana taiō no jisshitō ni tsuite 性同一性障害に係る児童生徒に対するきめ細かな対応の実施等について)18. À nouveau, cette note reprend les définitions de la loi de 2003 et renvoie également aux deux documents publiés par le ministère de l’Éducation en 2010 et 2014. Le 1er avril 2016 est publié un « Guide pour le personnel enseignant des mesures détaillées concernant les élèves vis-à-vis de la dysphorie de genre, de l’orientation sexuelle et de l’identité sexuée » (Seidōitsusei shōgai ya seiteki shikō-seijinin ni kakaru jidōseito ni taisuru kimekomakana taiō no jisshitō ni tsuite. kyōshokuin muke 性同一性障害や性的指向・性自認に係る児童生徒に対するきめ細かな対応の実施等について。教職員向け), destiné aux enseignants afin de faciliter la mise en place des mesures indiquées en 201519.

Le ministère tient d’ailleurs à faire utiliser ce vocabulaire, précisé dans une première partie intitulée « À propos du vocabulaire » (Yōgo ni tsuite 用語について). À l’intérieur de cette dernière, le lien entre orientation sexuelle, identité sexuée et transsexualité est commentée ainsi : « la dysphorie de genre, c’est quand le sexe biologique ne correspond pas à l’identité de sexe ». Il est ensuite précisé que l’orientation sexuelle est bien différente de l’identité sexuée, et qu’elle concerne uniquement la relation amoureuse, laquelle implique un partenaire de même sexe ou de sexe opposé. Le ministère considère ainsi qu’il existe bien une orientation sexuelle, mais qu’elle est fixe : soit on est hétérosexuel, soit « homosexuel » ; cette orientation demeure identique au cours d’une vie et les personnes concernées par la « dysphorie de genre » sont forcément attirées par le sexe opposé. Le ministère n’utilise ainsi pas le terme de « genre » (jendā ジェンダー). Dans le document intitulé Les grands principes à mettre en œuvre pour la prévention des brimades (Ijime no bōshitō no tame no kihonteki na hōshin いじめの防止等のための基本的な方針), dont la dernière révision date de mars 2017, on trouve l’expression suivante : « élèves concernés par la dysphorie de genre et d’orientation sexuelle/d’identité sexuée » (Seidōitsuseishōgai ya seiteki shikō ··seijinin ni kakaru seito 性同一性障害や性的指向・性自認に係る生徒)20. La traduction est malaisée puisque précisément les notions ne sont pas explicitées : « les élèves concernés par la dysphorie de genre ou l’orientation sexuelle/ l’identité sexuée ». Orientation sexuelle et identité sexuée concernent forcément chaque individu, mais ici ces notions sont apposées comme substantifs, non comme adjectifs, et on ne peut présupposer du sens du syntagme « élèves concernés par l’orientation sexuelle/l’identité sexuée), l’apposition par un point (une barre oblique dans la traduction en français) étant par ailleurs loin d’être explicite. L’expression correspond en réalité à l’acronyme contemporain SOGI (de l’anglais Sexual Orientation and Gender Identity), qui n’est pas utilisé pour désigner des personnes directement mais des entités concrètes (associations, mouvement) ou abstraites (problème, droit, concept)21.

Enfin, dans les dernières instructions générales (Seito shidō teiyō 生徒指導提要) de 2022, envoyées aux enseignants pour évaluer de manière globale le parcours des élèves, le chapitre 12 intitulé « thèmes relatifs à la sexualité » (sei ni kan suru kadai 性に関する課題) comprend une section (12.4) dont le titre est : « Comprendre les “minorités sexuelles” pour prendre des mesures adaptées dans les écoles » (“Seiteki mainoritini kan suru rikai to gakkō ni okeru taiō「性的マイノリティ」に関する理解と学校における対応)22. C’est le premier document de cette importance dans lequel le ministère de l’Éducation introduit le terme minorité sexuelle. Le choix des guillemets pour l’encadrer marque cependant tout à la fois la distance prise par rapport à l’emploi du terme en japonais, qui s’est banalisé dans les années 2000 y compris dans les journaux conservateurs, et les précautions dont s’entourent les bureaucrates du ministère de l’Éducation dans les années 2020 face à un terme hautement polémique. Le terme « minorité sexuelle » semble sur le point d’être validé par le ministère de l’Éducation, alors qu’il n’apparaît dans la Mise en œuvre des mesures détaillées concernant les écoliers et les collégiens vis-à-vis de la dysphorie de genre de 2015 que de façon détournée puisqu’on le retrouve uniquement dans un document donné en référence, édité en 2012 par le ministère de la Santé et intitulé Les grandes lignes des mesures pour une prévention globale du suicide (Jisatsu sōgō taisaku taikō 自殺総合対策大綱)23. Dans ces dernières instructions générales de 2022 est mentionné et explicité également l’acronyme LGBT qui n’apparaissait pas non plus jusqu’alors dans les documents officiels du ministère. L’appropriation récente de ces termes par l’institution scolaire marque très probablement un tournant, les composantes les plus conservatrices de celle-ci ne pouvant plus aujourd’hui fermer les yeux sur l’évolution du contexte juridique.

Ainsi, si on regarde la production écrite officielle du ministère de l’Éducation entre 2010 et 2024, les élèves y sont toujours qualifiés de personnes souffrant de la pathologie de « dysphorie de genre », y compris dans les Instructions générales de 2022 qui marquent pourtant une inflexion dans le choix du vocabulaire. La transition vers le sexe opposé est présentée comme l’unique « guérison », à travers « soins » et « traitements ». On constate en outre, dans ces documents du ministère, un évitement systématique des termes qu’on retrouve dans la production actuelle d’autres ministères comme celui de la Justice ou de la Santé, à l’instar des termes « SOGI », « genre », « minorité sexuelle » ou « LGBT ». De fait, seule la réassignation à un sexe opposé est proposée comme finalité aux enfants trans. Il ne s’agit donc en aucun cas de reconnaître la fluidité des identités de genre et la diversité des orientations et pratiques sexuelles des élèves, mais au contraire de renforcer la binarité des deux sexes, masculin et féminin, sans lever clairement le voile qui recouvre la question de l’orientation sexuelle. La médicalisation et le caractère normatif de la procédure de reconnaissance de la transsexualité maintiennent un système de genre rigide, dans lequel la transsexualité des élèves est uniquement perçue comme une anomalie provisoire, qui doit être corrigée au moyen du suivi médical et de l’opération de réassignation de sexe. Cette perspective revient donc à pathologiser les enfants trans et à normaliser la dichotomie des sexes ainsi que la répartition des rôles sociaux qui lui correspond.

2. Contrôler les élèves trans à l’aide de mesures spécifiques

Si le ministère de l’Éducation ne se place que dans la perspective d’une réassignation sexuelle et externalise donc celle-ci en la repoussant en dehors du cadre et du temps scolaire puisqu’elle n’est légalement possible qu’à partir des 18 ans du jeune concerné, qu’en est-il du parcours de « soin » mis en place tout au long de la scolarité ?

Prenons en compte le premier avis « Sur l’ensemble des consultations à l’école pour résoudre les problèmes que peuvent rencontrer les élèves » datant du 23 avril 2010, soit sept années après la promulgation de la loi. Dans cette courte note d’à peine deux pages, il est précisé que l’école doit soutenir les élèves souhaitant effectuer un diagnostic et prendre les mesures nécessaires pour tenir compte des problèmes que rencontrent les enfants, qui sont « de plus en plus divers et de plus en plus complexes » (tayōka shi, masumasu fukuzatsu ni natte orimasu 多様化し、ますます複雑になっております).

Est ensuite donné l’exemple d’un élève né garçon qui a été reconnu comme fille par son école. Ce cas est anonyme dans la note, mais le processus et les dates évoquées correspondent à la situation suivante, rapportée dans article du journal Mainichi, daté du 12 février 201024. Il s’agit d’un élève (né garçon), résidant dans le département de Saitama, qui a demandé à l’automne 2009, dans sa deuxième année d’école élémentaire, à être reconnu comme une fille. Cet enfant, dont les parents savaient depuis son entrée à l’école élémentaire qu’il n’aimait pas par exemple porter le maillot de bain pour garçons à la piscine ou uriner debout, est allé au mois de février précédent consulter dans une clinique spécialiste du genre du département de Saitama, où il a été diagnostiqué comme souffrant d’un syndrome de dysphorie du genre. Sur l’avis du médecin, il était précisé que l’école devait faire son possible pour accueillir l’enfant comme une fille. Le directeur de l’école en a informé l’équipe enseignante et, avec l’aide de la mère de l’enfant, à partir de septembre 2009, il a expliqué la nature de son syndrome et demandé à tous de le considérer dorénavant comme une fille, même si son état civil restait momentanément celui d’un garçon. L’enfant s’est déclarée ravie de pouvoir enfin s’habiller en fille, être appelée dans le groupe des filles et aller aux toilettes des filles.

La note ne donne pas d’autre exemples, mais un autre cas a été alors relaté dans plusieurs articles du journal local de Kōbe (Kōbe shinbun nyūsu, article du 18 mai 2006), ainsi que dans des quotidiens à diffusion plus importante comme le Tōkyō shinbun, également dans les journaux Yomiuri et Asahi ou par l’agence Kyodo news (articles datant également du 18 mai 2006)25. Il s’agit d’un élève (né garçon), résidant dans le quartier de la région de Harima (département de Hyōgo,), qui a demandé pour son entrée en classe de 1re année de l’école élémentaire à être reconnu comme fille, inscrit comme telle et bénéficier des aménités destinées aux filles (notamment les toilettes). Sa mère l’avait emmené à 5 ans en consultation à l’hôpital, en expliquant qu’il voulait être reconnu comme fille. Elle a alors été renvoyée à une consultation spéciale à l’hôpital d’Ōsaka. Ce dernier a diagnostiqué un syndrome de dysphorie de genre et rédigé une lettre à l’attention de l’école, qui demandait de faciliter la vie de l’élève en acceptant ses requêtes pour la rentrée de la nouvelle année en avril.

Dans ce contexte, la note de 2010 marque clairement un premier pas du ministère de l’Éducation vers la prise en compte des élèves trans et constitue une réponse officielle aux situations médiatisées jusque dans les quotidiens nationaux. Le ministère y prend acte des décisions de l’administration qui se conforment aux avis médicaux, eux-mêmes entérinés par le ministère de la Justice. Si la note ne mentionne que de façon anonyme le cas de l’élève de Saitama, elle constitue toutefois une validation officielle de la décision du comité local d’éducation et du directeur de l’école élémentaire concernée. Le ministère de l’Éducation accepte donc à partir de 2010 de prendre dorénavant en compte ce genre de situations – ce qu’il avait jusqu’alors refusé de faire – et annonce qu’il soutiendra les démarches administratives pour encadrer les élèves « atteints de dysphorie de genre ». Toutefois, le type de soutien pour ces élèves ainsi diagnostiqués n’est pas précisé clairement dans ladite note, mis à part, indirectement, l’évocation des garçons autorisé à s’habiller comme des filles et à aller aux toilettes de ces dernières. C’est dans ce contexte que l’Association japonaise sur la dysphorie de genre (GID Seidōitsusei shōgaisha gakkai GID 性同一性障害学会) adressera en 2013 au ministère une lettre de requête pour préconiser des mesures envers les élèves trans26.

Ce n’est qu’avec l’Enquête sur la situation relative aux mesures adoptées pour les personnes présentant les syndromes de transsexualité à l’école de 2014, un document plus conséquent de dix-sept pages, que des données concrètes sont mises à disposition de toute personne qui ferait une recherche sur le site Internet du ministère. On y apprend que, sur l’ensemble des écoles publiques (de l’école élémentaire au lycée) et privées sous tutelles du ministère, il y aurait 606 enfants qui auraient demandé une consultation pour diagnostic de transsexualisme, dont 403 au lycée. Plus de 60 % du total de ces écoles ont pris des mesures particulières, parmi lesquelles : le fait qu’un élève puisse porter la tenue du sexe opposé ou la coupe de cheveux qu’il préfère, qu’il puisse choisir le sexe mentionné sur son étiquette ou tout objet portant son nom, qu’il puisse se changer à l’infirmerie ou dans une salle dédiée, utiliser les toilettes des enseignants ou des toilettes dédiées, qu’il soit appelé par les enseignants par son nom de famille ou le nom personnel qu’il préfère, que les enseignants veillent à respecter son choix de sexe lors de la formation de groupes non mixtes, qu’il puisse suivre un cours différent à la piscine ou bien nager un autre jour, ou encore qu’il puisse porter un maillot de bain du sexe qu’il préfère, que les enseignants privilégient les groupes mixtes pour faire les cours en groupe, etc. La question de l’usage des toilettes, des vestiaires et de la piscine concerne aussi bien l’école élémentaire que le collège ou le lycée27. D’autres mesures spécifiques sont ensuite détaillées : dans le cadre d’un voyage scolaire, l’enfant peut dormir dans une chambre à part, prendre son bain après les autres, les enseignants et les associations de parents d’élèves peuvent être informés de l’accueil d’un-e élève diagnostiqué-e en cours ou lors des cérémonies, ils peuvent appeler un élève avec le suffixe unisexe « san » postposé à leur nom personnel28.

Le document que publie le 30 avril 2015 le ministère, intitulé Mise en œuvre des mesures détaillées concernant les élèves vis-à-vis de la dysphorie de genre demande à l’ensemble des établissements de mettre en place des mesures pour faciliter la scolarité de ces derniers. S’appuyant sur le document Les grandes lignes des mesures pour une prévention globale du suicide, le ministère de l’Éducation s’inquiète de la prévalence du suicide chez les élèves « atteints de dysphorie de genre », sans jamais expliciter le lien entre transsexualité et orientation sexuelle, à l’inverse du ministère de la Santé. Dans ce document de 2015, deux autres mentions rapprochent la dysphorie de genre des minorités sexuelles, sans qu’il ne soit explicité nulle part ce que recouvrent ces dernières et pourquoi les mesures sur la prévention du suicide concernent en particulier les enfants « homosexuels » et les enfants « atteints de dysphorie de genre ». De façon générale, l’indication principale qui revient à plusieurs reprises dans ce document de 2015 est la suivante : les enseignants doivent créer un « climat de confiance où les élèves peuvent facilement demander conseil » (sōdan shiyasui kankyō 相談しやすい環境) et veiller à ne pas adopter une attitude négative (hitei 否定) ou provoquer des railleries (yayu 揶揄) lorsqu’ils parlent de ces sujets ; il leur faut également éviter les discriminations (sabetsu 差別). Ce document semble prendre la mesure de l’homophobie ordinaire présente dans les écoles en indiquant que les enseignants sont les premiers responsables de la rupture potentielle du climat de confiance qui doit les caractériser.

Toutefois, hormis la liste de mesures (qu’on retrouve dans le document de 2014) à destination des élèves trans, aucune indication n’est donnée aux enseignants pour éviter d’avoir une attitude malveillante, et aucune réflexion ne porte sur l’origine de tels préjugés. On en trouvera toutefois la mention dans le Guide pour le personnel enseignant des mesures détaillées concernant les élèves vis-à-vis de la dysphorie de genre, de l’orientation sexuelle et de l’identité sexuée publié le 01 avril 2016, un document de dix pages.

Ce document ne fait que reproduire les informations des précédents avis et directives avant de détailler les questions que peuvent se poser les enseignants. Il reprend ensuite de façon plus détaillée les mesures énoncées dans celui de 2015. Les deux priorités restent ainsi la prise en charge médical de l’élève et la mise en place d’un environnement dans lequel celui-ci pourra « demander facilement conseil » et ne subira pas de discriminations ou de railleries. S’il est précisé qu’il est « nécessaire avant tout que les enseignants comprennent bien l’origine des discriminations », c’est justement l’origine de ces dernières qui ne sont pas explicitées car uniquement présentées à travers le simple renvoi aux textes du ministère de la Justice, qui condamne les discriminations envers les personnes trans. Le ministère de l’Éducation développe ainsi un discours dans lequel les enfants trans sont considérés comme des enfants souffrant de dysphorie de genre et pour lesquels il faut proposer un traitement en vue d’une réassignation sexuelle à l’âge adulte, discours qui s’auto-justifie en faisant référence à la loi spéciale, sans réelle explication, et ce, à plusieurs reprises dans des documents qui se veulent pourtant explicatifs. De façon légèrement différente, les enfants faisant partie des « minorités sexuelles » sont avant tout considérés comme de potentielles victimes de harcèlement. Le discours qui accompagne ces deux catégories, à savoir les enfants faisant partie des « minorités sexuelles » et les enfants harcelés, se veut à visée prophylactique et ne cherche pas à s’interroger sur le rapport entre brimades et sexisme, homophobie et transphobie, ces trois derniers termes n’apparaissant à aucun moment, pas plus que celui de genre. De fait, le ministère de l’Éducation japonais a élaboré une vision dans laquelle la transsexualité et les minorités sexuelles constituent deux entités distinctes, sans rapport avec les normes de genre.

On retrouve cette vision fracturée dans le texte Les grands principes à mettre en œuvre pour la prévention des brimades de 2017. Une unique phrase a été ajoutée par rapport à la version précédente datant de 2013 : « Pour prévenir les élèves concernés par la dysphorie de genre et d’orientation sexuelle/d’identité sexuée, il faut faire connaître les mesures nécessaires dans le cadre scolaire et s’assurer de la compréhension correcte des enseignants ». Cet ajout n’explicite cependant rien, outre la dénomination peu claire apposée aux élèves.

Ce n’est que dans les dernières Instructions générales de 2022 qu’on trouve des explications sur le lien entre harcèlement et homophobie. La section 12.4, que nous avons déjà évoquée, affirme clairement que les minorités sexuelles peuvent faire l’objet de discriminations (sabetsu 差別) ou de préjugés (henken 偏見) qui, dans certains cas, pour des adultes, peuvent être la cause de licenciements injustifiés. Le ministère y exhorte à combattre toute forme de discrimination, en rappelant les orientations énoncées dans Les grands principes à mettre en œuvre pour la prévention des brimades de 2017. On trouve également dans ce chapitre 12 la section 12.1 intitulée « Orientations pour renforcer les mesures destinées à prévenir les crimes sexuels et les violences sexuelles » (Seihanzai seibōryoku taisaku no kyōka no hōshin 性犯罪性暴力対策の強化の方針) qui comporte deux sous-parties : « Loi portant sur la réglementation des exceptions concernant le traitement de la distinction de sexe chez les personnes atteintes de dysphorie de genre » et « L’enseignement de la sexualité à l’école » (Gakkō ni okeru sei ni kan suru shidō 学校における性に関する指導). Alors même que la section 12.4 utilise le vocabulaire juridique et politique en cours et dénonce l’ensemble des discriminations envers les « personnes LGBT », le fait de regrouper les élèves trans et l’éducation sexuelle sous l’intitulé de « prévenir les crimes sexuels et les violences sexuelles » revient à restreindre les perspectives des personnes LGBT à la seule prophylaxie de l’éducation sexuelle et à la prévention des violences sexistes et sexuelles. Si ce cadrage général de 2022 marque un réel tournant, le ministère se garde bien toutefois de franchir l’étape suivante qui aurait consisté à relier de manière claire l’égalité des sexes et la prévention des LGBTphobies – ce qui aurait impliqué de (re)considérer dans son ensemble l’hétéronormativité à l’œuvre dans l’ensemble du système scolaire.

Si l’on résume le contenu des différents documents produits par le ministère, on trouve donc, avant tout, des renvois à la Loi spéciale de 2003, dont les enjeux sont résumés. Puis, plus tardivement, est énumérée une liste de mesures concrètes à mettre en œuvre, concernant l’uniforme, la coupe de cheveux, la salle pour se changer, les toilettes, le prénom, les cours, la natation, le sport, les voyages scolaires, etc., sachant que le suivi psychiatrique est renvoyé aux spécialistes médicaux en dehors du cadre scolaire. L’ensemble de ces mesures converge vers une réassignation sexuelle très claire, sans l’ombre d’un espace pour questionner le parcours de transition des enfants29. Enfin, on trouve un appel à la prévention des brimades. Toutefois, l’appel à la bienveillance du corps enseignant se trouve quelque peu vidée de son sens du simple fait que les concepts d’égalité de sexe et de discriminations envers les minorités sexuelles, ou encore les droits sexuels, ne sont jamais mobilisés.

Conclusion

L’examen des textes sur la prise en compte des élèves trans publiés par le ministère de l’Éducation entre 2010 et 2024 met en valeur deux éléments remarquables. Le premier est que le ministère se contente de s’aligner sur les autres institutions japonaises, du fait de la Loi spéciale de 2003 qui a obligé les différents ministères à prendre en compte les personnes voulant changer de sexe à l’état civil. La médiatisation de plusieurs cas d’élèves trans soutenus par leurs parents et leurs écoles l’a par ailleurs obligé à faire en sorte que l’ensemble des établissements se conforment à cette façon de considérer les enfants mineurs comme des futurs candidats au traitement de réassignation sexuelle.

Le deuxième élément, qui découle du premier, est le constat selon lequel ces mesures relatives à l’intégration des élèves trans se focalisent uniquement sur l’aspect médical et thérapeutique de leur « dysphorie de genre », considérée comme une maladie. De ce fait, la binarité des sexes en sort renforcée : le but de la reconnaissance de ces élèves transsexuels est uniquement de préparer le traitement qu’ils recevront une fois atteint l’âge de dix-huit ans. Pour cette raison également, on retrouve dans les documents du ministère un lien jamais explicité entre les « minorités sexuelles » et les « personnes souffrant de dysphorie de genre », le seul point commun des unes et des autres étant le fait qu’elles sont toutes la cible de brimades ou de harcèlement. Contrairement au rapport publié en 2016 par l’ONG Human Right Watch portant sur les actes de LGBTphobie dans le contexte scolaire japonais30 ou aux rapports du ministère de la Justice et de la Santé31 qui considèrent les questions LGBT en les articulant avec les discriminations envers les minorités sexuelles et l’égalité des sexes ou encore les droits sexuels32, le ministère de l’Éducation continue de distinguer les enfants « souffrant de dysphorie de genre » en les plaçant dans une catégorie à part.

Accueillir les élèves transsexuels ne revient donc pas pour ce dernier à questionner les normes de genre : au contraire, l’idéal type correspond à celui d’un enfant qui changera bientôt de sexe et pourra pour cela entamer une opération de réassignation sexuelle dès sa majorité, ce que permet la loi de 2003. En ce sens, le ministère de l’Éducation préfère encadrer, contrôler et hétéronormer les enfants trans plutôt que de mener une réflexion systématique sur les biais de genre qui caractérisent le système scolaire. Il n’est donc pas surprenant que les enquêtes menées sur le terrain, ainsi que celles à grandes échelles qui s’appuient sur des questionnaires à destination des enseignants et des équipes éducatives, témoignent, toutes, à la fois d’un mal-être chez les enfants et les jeunes concernés, mais aussi chez les parents et les différents professionnels de l’enfance.

Pour le moment, le constat général de la part des enseignants et soignants dans le cadre scolaire demeure celui d’un triple manque d’expérience, de formation et d’information33. On notera toutefois l’augmentation récente de la production académique et non académique sur le sujet – notamment les présentations des groupes d’enseignants sur le sujet, qui peuvent parfois être restituées à l’écrit dans une revue telle que Sexuality (Sekushuariti セクシュアリティ) – issue des travaux du réseau « STN21 », le quasi-acronyme de Sexual Minority Teachers Network of 21th Century. Ce réseau, fondé le 27 janvier 2001, réunit des enseignants LGBT qui s’interrogent notamment sur la façon de présenter les questions de genre et d’éducation sexuelle aux élèves34. Leur production écrite prend son essor au milieu des années 2010 et contribue à informer et former les enseignants qui souhaitent prendre en compte les potentielles questions de leurs élèves non hétérosexuels. Prendre en compte l’expérience de ces enseignants et des élèves trans permet de mesurer l’écart entre les réalités de terrain et le cadrage ministériel. Il reste toutefois, pour bien comprendre cet écart, à étudier le processus d’élaboration de ces documents, pour savoir si des avis divergents existent parmi les hommes politiques, les cadres du ministère de l’Éducation et les hauts fonctionnaires qui ont participé directement ou indirectement à leur rédaction.

Notes

1 Le choix des termes et des traductions pour des occurrences concernant la transidentité sera commenté au fur et à mesure du texte. Retour au texte

2 Ces récentes dispositions juridiques – dont la « Loi relative à la promotion de la sensibilisation aux questions LGBT » (LGBT rikai zōshin hō LGBT理解増進法) de juin 2023 – ne signifient pas pour autant un engagement ferme contre l’homophobie ou la transphobie. Le Japon demeure aujourd’hui le seul État parmi les pays membres du G7 dépourvu d’interdiction de toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Retour au texte

3 On renverra aux législations par exemple du Danemark, de Malte, de l’Irlande, de la Norvège, de l’Islande, de la Belgique et du Luxembourg. On peut penser également aux récents débats menés dans le cadre français, après la proposition et l’adoption de la loi visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre le 28 mai 2024. Retour au texte

4 Henninger Aline et Kobayashi Ami, « From chastity education to the inclusion of sexual minorities? – Textbooks on ethics (dōtoku) and hygiene (hoken) in contemporary Japan », Historia y Memoria de la Educación, n° 18, 2023, p. 181-216 ; p. 207-208. Retour au texte

5 Kasai Makiko, « Sexual and Gender minorities and Bullying in Japan », in T. Russel Stephen et S. Horn Stacey (sous la dir. de), Sexual Orientation, Gender Identity and Schooling: The Nexus of Research, Practice and Policy, Oxford, Oxford University Press, 2016, p. 185-193 ; p. 189-190. Retour au texte

6 On peut se référer aux travaux portant sur les élèves trans que publient Dohi Itsuki, enseignante trans et membre du réseau STN21. Retour au texte

7 Cette loi fait désormais l’objet de nombreuses analyses. On pourra se référer aux articles suivants : Harima Katsuki, Kamikawa Aya, Ōshima Toshiyuki et al., Seidōitsusei shōgai to koseki seibetsu henkō to tokubetsuhō o kangaeru 性同一性障害と戸籍性別変更と特別法を考える (Transsexualisme et état civil, penser la loi spéciale et le changement de sexe), Tōkyō, Ryokufū shuppan 緑風出版, 2013, 213 p. ; Kakimoto Yoshimi, « Eugenics and the politics of procreation in Japan », Contemporary Society (Kyōto joshi daigaku gendai shakai kenkyū), 11, 2008, p. 193-202 ; Norton Laura, « Neutering the transgendered: Human Rights and Japan’Law No. 111 », in Stryker Suzan et Aizura Aren (sous la dir. de.), The Transgender Studies Reader 2, New York, Routledge, 2013, pp. 591-604 ; Seizelet Eric, « Transidentité et droit au Japon », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, 2023, no 5, p. 1137-1365 ; et Taniguchi Kōichi 谷口 功一, « A propos de la nouvelle législation sur le changement de sexe des personnes ayant une dysphorie de genre (Seidōitsuseishōgai no seibetsu no toriatsukai no tokurei ni kan suru hōritsu no hōritsu katei ni kan suru ikkōsatsu 「性同一性障害者の性別の取扱いの特例に関する法律」立法過程に関する一考察) », The Quarterly of Legal Philosophy, 2004, n° 2003, vol. 226, p. 212-220. On trouve également à partir des années 2010 des travaux de recherche des étudiants sur le sujet : Auger Andrea, Gouvernance des corps et des identités transsexuels au Japon. Transidentité et changement d’état civil, mémoire de master 1, sous la direction d’Isabelle Konuma, études japonaises, Institut National des Langues et Civilisations Orientales, 2015, 70 p ; Vinet-Pérez Chris, Transition de genre au Japon : la loi sur le changement d'état civil de 2003, mémoire de master 1, sous la direction de Yves Cadot et Aline Henninger, études japonaises, Université Toulouse Jean Jaurès, 2021, 65 p. Retour au texte

8 http://elaws.e-gov.go.jp/search/elawsSearch/elaws_search/lsg0500/detail?lawId=415AC1000000111&openerCode=1 (consulté en octobre 2024). Retour au texte

9 Taniguchi Hiroyuki, « Japan’s 2003 Gender Identity Disorder Act: The Sex Reassignment Surgery, No Marriage and No Child Requirements as Perpetuations of Norms in Japan », Asian-Pacific Law and Policy Journal, n o 14, 2013, p. 108-117 ; p. 116. Retour au texte

10 Eric Seizelet, « Transidentité et droit au Japon », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, 2023, no 5, p.1137-1365 ; p. 1145. Retour au texte

11 Nous nous permettons ici et dans d’autres contributions un écart de traduction entre le français et le japonais pour rendre compte de l’ambivalence de la traduction officielle du japonais vers anglais du Conseil pour l’égalité des sexes, Gender equality council, qu’on retrouve d’ailleurs dans l’URL du site officiel (en japonais) du Conseil pour l’égalité : https://www.gender.go.jp (consulté en octobre 2024). Cette non prise en compte de l’anglais remarquée ironiquement pour les « fémocrates » de l’époque, dont Mari Ozawa, qui s’autorisent à parler d’égalité de genre (gender equality) dès qu’il s’agit d’un écrit ou présentation en anglais. Retour au texte

12 Kodama Yūji 児玉勇二, Seikyôiku saiban: nanao yōgo gakkō jiken ga nokoshita mono 性教育裁判: 七生養護学校事件が残したもの (L’éducation sexuelle en procès: ce qu’il reste de l’affaire de l’école spécialisée Nanao), Tōkyō, Iwanami shoten 岩波書店, 2009, 63 p. Retour au texte

13 Témoigne de ces atermoiements sémantiques un document explicatif produit par le Parti libéral conservateur (Jimintō) dont les gouvernements en place depuis 2012 reprennent les points de vue conservateurs et néoconservateurs : pour répondre à la question « qu’est-ce que la transsexualité ? », l’accent est ainsi mis notamment sur le fait que cela n’a « rien à voir avec les discours gender free ». La formule et le contenu marquent à la fois la méfiance qui persiste autour du terme (d’éducation) gender free et le fait que la transsexualité ne peut qu’être qualifiée de maladie afin de ne pas détruire le schéma de pensée binaire des rôles sociaux sexués que défendent fermement ce parti ainsi que, plus généralement, l’ensemble de la classe politique conservatrice japonaise. Jimintō 自民党 (Parti libéral démocrate japonais), Seiteki shikō, seidōitsusei (sei ji nin) no tayōsei tte ? Jimintō no kangaekata 性的指向性同一性(性自認)の多様性って。自民党の考え方 (C’est quoi la diversité des sexes, la transsexualité et l’orientation sexuelle : la ligne du Parti libéral démocrate), document au format PDF en ligne sous https://storage2.jimin.jp/pdf/pamphlet/20160616_pamphlet.pdf (consulté en septembre 2024). Retour au texte

14 Kakimoto Yoshimi, « Eugenics and the politics of procreation in Japan », Kyōto joshi daigaku gendai shakai kenkyū 京都女子大学現代社会研究 (Kyoto Women’s University Bulletin Paper), no11, 2008, p. 193-202 ; p. 196-197. Retour au texte

15 Kamikawa Aya 上川あや, Kaete yuku yūki 変えてゆく勇気 (Le courage de changer), Tōkyō, Iwanami shoten, 2007, p. 129-134. Retour au texte

16 Monbukagakushō 文部科学省 (Ministère de l’Éducation), Jidōseito ga kakaeru mondai ni taishite no kyōikusōdan no tettei ni tsuite 児童生徒が抱える問題に対しての教育相談の徹底について (Avis sur l’ensemble des consultations à l’école pour résoudre les problèmes que peuvent rencontrer les élèves), 23 avril 2010, http://www.mext.go.jp/a_menu/shotou/jinken/sankosiryo/1348938.htm (consulté en septembre 2024). Retour au texte

17 Monbukagakushō 文部科学省 (Ministère de l’Éducation), Gakkō ni okeru seidōitsusei shōgai ni kakaru taiō ni kansuru jōkyō chōsa ni tsuite 学校における性統一性障害にかかる対応に関する状況調査について (enquête sur la situation relative aux mesures adoptées pour les personnes présentant les syndromes de transsexualité à l’école), 13 juin 2014, http://www.mext.go.jp/component/a_menu/education/micro_detail/__icsFiles/afieldfile/2016/06/02/1322368_01.pdf (consulté en septembre 2024). Retour au texte

18 Monbukagakushō 文部科学省 (Ministère de l’Éducation), Seidōitsusei shōgai ni kakaru jidōseito ni taisuru kimekomakana taiō no jisshitō ni tsuite 性同一性障害に係る児童生徒にたいするきめ細かな対応の実施等について (Mise en œuvre des mesures détaillées concernant les élèves vis-à-vis de la dysphorie de genre), 30 avril 2015, http://www.mext.go.jp/b_menu/houdou/27/04/1357468.htm (consulté en septembre 2024). Retour au texte

19 Monbukagakushō 文部科学省 (Ministère de l’Éducation), Seidōitsusei shōgai ya seiteki shikō seijinin ni kakaru jidōseito ni taisuru kimekomakana taiō no jisshitō ni tsuite. Kyōshokuin muke 性同一性障害が性的指向・性辞任に係る児童生徒に対するきめ細かな対応の実施等について教職員むけ (Guide pour le personnel enseignant des mesures détaillées concernant les élèves vis-à-vis de la dysphorie de genre, de l’orientation sexuelle et de l’identité sexuée), 1er avril 2016, http://www.mext.go.jp/b_menu/houdou/28/04/__icsFiles/afieldfile/2016/04/01/1369211_01.pdf (consulté en septembre 2024). Retour au texte

20 Monbukagakushō 文部科学省 (Ministère de l’Éducation), Ijime no bōshitō no tame no kihonteki na hōshin いじめの防止等のための基本的な方針 (Les grands principes à mettre en œuvre pour la prévention des brimades), 14 mars 2017, http://www.mext.go.jp/component/a_menu/education/detail/__icsFiles/afieldfile/2017/04/05/1304156_02_2.pdf (consulté en septembre 2024). Retour au texte

21 Depuis la fin des années 2000, les juristes, universitaires et militants japonais utilisent fréquemment l’acronyme SOGI (écrit tel quel en lettres capitale d’alphabet latin), qui provient de l’anglais Sexual Orientation and Gender Identity. Retour au texte

22 Monbukagakushō 文部科学省 (Ministère de l’Éducation), Seito shidō teiyō 生徒指導提要 (Instructions générales pour l’encadrement des élèves), décembre 2022, https://www.mext.go.jp/content/20230220-mxt_jidou01-000024699-201-1.pdf (consulté en octobre 2024). Retour au texte

23 Kōseirōdōshō 厚生労働省 (Ministère de la Santé, du Travail et des Affaires Sociales), Jisatsu sōgō taisaku taikō 自殺総合対策大綱 (Les grandes lignes des mesures pour une prévention globale du suicide), validé le 28/08/2012, https://www.mhlw.go.jp/content/h28h-s2.pdf (consulté en septembre 2024). Retour au texte

24 « Shō ni no aki kara “onna no ko” » 小二の秋から女の子」 (Un élève de deuxième année d’école élémentaire devient “une fille” à partir de l’automne), Mainichi shinbun 毎日新聞, 12/02/2010. Retour au texte

25 « “Kokoro no senyū”. Kyōinra taiō tesaguri「心の先憂」教員ら対応手探り (« Priorité au cœur ». Des enseignants tâtonnent pour trouver des mesures adaptées) », Kôbe shinbun nyūsu 神戸新聞ニュース, 18/05/2006 ; « “Seidōitsusei shōgai” – shō ni “joji” toshite gakkō seikatsu – hyōgo <性同一性障害>小2「女児」として学校生活 兵庫 (« Dysphorie de genre » – la vie scolaire d'une « fille » de 2e année d’école élémentaire (département de Hyôgo) », Mainichi shinbun 毎日新聞, 18/05/2006 ; « Shō ni danji “joji” toshite tsūgaku... seidōitsuseishōgai ni gakkō taiō 小2男児「女児」として通学 … 性同一性障害に学校対応 (Un élève devenue « une élève » fréquente une classe de 2e année d’école élémentaire... Prendre en compte à l’école la dysphorie de genre), Yomiuri shinbun 読売新聞, 18/05/2006 ; et : « Shō ni danji ga joji toshite tsūgaku – seidōitsusei shōgai to shindan 小2男児が女児として通学 性同一性障害と診断 (Un élève devenu une élève fréquente une classe de 2e année d’école élémentaire. Dysphorie de genre et diagnostic) », Kyôdô tsûshisha 共同通信社 (Kyodo News ), 18/05/2006. Retour au texte

26 GID Seidōitsusei shōgaisha gakkai GID 性同一性障害学会 (Association japonaise sur la dysphorie de genre), Seidōitsusei shōgai jidōseito e no taiō ni kan suru yōbōsho 性同一性障害児童生徒への対応に関する要望書 (Lettre de requête à propos des mesures relatives aux élèves ayant une dysphorie de genre adressée au ministère de l’Education,), datée du 21 novembre 2013, disponible en ligne sous https://gids.or.jp/application/files/7515/6488/6308/20131121_.pdf (consulté en septembre 2024). Retour au texte

27 Tatsuta Nanako 竜田奈々子et Tatematsu Maiko 立松麻衣子, « Toransujendā jidō seito no gakkō seikatsu ni okeru seibetsu iwa no shozai to gakkō kankyō seibi no hitsuyō sei トランスジェンダー児童生徒の学校生活における性別違和の所在と学校環境整備の必要性 (La dysphorie de genre en place dans le milieu scolaire pour les élèves trans et la nécessité de mettre en place des aménagements dédiés à l’école) », Nara kyōiku daigaku kiyō 奈良教育大学紀要 (Bulletin de l’Université d’éducation de Nara), 2022, no 71, vol. 1, p. 125-133 ; p. 129. Retour au texte

28 Shimabukuro Kairi 島袋海理, « Seiteki mainoriti ni taisuru Monbukagakushō no shiensaku no ronri – seibetsu iwa to dōseiai no sōiten ni chakumoku shite 性的マイノリティに対する文部科学省の支援策の論理―性別違和と同性愛の相違点に着目して― (La logique des mesures de soutien du ministère de l’Éducation vis à vis des minorités sexuelles : comprendre la différence de traitement entre l’homosexualité et la dysphorie de genre) », Jendā kenkyū ジェンダー研究 (Recherches sur le genre), no 23, 2020, p. 165-183 ; p. 171-173. Retour au texte

29 Dohi Itsuki 土肥いつき, « Toransujendā seito no gakkō keiken – gakkō no naka no seibetsubunka to jendā kattō トランスジェンダー生徒の学校経験-学校の中の性別文化とジェンダー葛藤 (Vivre l’école pour les élèves trans : la distinction de sexe et les conflits de genre au sein du milieu scolaire) », Kyōiku shakaigaku kenkyū 教育社会学研究, n° 97, 2015, p. 47-66 ; p. 47. Retour au texte

30 Human Right Watch, The Nail That Sticks Out Get Hammered Down, LGBT Bullying and Exclusion at Japanese School, rapport disponible en anglais (original en japonais) sous https://www.hrw.org/report/2016/05/05/nail-sticks-out-gets-hammered-down/lgbt-bullying-and-exclusion-japanese-schools (consulté en septembre 2024). Retour au texte

31 Ces ministères utilisaient les termes « minorités sexuelles », « LGBT » et « genre » dans les années 2010 : https://www.mhlw.go.jp/stf/seisakunitsuite/bunya/koyou_roudou/koyou/shougaishakoyou/index_00007.html (article consulté en 2024), https://www.moj.go.jp/JINKEN/jinken04_00126.html (article consulté en 2017 puis consulté en septembre 2024). Retour au texte

32 Hōmushō 法務省 (Ministère de la Justice), Kodomo no jinken o mamorimashō (Protégeons les droits des enfants), https://www.moj.go.jp/JINKEN/jinken04_00107.html (consulté en juillet 2024). Retour au texte

33 Yasukawa Yū 安川優, Kadota Aya門田文, « “Sei no iwakan ya mayoi o kanjiru jidōseito” ni kan suru gakkō no gennjō 性の違和感や迷いを感じる児童生徒」に関する学校の現状 (Situation actuelle de l’école vis-à-vis « des élèves qui hésitent à définir leur sexe ou qui se sentent en désaccord avec leur sexe ») », Ōsaka kyōiku daigaku kiyō 大阪教育大学紀要 (Revue de l’Université d’éducation d’Ōsaka), n° 64, vol. 1, 2015, p. 99-115 ; p. 112-113. Retour au texte

34 Dohi Itsuki 土肥いつき « Sekushuaru mainoriti de aru koto to kyōshokuin de aru koto o kirihanasanai koto: STN21 no kako, genzai, mirai セクシュアルマイノリティであることと教職員であることを切り離さないこと。STN21の過去、現在、未来 (Ne pas séparer le fait que nous soyons à la fois enseignant et minorité sexuelle : passé, présent et futur de STN21) », Gendai seikyōiku kenkyū jānaru 現代性教育研究ジャーナル(Monthly Journal of Sex Education Today), n° 84, mars 2018, p. 1-12 ; p. 1. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Aline Henninger, « (Hétéro)normer et contrôler : les dispositifs du ministère de l’Éducation vis-à-vis des élèves trans », Etudes japonaises [En ligne], 2 | 2024, mis en ligne le 31 décembre 2024, consulté le 22 janvier 2025. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/etudes-japonaises/250

Auteur

Aline Henninger

Rémélice, Université d’Orléans