Maîtriser les airs depuis le sol : la DCA française en 1940

Résumés

De 1918 au milieu des années 1930, l’artillerie antiaérienne française fait l’objet de mesures générales de réduction de format, sans connaître de modernisation dans ses matériels ou d’évolution dans sa doctrine d’emploi. Victime de l’opposition entre l’armée de Terre et l’armée de l’Air nouvellement créée, la défense contre aéronefs (DCA) de l’entre-deux-guerres est l’objet de toutes les convoitises mais fait toujours figure de parent pauvre au sein de son arme de rattachement. De 1935 à mai 1940, en raison de l’entreprise de réarmement de l’Allemagne nazie, la DCA connait l’amorce timide d’un redressement et voit la conception et le début de fabrication de nouveaux matériels. Toutefois, ce sursaut est trop tardif. Les efforts de financement et de production qui sont consentis ne suffisent pas à rattraper le retard technique et à masquer les imperfections de la mobilisation. En février 1940, la nouvelle appellation de « Forces terrestres antiaériennes » qui est donnée à la DCA ne change rien à son état. Avec ses moyens hétérogènes et le plus souvent obsolètes, la DCA française remporte une centaine de victoires face à la Luftwaffe mais ne pèse pas dans la bataille de France.

From 1918 to the mid-1930s, the French anti-aircraft artillery was the subject of general downsizing measures, without having any modernization in its equipment or evolution in its employment doctrine. Victim of the opposition between the Army and the newly created Air Force, the anti-aircraft (AA) of the interwar period was the object of all envy but still appears to be a poor relation within his weapon of attachment. From 1935 to May 1940, due to the rearmament enterprise of Nazi Germany, the AA know a start of recovery and saw the conception and start of production of new weapons. However, this startle is too belated. The funding and production efforts that have been made are not enough to catch up with the technical backlog and hide the imperfections of mobilization. In February 1940, the new name of “Anti-Aircraft Land Forces” which was given to the “counter-aircraft defence” did not change its condition. With its heterogeneous and most often obsolete resources, the French AA won a hundred victories against the Luftwaffe but did not weigh heavily in the Battle of France.

Plan

Texte

Le 13 mai 1940, l’attaque allemande sur Sedan est appuyée par une composante aérienne jusqu’alors inédite : durant toute la journée, plus de 1 500 avions des Ier et IIe Fliegerkörper1 bombardent Sedan et les défenses interdisant le passage de la Meuse. Principalement engagées sur les secteurs belges et néerlandais, les chasses aériennes française et britannique ne peuvent réellement intervenir, tandis que la défense contre aéronefs (DCA) est submergée. Le 13 mai au soir, les Allemands ont établi une solide tête de pont sur la rive gauche de la Meuse, mais aucune unité blindée ne l’a encore franchie. Dès le lendemain, le haut-commandement français lance une contre-attaque. Toute l’aviation de bombardement disponible, soit seulement 38 appareils, est mobilisée pour détruire les ponts sur la Meuse autour de Sedan, que traversent déjà les premiers chars allemands. Mal renseignée et surprise par les tirs de l’artillerie antiaérienne ennemie, l’aviation française, tout comme les éléments terrestres engagés, ne peut stopper la progression allemande : le front est percé à Sedan2.

Contrairement à celle de la Grande Guerre, l’artillerie n’a fait l’objet que de peu de travaux et d’études historiques pour la Seconde Guerre mondiale, souvent occultée par l’intérêt porté aux chars d’assaut et à l’aviation. Au sein même de ces études, ce constat s’applique particulièrement à l’artillerie antiaérienne dont l’hétérogénéité des matériels en service et l’absence de considération de la part du haut-commandement français ne facilitent pas l’appréhension3. Pourtant, le cas d’étude que constitue l’artillerie antiaérienne française est intéressant à plus d’un titre : tant des points de vue matériel, organisationnel, tactique que stratégique, il illustre les forces et, surtout, les carences de l’armée française de 1940.

Cette contribution se propose d’aborder la question de la situation de l’artillerie antiaérienne française de 1940. Pour ce faire, quelques-uns des nombreux fonds du Service historique de la Défense ont été consultés, notamment les archives techniques de l’Artillerie, celles du cabinet du ministre de la Guerre ou encore celles du Grand Quartier général aérien. En outre, nous avons pu nous appuyer sur les travaux de Stéphane Ferrard, sur l’armement français de 19404, et de Jean-Pierre Petit, sur l’artillerie sol-air de la première moitié du xxe siècle5.

Nous nous proposons de nous interroger sur les missions et actions de l’artillerie antiaérienne au cours de la bataille de France en recontextualisant l’évolution de cette arme durant l’entre-deux-guerres et plus particulièrement les dernières années de cette période.

Nous nous intéresserons dans un premier temps à la structuration de cette arme quasi nouvelle que constitue l’artillerie antiaérienne au sortir de la Première Guerre mondiale. Nous évoquerons ensuite l’organisation et les matériels de cette arme à la veille de 1940. Enfin, nous étudierons l’action de l’artillerie antiaérienne française durant la bataille de France. En conclusion, à la lumière de ces axes d’études, nous tirerons les enseignements permettant de comprendre, entre autres, l’échec du 13 mai 1940.

1. La complexe structuration d’une arme nouvelle

Dès 1906, les sections techniques de l’Artillerie et du Génie lancent l’étude d’un matériel et d’une méthode de tir contre les aéronefs. Le projet aboutit à l’adoption de projectiles spécifiques – obus à balles modèles 1911, d’une structure d’affût modifiée pour assurer la défense antiaérienne des ouvrages fortifiés en 1911 et d’un auto-canon de 75 mm en 19136 ; tandis que le capitaine Eugène Pagézy définit les premiers principes du tir contre-aéronefs. Alors qu’aucune structure dédiée et moins d’une dizaine de pièces antiaérienne sont en service à l’été 1914, l’artillerie française compte 830 canons antiaériens7 répartis dans cinq régiments d’artillerie de défense contre les aéronefs (63e, 64e, 65e, 66e et 166e RADCA8) à la fin de la Grande Guerre. Ces pièces sont servies par 51 000 hommes, en quasi-totalité des personnels mobilisés9.

1. 1. Les réorganisations d’après-guerre

À partir du printemps 1919, la démobilisation défait très rapidement cette organisation issue du temps de guerre, suivant les principes énoncés le 16 janvier 1919 lors d’une réunion présidée par le général Pont, major général de l’armée. Il y est notamment décidé que « la DCA devra constituer une subdivision spéciale, rattachée à l’Aéronautique », qu’« il sera créé des unités spéciales de DCA qui devront comprendre toutes les spécialités nécessaires au fonctionnement total de la DCA », et que « l’organisation de la DCA du temps de paix devra permettre à la mobilisation […] de donner aux armées mobilisées les éléments de DCA dont elles auront besoin, [et] d’assurer dès que le besoin s’en fera sentir […] la défense des points sensibles du territoire10. » Le transfert de l’artillerie antiaérienne de l’Artillerie vers l’Aéronautique est alors justifié par le fait « que la DCA doit travailler en liaison permanente avec l’aviation, dont elle doit connaître sans cesse les progrès11. »

Le 5 mars 1919, la DCA devient l’une des sous-directions de l’Aéronautique militaire, au sein du ministère de la Guerre, et comprend toutes les spécialités nécessaires à son bon fonctionnement :

– Les cinq RADCA, avec leurs personnels, leurs matériels et leurs dépôts, qui donnent naissance à cinq régiments de défense contre aéronefs : les 1er, 2e, 3e, 4e et 5e RDCA ;

– La commission d’études pratiques du tir contre objectifs aériens (CEPDCA) ;

– Le cours pratique de tir contre objectifs aériens (qui devient l’école de défense contre aéronefs) ;

– Les centres d’organisation d’artillerie antiaérienne (COAA) ;

– L’établissement central des projecteurs d’artillerie (qui devient l’établissement central de DCA)12.

La sous-direction comprend également les postes de DCA fixes, constitués par un réseau de postes de guet, d’altimétrie et de tir. Ce maillage – adopté en 1921 et reprenant celui conçu en 1917 – est entretenu en temps de paix mais n’est armé qu’en temps de guerre. Le 25 août 1922, une décision ministérielle décide du transfert de l’intégralité de la sous-direction de DCA à l’Artillerie. Comme le souligne Jean-Pierre Petit :

On en sait peu sur les raisons qui furent avancées pour justifier cette réaffectation : influence prépondérante de la direction de l’Artillerie ? Désintérêt de l’Aéronautique pour la DCA terrestre, pour la défense antiaérienne des armées ? Logique de confier aux forces terrestres les moyens de leur propre sécurité antiaérienne ? Problématiques de répartition des crédits militaires et des effectifs13 ?

Ce transfert conduit à une réorganisation des unités de DCA. L’école de la DCA devient le cours pratique de défense contre aéronefs (CPDCA), tandis que les cinq régiments de l’Aéronautique sont dissous et recréés le 1er avril 1923 sous l’appellation de régiments d’artillerie de défense contre avion (RADCA) et numérotés de 401 à 40514.

Depuis l’Armistice, les matériels n’ont pas évolué et le canon de 75 mm sur remorque, plate-forme fixe ou automobile reste de loin le matériel principal. Le rattachement de la DCA à l’Artillerie conduit les artilleurs à proposer un programme de modernisation des matériels en 1923. Adopté le 15 mai 1923, ce programme d’études repose sur l’idée que l’artillerie antiaérienne doit être dotée d’armes spécifiques au regard de chaque type de menace aérienne (bombardement, reconnaissance, chasse…), mais n’est guère suivi de réalisation faute de budgets alloués. Les années 1920 sont en effet caractérisées par la réduction du format des armées et celle-ci n’épargne pas la DCA : en 1929, ses quatre régiments restants (le 404e RADCA a été dissout) ne regroupent plus que dix-huit batteries de canons de 75 mm. En cas de conflit, le plan de mobilisation prévoit théoriquement une rapide montée en puissance de ces régiments, qui doivent mettre en œuvre jusqu’à 84 batteries. Quant aux matériels, les canons de 75 mm hérités de la Grande Guerre doivent parer à toutes les missions15.

Or, depuis 1918, les aviations civiles et militaires ont bénéficié d’importants progrès techniques : l’accroissement de la puissance des moteurs permet la généralisation des monoplans, plus aérodynamiques, tout en augmentant la vitesse, le plafond et le rayon d’action des avions16. Ceux-ci sont renforcés afin d’améliorer la protection de l’équipage et des parties mécaniques. En outre, la spécialisation des appareils amorcée dans la seconde partie de la Grande Guerre est devenue la norme et chacune des missions – reconnaissance, chasse, bombardement, appui, liaison… – est effectuée par des appareils conçus à cet effet. Face à ces modernisations d’importance de l’aviation militaire, la DCA continue d’opposer des matériels datant du premier conflit mondial et, en ce qui concerne les tubes, non conçus pour cet usage.

1. 2. Les années 30 : une volonté de renouveau

Dans le cadre de la politique de défense française, idéologiquement défensive17, la protection de l’espace aérien du territoire n’est pas jugée suffisante par le haut-commandement. Afin de la mettre à niveau, un plan de défense aérienne du territoire (DAT) est adopté le 27 février 1929. La DCA est l’une des deux composantes de cette défense antiaérienne du territoire – celle qui se bat depuis le sol – l’autre étant l’aviation, que gère l’Aéronautique. Ce plan de défense intègre aussi bien les mesures de défense active, du ressort des ministères de la Guerre (incluant l’Aéronautique) et de la Marine, et les mesures de défense passive, du ressort du ministère de l’Intérieur, des municipalités et des industriels. Il prévoit la création de onze zones de défense antiaérienne, la fabrication et le déploiement de 495 batteries de DCA, de 798 sections de mitrailleuses, de dix escadrilles de chasse et de quinze groupes de projecteurs que serviront 3 300 officiers et 160 000 sous-officiers et soldats. Le coût en est estimé à 1 390 millions de francs et la réalisation du plan est étalée sur quinze années.

En raison du manque de crédits – la ligne Maginot absorbe alors une grande part des crédits militaires, du fait que les dépôts soient encore remplis de matériels produits durant la Grande Guerre et de l’insuffisance des capacités industrielles nationales, ce plan de défense aérienne du territoire est remanié et réadopté le 14 janvier 1930. Cette seconde version n’attribue plus à la DCA que 600 millions de francs et les dotations de matériels sont réduites au tiers par rapport au plan de 1929. L’argument doctrinal avancé repose sur l’appréciation de la défense à basse altitude (moins de 1 000 m) : la mitrailleuse Hotchkiss de 13,2 mm modèle 1929 est jugée suffisante18 pour assurer la défense des points sensibles du champ de bataille et des infrastructures navales, terrestres et aériennes. Quant aux groupes de DCA destinés à battre les moyennes et hautes altitudes, ils doivent être dotés du nouveau canon de 75 mm contre aéronefs (CA) modèle 1928. Malgré cette première, et importante, réduction, ce plan subit de plein fouet la baisse des crédits militaires imposée par les radicaux-socialistes, de retour au pouvoir en 1932. N’étant pas prioritaire, ni au sein de l’Artillerie, ni pour l’Aéronautique, la DCA voit sa mise en œuvre décalée19. En outre, avec la création de l’armée de l’Air en 1934, la DCA est l’objet d’un désaccord profond entre les armées de l’Air et de Terre. La première réclame régulièrement à la seconde – sans succès – que lui soit rattachée l’intégralité de la DCA au nom de l’unité d’action dans la troisième dimension20. Toutefois, l’instruction générale du 7 juillet 1936 confirme l’appartenance de la DCA à l’armée de Terre21.

Il faut le poids politico-militaire, mais aussi symbolique, du maréchal Pétain, inspecteur général de la DAT de 1931 à 1934, et du général Duchêne, son adjoint, pour que soit prise en considération la faiblesse de la défense aérienne du territoire français22. En effet, en 1935, malgré le plan de 1930, le déficit de moyens de la DAT par rapport aux missions qui lui sont confiées est toujours important. La majeure partie des nouveaux matériels prévus – canons de 75 mm modèles 1928, 1930, 1932 et 1933 notamment – sont toujours en cours de fabrication. La prise de conscience de mettre à niveau les moyens militaires au regard de ce que produit l’industrie militaire allemande conduit au lancement d’un nouveau programme global d’armement qui va bénéficier en partie à la DAT23. Annoncé le 7 septembre 1936, ce programme réserve 598 millions de francs (sur un total de 14 milliards) sur quatre ans (1937-1940) à la DAT. Il s’attache à moderniser en priorité l’artillerie antiaérienne de moyen et gros calibre : 356 canons de 75 mm modèle 1932 sont commandés, tandis que 400 canons de 75 mm et 124 canons de 105 mm sur plate-forme doivent être modernisés. Au programme de 1936 s’ajoute le programme complémentaire du 2 mai 1938 : plus de 6 000 canons de 25 mm, 34 de 40 mm, 356 de 75 mm et 480 de 90 mm sont commandés, leur livraison s’étendant de 1938 à 1942 – voire 1945 pour les 90 mm24. Alors que l’Anschluss vient d’avoir lieu, et à quelques mois des accords de Munich, ce programme, bien qu’ambitieux, témoigne du manque de clairvoyance français face à la crise européenne en cours.

2. La DCA française à la veille de la Seconde Guerre mondiale : organisation et matériels

En 1939, les missions de la DCA sont clairement définies et s’organisent autour de deux grands principes : surveillance et protection. Le premier consiste en la fourniture de renseignements sur l’activité aérienne de l’ennemi ; le second, en lien avec l’aviation de l’armée de l’Air, est la lutte contre l’ennemi aérien. Pour ce faire, la DCA comprend six régiments de défense contre aéronefs25, ainsi que quelques embryons d’unités au sein de certains régiments d’artillerie de campagne. À partir de la déclaration de guerre, ces unités ont la charge d’assurer le premier rideau de défense antiaérienne ainsi que, lors de la mobilisation, la montée en puissance des unités de DCA. En effet, 90 % des personnels de la DCA sont des mobilisables26 et de nombreux emplacements de tir sont désarmés en temps de paix. La conception que le haut-commandement se fait du conflit à venir est celle d’une guerre longue autour de zones d’opérations stables27. La DCA repose donc sur des réseaux de surveillance fixes et peu de canons mobiles (sur automobiles ou sur remorques) sont en dotation dans les RADCA.

2. 1. La situation au 1er septembre 1939

Au moment de la déclaration de guerre, les premières tranches des commandes passées dans le cadre des plans d’armement de 1936 et 1938 commencent à peine à être déployées dans les unités. L’état de guerre permet d’accélérer les cadences de fabrication dans les usines, mais les industries – qu’elles soient nationales ou privées – atteignent vite leur limite de production. En outre, comme toutes les armes spécialisées, les canons antiaériens et leurs munitions, accessoires de paramétrage des cibles et de calcul de tir, équipements de surveillance, d’alerte et de conduite de tir, et réseaux de communications les reliant forment un système d’arme dont chaque composante est indispensable. Toutefois, cette complexité technique, l’interaction entre les équipements et leurs contraintes logistiques particulières ne sont que très peu prises en compte par le haut-commandement, qui privilégie la production d’armements et de munitions au détriment des appareils annexes, pourtant indispensables28.

L’aspect matériel n’est pas le seul point noir de la DCA. Malgré une mobilisation dûment planifiée et facilitée par l’absence de combats, l’aspect humain est également déficient ; sur le plan quantitatif, mais aussi et surtout sur le plan qualitatif. La très grande majorité des hommes de la DCA provenant de la mobilisation, il en résulte des effectifs militaires peu formés, peu entrainés et qui ne peuvent exploiter toutes les possibilités de leurs armes. Or, comme il n’existe pas de régiments d’active de DAT, la gestion administrative des effectifs mobilisés et leur déploiement (humain mais aussi matériel) vers les 465 batteries fixes théoriquement prévues revient pour l’essentiel aux RADCA. Cette tâche de première importance dans le cadre de la mise en état de la défense du pays s’exerce au détriment de la montée en puissance même de ces régiments, qui doivent, dans le même temps, passer de 16 à 38 groupes d’artillerie. Enfin, l’instruction des mobilisables affectés à la DCA est largement insuffisante, l’état-major comptant une fois de plus sur les personnels d’active déjà fortement sollicités lors de la mobilisation pour les former29. Cette situation tient en grande partie au manque de prestige de la DCA – tant au sein de l’armée que de l’Artillerie. L’arme est en effet considérée comme une spécialité compliquée, fragile – au regard des équipements périphériques spécifiques – et coûteuse. Tout cela conduit à un désintérêt général pour la DCA, à une méconnaissance de ses contraintes techniques et logistiques, et à un manque de formation et d’entrainement pour son personnel30. En cela, elle s’inscrit dans une constante socio-psychologique au sein des armées en faveur des unités les plus mobiles, plus souvent projetées et offrant ainsi plus de possibilités d’avancement31.

Enfin, comme le souligne Jean-Pierre Petit, l’irréalisme quantitatif de toutes ces mesures et leur étalement calendaire prouvent la méconnaissance au plus haut niveau militaire des exigences qui sont particulières à la défense antiaérienne : son aptitude opérationnelle immédiate doit être garantie pour qu’elle soit capable de jouer efficacement son rôle de protection dès l’ouverture des hostilités. Être au rendez-vous opérationnel suppose que tous les matériels prévus aient été réalisés, mis en service, opérationnels et à la hauteur de la menace, et que les personnels mobilisés au profit des unités antiaériennes soient spécialisés, formés et entrainés32. Ainsi, il était prévu de disposer en métropole de neuf RADCA, trois régiments devant compléter les six existants. Cependant, les 408e et 409e RADCA, planifiés pour le 1er octobre 1939, n’ont pas été formés, faute de matériels et d’effectifs instruits ; seul le 407e RADCA vient épauler les six autres. Ces sept régiments regroupent 173 groupes d’artillerie majoritairement dotés de divers modèles de canons CA de 75 mm. Sur le plan organique, ces régiments sont répartis au sein de la 31e (401e, 404e, 406e et 407e RADCA) et de la 32e brigade de DCA (402e, 403e, et 405e RADCA). Quant aux groupes et batteries fixes de la DAT, ils sont organisés en groupements régionaux et placés sous l’autorité de l’armée de l’Air, excepté pour les zones littorales, où ils sont sous celle de la Marine33.

2. 2. La réorganisation du 6 février 1940 et la création des FTA

Bien que généralissime des forces armées françaises, le général Gamelin n’a aucune autorité sur la Marine nationale et l’armée de l’Air. Les divergences de points de vue entre « terriens » et « aériens » sur la gestion et l’emploi de la DCA ne peuvent donc être réglées par le haut-commandement. C’est ainsi qu’en pleine « drôle de guerre » est étudiée puis décidée une nouvelle réorganisation de l’arme antiaérienne. Cette directive datée du 6 février 194034 crée les Forces terrestres antiaériennes (FTA), réparties en trois catégories :

  • Les FTA mobiles opérant dans la zone des Armées, qui dépendent du commandant en chef des forces terrestres ;

  • Les FTA mobiles opérant hors de la zone des Armées et les FTA chargées de la défense de points sensibles sur tout le territoire, qui dépendent du commandant en chef des forces aériennes ;

  • Les FTA de réserve générale, qui sont sous la direction du chef d’état-major général. Ce dernier peut les mettre à disposition de l’un ou l’autre des deux commandants précités.

Cette réorganisation apporte plus de confusion que de solutions aux dissensions existantes au sein du haut-commandement. En effet, les deux principales lacunes de l’organisation française de la DAT ne sont aucunement réglées : il n’existe toujours pas de commandement unique régissant l’emploi de tous les moyens de la défense aérienne du territoire et il n’y a toujours aucune coordination entre l’aviation et les FTA. En outre, compte-tenu des délais de mise en place, la réorganisation est en cours d’application au moment où débute l’offensive allemande. De fait, la nouvelle appellation de « Forces terrestres antiaériennes » donnée à la DCA ne change rien à son état. Ainsi, les missions attribuées aux FTA sont la « couverture aérienne » et le « renseignement », ce qui ne constitue qu’une nouvelle appellation des missions de protection et de surveillance qu’elle opérait déjà.

2. 3. Les matériels en service

Face à l’évolution constante de l’aviation militaire, la DCA ne connaît que des améliorations par à-coup, souvent partielles et sans réelle cohérence. Hérité par défaut de la Première Guerre mondiale, le calibre de 75 mm constitue l’essentiel de l’armement des RADCA, sans pour autant constituer une unité de calibre facilitant les aspects logistiques. D’un point de vue opérationnel, les régiments manquent de canons complémentaires au 75 mm, tant en petits qu’en gros calibres : de fait, la multiplicité des calibres existe, mais en nombre insuffisant, et les tranches d’altitude inférieures à 2 000 m et supérieures à 7 000 m ne peuvent pas être efficacement battues.

Au 1er septembre 1939, 1 809 canons et 709 mitrailleuses sont disponibles dans les RADCA, tandis qu’au 10 mai 1940, grâce aux efforts consentis pour le réarmement35, ces chiffres sont respectivement portés à 2 779 (+ 54 %) et 927 (+ 30 %). Sur les 2 779 canons, 61 % sont du calibre de 75 mm, mais ce calibre est représenté par neuf modèles différents, dont les munitions ne sont pas forcément standardisées – un canon d’un calibre donné n’est pas forcément à même de tirer toutes les munitions de ce calibre, celles-ci étant généralement conçues pour une pièce particulière36. Les pièces de DCA de gros calibres (de 90 à 105 mm) ne représentent que 6,25 % du parc, les 32,75 % restants étant constitués de petits calibres (de 25 à 40 mm)37.

Le parc de mitrailleuses est constitué par trois modèles : la mitrailleuse Hotchkiss jumelée de 13,2 mm modèle 193038, la mitrailleuse Oerlikon de 20 mm CA modèle 193939 et la mitrailleuse de 20 mm CA Hispano-Suiza 40440. L’augmentation du nombre de mitrailleuses concerne uniquement les matériels de 20 mm. Toutefois, la production de munitions, dont ces armes sont extrêmement consommatrices, ne suit pas et l’emploi de ces mitrailleuses a parfois été limité du fait de la pénurie de munitions41.

L’artillerie antiaérienne de petit calibre est la composante qui bénéficie le plus, et de très loin, des fabrications d’armements du début de guerre, passant de 78 à 910 matériels (+ 1 066 %). Les matériels les plus nombreux sont les canons monotubes de 25 mm CA Hotchkiss modèles 1938, 1939, 1940 et bitubes modèle 194042. Cet arsenal est complété par le canon de 37 mm CA Schneider modèle 193943 et les canons de 40 mm Bofors modèles 1938 et 193944 achetés à cet industriel suédois.

Les calibres de 75 mm constituent l’armement de moyen calibre, mais l’hétérogénéité est de mise avec pas moins de neuf types de pièces : canons de 75 mm autocanon modèle 1913 modifié 193445 (dit 13/34), modèle 17/34 sur remorque46, modèle 1930 sur remorque47, modèle 1932 sur plate-forme semi-fixe48, modèle 1933 sur remorque49, modèle 97/39 sur plate-forme50 et modèle 28/39 sur plate-forme51. Enfin, 624 canons de 75 mm – soit près de 37 % de ce calibre – sont des modèle 1915 sur plate-forme52 qui n’ont connu pour modernisation depuis la Première Guerre mondiale que le remplacement, en 1934, de leur appareil de conduite de tir. La période de la « drôle de guerre » permet essentiellement l’accroissement de ce parc en canons de 75 mm modèle 1932 et de 75 mm modèle 1928 (millésime du tube) modifié 1939 (millésime de la plate-forme), le faisant passer de 1 565 à 1 695 matériels (+ 8,3 %). Ces matériels peuvent se classer en deux ensembles : ceux basés sur le tube modèle 1897, qui ont conservé leurs performances initiales calquées sur les caractéristiques des aéroplanes de la Grande Guerre (soit 54 % du parc), et ceux basés sur le tube modèle 1928, seuls à réellement être à la hauteur de la menace constituée par l’aviation militaire des années 1930.

Enfin, l’artillerie antiaérienne de gros calibre, pourtant la moins conséquente, est celle qui subit la plus faible hausse, passant de 166 à 174 matériels (+ 4,8 %). Ceux-ci se composent des canons de 90 mm CA modèle 1939 Schneider53, des canons de 94 mm CA Vickers54, des canons de 105 mm modèles 1917 et 1917 modifié 193455. Ces deux derniers matériels, qui représentent 82 % du parc de gros calibre CA, sont alors obsolètes56 et affectés à la DAT. Seuls les canons de 90 et 94 mm – soit 25 pièces – constituent une DCA de gros calibre moderne en 1940. La mise au point et la production du canon de 90 mm s’éternisant, le gouvernement français achète 20 canons de 94 mm à Vickers en octobre 1939 afin de moderniser la défense antiaérienne de Paris57.

Cette extraordinaire hétérogénéité matérielle de la DCA complexifie la gestion des parcs, le maintien en condition des matériels et leur approvisionnement en munitions adéquates. En outre, cette volonté de renforcer le parc d’armements de la DCA se fait au détriment des matériels de repérage de la menace aérienne, de calculs de tir et de transmission. Cet environnement n’a guère évolué depuis l’Armistice : les postes de repérages, par la vue ou l’écoute, ne sont pas mobiles et la transmission des renseignements s’effectue par le réseau téléphonique civil. À titre de comparaison, la Flakartillerie allemande dispose en 1939 d’environ 8 950 pièces : 6 500 canons de 20 et 37 mm de calibre, et 2 450 canons de 88 à 105 mm de calibre58.

3. 1940 : l’échec et ses raisons

Dès le mois de septembre 1939, l’artillerie antiaérienne française est autorisée à abattre tout avion ennemi59, mais la Luftwaffe ne procède qu’à des reconnaissances à haute altitude : les Dornier 17 qui en sont principalement chargés évoluent donc très souvent hors de portée de tir de la DCA60. La première victoire de la DCA française intervient le 11 octobre, lorsque la 11e batterie du 403e RADCA abat un Heinkel 111.

3. 1. L’artillerie contre aéronefs durant la bataille de France

Du 10 mai au 22 juin 1940, les armées françaises et alliées sont vaincues par l’offensive allemande, contraignant les gouvernements néerlandais, belges puis français à capituler ou à signer une convention d’armistice. Durant cette bataille de France, les FTA subissent les événements, surprises par la stratégie et la tactique aérienne adverse. Leurs personnels découvrent au jour de l’offensive la tactique et la puissance inattendue des raids aériens allemands61, qui submergent leurs unités. En matière de lutte antiaérienne, les réponses apportées par le haut-commandement, dépassé par la vitesse de la manœuvre allemande, sont marquées par une méconnaissance de la situation réelle des armées, tant du point de vue du matériel que de celui du déroulement des combats. Les différentes directives demandent ainsi le concours de toutes les unités à la lutte antiaérienne, tout en prescrivant l’utilisation des canons de DCA contre les blindés62.

Les FTA procèdent donc à des changements fréquents de déploiement, subissant la faillite des réseaux fixes de surveillance et d’alerte et l’obsolescence de leurs armements. À ces graves lacunes s’ajoute celle du manque de mobilité de ces matériels. Un quart de ceux-ci est sur plates-formes fixes et aucun de ceux sur remorques ou autotractés ne dispose d’une vitesse de déplacement supérieure à 40 km/h et n’est apte au tout-terrain : la DCA est donc incapable de s’adapter aux changements rapides imposés par l’intense guerre de mouvement qui caractérise la bataille de France. Face à l’avancée rapide de l’ennemi, les batteries des FTA sont condamnées à l’autoneutralisation ou à la capture. Au 22 juin 1940, la totalité des 57 batteries d’autocanons et des 34 batteries dotées de canons sur remorque modèle 17/34 ont été capturées, ainsi que 98 des 410 batteries de la DAT.

D’après une synthèse rédigée le 24 juin 1940, le bilan global de l’action de la DCA pendant la bataille de France s’établit autour de 300 avions abattus. Les deux tiers des appareils abattus l’ont été entre le 10 et le 20 mai, le régiment le plus actif étant le 404e RADCA, crédité de 98 victoires63. Cependant, ce chiffre de 300 victoires – ce qui représente presque 10 % de la flotte de la Luftwaffe – est à relativiser, tant au regard de la méthode de comptage que de l’opposition fournie, l’aviation allemande effectuant un important nombre de sorties par appareil. Ainsi, Philippe Garraud l’estime à une centaine de victoires tout au plus64. Quant aux bulletins quotidiens de renseignements de l’activité aérienne ennemie listant l’ensemble des bombardements effectués par l’ennemi sur les infrastructures françaises, ils indiquent, en creux, la faiblesse des unités de la DAT65.

3. 2. Des faiblesses latentes

En 1940, l’artillerie antiaérienne française est au cœur de la confrontation de deux conceptions de la manœuvre aéroterrestre. La pensée allemande repose sur une doctrine offensive visant la rupture du système défensif ennemi en un point précis, par la concentration de forces terrestres et aériennes. Cette action est menée par des unités blindées et motorisées, étroitement soutenues par un important appui aérien66.

De son côté, l’armée française n’a pas tiré profit de toutes les opportunités qu’offrent les progrès techniques en matière de mécanisation et d’aéromobilité. En outre, le gouvernement étant marqué par les importantes pertes de 1914-1918, l’institution militaire a appliqué, depuis les années 1920, une doctrine défensive. En premier lieu – en partie du fait du retard technologique et industriel pris par l’aéronautique française dans les années 1920, le rôle même de l’aviation a été minimisé par le haut-commandement, comme en témoigne cette déclaration du général Gamelin, le 28 juillet 1938 : « L’aviation ne jouera pas dans la prochaine guerre le rôle que certains chroniqueurs militaires prévoient pour elle. […] L’aviation dans la prochaine guerre sera un feu de paille…67 » De fait, l’aviation française reste globalement subordonnée à l’armée de Terre, assurant conjointement avec elle la défense du territoire en s’occupant de couvrir le secteur aérien. Dès lors, calquant sa doctrine d’emploi sur celle de l’aviation amie, dispersée tout du long de la frontière et peu mobile, l’artillerie antiaérienne française est totalement surprise par le type d’engagement, massif en un point donné, de l’aviation allemande.

Pourtant, les techniques de bombardement employées par la Luftwaffe en Espagne ont été observées par les Français, sans qu’en soit véritablement tiré de leçons, tant des points de vue doctrinaux que matériels. Ainsi, la DCA française est trop peu efficace contre l’aviation volant à basse altitude (du fait de l’inadéquation de ses instruments de pointage et de calcul de tir) ainsi que contre celle volant à haute altitude (déficit de portée en altitude des matériels de moyen calibre et faiblesse numérique des matériels de gros calibre). En outre, en raison d’un champ de tir vertical n’atteignant que très rarement 90° (la majorité de matériels de moyen et gros calibres ne peuvent tirer au-delà de 78°), cette DCA est relativement vulnérable face aux attaques en piqué. Enfin, la surprise stratégique subie durant la bataille de France est accentuée par deux facteurs : l’extension large et rapide des zones de combats à couvrir par la DCA, qui génèrent une augmentation du nombre d’objectifs à protéger, d’une part, et la diminution constante – par perte, manquements logistiques ou affectation à la lutte antichar – des matériels antiaériens, d’autre part.

Laissée en quasi déshérence depuis 1918, ballottée d’une direction à l’autre, objet de multiples réorganisations et plans d’armement sans lendemains, victime d’un certain désintérêt institutionnel – bien que l’Artillerie et l’armée de l’Air en souhaitent ardemment le contrôle – la DCA est une arme globalement obsolète, tant dans ses matériels que dans son emploi, en 1940. Le parc matériel, même s’il profite du programme d’armement de l’hiver 1939-1940, est très hétérogène et peu qualitatif : les zones de basses et de hautes altitudes sont trop peu battues et les pièces modernes de gros calibres sont quasi inexistantes. Pour tous les calibres, la mobilité fait défaut. Quant à la doctrine d’emploi de la DCA, elle n’a guère évolué depuis 1918 et n’a pas pris en compte les évolutions techniques, tactiques et stratégiques observées chez l’aviation ennemie. La modernisation insufflée pendant la « drôle de guerre » ne permet pas à la DCA d’être une réelle menace pour la Luftwaffe, notamment durant les grandes opérations aéroterrestres menées par cette dernière.

À l’été 1940, en application des conventions d’armistice signées avec l’Allemagne et l’Italie, l’armée française n’est plus autorisée à posséder d’unités antiaériennes en métropole. Aussi, les unités encore existantes sont désarmées et démobilisées, et près de 150 pièces de DCA de divers modèles, ainsi qu’un grand nombre d’équipements sont livrés à l’Allemagne. Enfin, le 5 août 1940, une nouvelle DAT est autorisée par l’Allemagne en zone non-occupée, afin d’assurer la protection des ports de Toulon, Marseille et Sète, ainsi que des principaux terrains d’aviation.

Pour que l’armée française soit dotée de matériels d’artillerie antiaérienne à la hauteur de ceux des autres belligérants, il faut attendre la volonté de réarmement des troupes françaises par les États-Unis et la création du Joint Rearmement Committee (Comité mixte de réarmement), que scelle la conférence d’Anfa au début de l’année 1943. Formée et équipée par les Américains, la DCA de l’Armée française de la Libération peut alors véritablement affronter la Luftwaffe.

Bibliographie

Bertrand Christophe (lieutenant-colonel) et al. (dir.), Comme en 40…, Gallimard, Paris, Musée de l’Armée, 2020.

Collectif, L’Artillerie sol-air. Cahier d’études et de recherches du musée de l’Armée, H.-S. no 8, Musée de l’Armée, Paris, à paraître.

Drévillon Hervé et Wieviorka Olivier (dir.), Histoire militaire de la France. II. De 1870 à nos jours, Perrin, Paris, Ministère des Armées, 2018.

Ferrard Stéphane, Les Matériels de l’armée de Terre française, 1940, 2 tomes, Charles-Lavauzelle, Paris, 1982.

Lombarès Michel de (dir.), Histoire de l’artillerie française, Charles-Lavauzelle, Paris, 1984.

Paoli François-André (colonel), L’Armée française de 1919 à 1939, 4 tomes, Ministère des Armées, Paris, 1969.

Notes

1 À savoir environ 600 bombardiers, 250 Stukas et 650 chasseurs. Retour au texte

2 Frieser Karl-Heinz, The Blitzkrieg Legend. The 1940 Campaign in the West, Annapolis : Naval Institute Press, 2012, ppp. 178-182, Gounelle Claude, Sedan mai 1940, Paris : Presses de la Cité, 1965, pp. 141-266, et Lafontaine Yves (général), La bataille de Sedan, 10-14 mai 1940, « … fors l’honneur », Paris : Éditions de Fallois, 2020, pp. 65-167. Retour au texte

3 Mentionnons cependant, pour l’artillerie française, les travaux suivants : Aubagnac Gilles (lieutenant-colonel), « L’artillerie terrestre de la Seconde Guerre mondiale : quelques aspects des grands tournants technologiques et tactiques et leur héritage », in Guerres mondiales et conflits contemporains, vol. 238, no 2, 2010, pp. 43-59, Aubagnac (dir.), « L’artillerie française dans la campagne de 1940 », ARTI – Dossier histoire, no 15, juillet 2010, Bru Alain, Évolution des matériels militaires, 1939-1945, Caen, Paris : Éditions Mémorial de Caen, Economica, 1990, Collectif, « Souvenirs de la D.C.A. - Novembre 38 - Juin 40 », in Cahiers de l’artillerie antiaérienne, no 38, octobre 1978, pp. 69-70. Notons également que dans l’Histoire de l’artillerie française dirigée par Michel de Lombarès (Paris : Charles-Lavauzelle, 1984), quelques pages (297-299) sont consacrées à l’artillerie antiaérienne de la période 1919-1940. Retour au texte

4 Ferrard Stéphane, Les Matériels de l’armée de terre française 1940, tome 1, Charles-Lavauzelle, Paris, 1982. Retour au texte

5 Petit Jean-Pierre (colonel), « La Première Guerre mondiale » et « D’une guerre à l’autre », in L’artillerie sol-air. Cahier d’études et de recherches du musée de l’Armée, H.-S. no 8, Musée de l’Armée, Paris, à paraître. Retour au texte

6 Ce matériel possède une portée de tir de 5 500 m et une variation de l’angle de tir de 0 à 70°. Retour au texte

7 Plus exactement 760 tubes de canons de campagne de 75 mm modèle 1897 placés sur plates-formes fixes de tir adaptées modèle 1915 ou 1917, sur plates-formes automobiles ou sur remorque, et 70 tubes de canons campagne de 105 mm modèle 1913 placés sur plates-formes fixes de tir adaptées ou sur remorques. Les unités de défense contre aéronefs sont également dotées de mitrailleuses de 8 et de 13,2 mm, de projecteurs et de ballons de barrage. Ces chiffres ne comprennent pas l’artillerie antiaérienne de la Marine, qui comprend 143 canons de 47, 75 et 105 mm. Retour au texte

8 Auxquels il convient d’ajouter le 67e régiment d’artillerie (RA), qui gère l’ensemble des unités de projecteurs, le 501e régiment d’infanterie territoriale, qui regroupe les compagnies de mitrailleuses, et le 2e groupe d’aérostation, qui possède en compte les ballons captifs de barrage. Retour au texte

9 Sur l’artillerie antiaérienne de la Première Guerre mondiale, voir LUCAS Jean (commandant), La D.C.A. (défense contre aéronefs) – De ses origines au 11 novembre 1918, Paris : Éditions Baudinière, 1934. Retour au texte

10 SHD, GR 16 N 22, GQG, Procès-verbal de la réunion du 16 janvier 1919. Retour au texte

11 Ibidem. Retour au texte

12 Décision ministérielle du 5 mars 1919, citée par Petit, « D’une guerre à l’autre », art. cit. Retour au texte

13 Petit, « D’une guerre à l’autre », art. cit. Retour au texte

14 Lombarès Michel de (dir.), Histoire de l’artillerie française, Paris : Charles-Lavauzelle, 1984, p. 297. Retour au texte

15 Ibidem, pp. 297-298. Retour au texte

16 Ainsi pour l’aviation de chasse, en 1918, les appareils les plus performants atteignent les 200 km/h pour une altitude de 6 000 m et une autonomie d’environ 600 km. En 1939, la vitesse dépasse les 600 km/h, l’altitude atteint 12 000 m et l’autonomie 1 300 km. Pour l’aviation de bombardement, en 1918, les appareils les plus performants atteignent les 150 km/h pour une altitude de 5 000 m et une autonomie d’environ 850 km. En 1939, la vitesse atteint les 550 km/h, l’altitude les 8 500 m et l’autonomie 4 000 km. Retour au texte

17 Wieviorka Olivier, « Démobilisation, effondrement, renaissance, 1918-1945 », in Drévillon Hervé et Wieviorka Olivier (dir.), Histoire militaire de la France. II. De 1870 à nos jours, Paris : Perrin, Ministère des Armées, 2018, pp. 338-339, et Garraud Philippe, « L’idéologie de la “défensive” et ses effets stratégiques : le rôle de la dimension cognitive dans la défaite de 1940 », Revue française de science politique, vol. 54, 2004/5, pp. 781-810. Retour au texte

18 Pour autant, l’armée de Terre refuse l’emploi de cette mitrailleuse au prétexte que ses balles, jugées lourdes, risquaient de blesser les soldats en retombant et emploiera, à discrétion, le modèle 1930 quelque peu remanié. Retour au texte

19 Petit, « D’une guerre à l’autre », art. cit. Retour au texte

20 Ibidem. Retour au texte

21 Peu convaincu du choix d’une puissante ligne de défense fortifié, Pétain juge préférable la mise en place d’une importante force aérienne. Retour au texte

22 « Instruction générale sur l’emploi des forces aériennes mises à la disposition de l’armée de Terre et de la DCA des Armées au début des hostilités », 7 juillet 1936, citée par de Lespinois Jérôme (dir.), La Doctrine des forces aériennes françaises 1912-1976, La Documentation française, Paris, 2010, pp. 142-145. Retour au texte

23 C’est dans le cadre de ce programme que sont notamment conçus les chars Hotchkiss H35, Somua S-35 et FCM 36 ou encore les avions Dewoitine D.520 et Morane-Saulnier MS.406. Retour au texte

24 Wieviorka, art. cit., pp. 349-353, et Lombarès, op. cit., pp. 298-299. Retour au texte

25 Après avoir été dissout en 1929, le 404e RADCA a été reformé en 1938, année de la création du 406e RADCA. Retour au texte

26 À titre de comparaison, les mobilisés représentent environ 80 % de l’armée française à l’automne 1939, mais ce pourcentage ne dépasse pas les 70 % en ce qui concerne les affectés aux Armées. Retour au texte

27 Vaïsse Maurice, « La défaite de 1940 était inéluctable », in Lopez Jean et Wieviorka Olivier (dir.), Les Mythes de la Seconde Guerre mondiale, Perrin, Paris, 2015, pp. 40-41. Retour au texte

28 Porte Rémy (lieutenant-colonel), 1940. Vérités et légendes, Perrin, Paris, 2020, pp. 97-104. Retour au texte

29 Petit, « D’une guerre à l’autre », art. cit. Retour au texte

30 Ibidem. Retour au texte

31 Pour imager notre propos, nous mentionnons ainsi l’attractivité supérieure, pour les militaires sortant d’écoles d’application, des chasseurs dans l’infanterie, des hussards dans la cavalerie ou de l’artillerie de campagne dans l’artillerie. Très statique et peu projetable, la DCA souffre d’un déficit d’intérêt. Retour au texte

32 Petit, « D’une guerre à l’autre », art. cit. Retour au texte

33 SHD, GR 27 N 133, dossier no 2, Organisation, emploi et stationnement des FTA (septembre 1939-juin 1940). Retour au texte

34 Instruction générale relative à l’emploi des FTA, 6 février 1940, citée par Petit, « D’une guerre à l’autre », art. cit. Retour au texte

35 SHD, GR 5 N 583, GQG, Programme de matériel concernant les Forces terrestres de Défense anti-aérienne, 10 septembre 1939. Retour au texte

36 Mentionnons également la spécificité des obus et des fusées d’obus conçus pour l’artillerie antiaérienne : ce sont des obus explosifs ou à balles armés de fusées extrêmement sensibles afin d’assurer l’explosion de l’obus lorsqu’il touche, même de manière légère, sa cible. Retour au texte

37 Férrard, op. cit., p. 118. Retour au texte

38 Les caractéristiques techniques de cette arme sont les suivantes : portée utile = 1 500 m, cadence de tir = 900 cps/min, alimentation = deux chargeurs de 30 coups. L’ensemble des caractéristiques techniques citées sont tirées de Férrard, op. cit., pp. 57 et 126-147. Retour au texte

39 Portée utile = 1 200 m, cadence de tir = 460 cps/min, alimentation = chargeur de 20 coups. Retour au texte

40 Portée utile = 1 200 m, cadence de tir = 600 cps/min, alimentation = chargeur de 60 coups. Retour au texte

41 Férrard, op. cit., p. 127. Retour au texte

42 Portée utile = 7 500 m, cadence de tir = de 250 à 600 cps/min suivants les modèles, alimentation = chargeur de 15 coups. Retour au texte

43 Portée utile = 3 000 m, cadence de tir = 175 cps/min, alimentation = chargeur de 8 coups. Retour au texte

44 Portée utile = 3 500 m, cadence de tir = 140 cps/min, alimentation = chargeur de 4 coups. Retour au texte

45 Portée utile = 5 500 m, cadence de tir = 12 cps/min, l’alimentation des canons de calibres égaux ou supérieurs à 75 mm s’effectue toujours au coup par coup. Retour au texte

46 Portée utile = 7 000 m, cadence de tir = 175 cps/min. Retour au texte

47 Portée utile = 7 000 m, cadence de tir = 20 cps/min. Retour au texte

48 Portée utile = 7 000 m, cadence de tir = 25 cps/min. Retour au texte

49 Portée utile = 7 000 m, cadence de tir = 20 cps/min. Retour au texte

50 Portée utile = 5 500 m, cadence de tir = 12 cps/min. Retour au texte

51 Portée utile = 7 000 m, cadence de tir = 20 cps/min. Retour au texte

52 Portée utile = 5 500 m, cadence de tir = 12 cps/min. Retour au texte

53 Portée utile = 11 000 m, cadence de tir = 15 cps/min. Retour au texte

54 Portée utile = 9 500 m, cadence de tir = 10 cps/min. Retour au texte

55 Portée utile = 6 000 m, cadence de tir = 8 cps/min. Retour au texte

56 La modification de 1934 ne concerne que l’ajout d’un poste de tir indirect. Retour au texte

57 Férrard, op. cit., p. 146. Retour au texte

58 Gmeline Patrick de, La Flak : 1935-1945. La DCA allemande, Heimdal, Bayeux, 1986, pp. 86-90. Retour au texte

59 SHD, GR 5 N 583, Instruction provisoire concernant les conditions d’ouverture du feu, destinée aux formations de DAT, 28 septembre 1939. Retour au texte

60 Petit, « D’une guerre à l’autre », art. cit. Retour au texte

61 Les procédés allemands d’attaque aérienne contre les objectifs au sol – notamment le bombardement en piqué – ont évolué dans les années 1930 et ont pu être testés, puis améliorés, durant la guerre d’Espagne. Retour au texte

62 Mentionnons l’action du 5e groupe du 402e RADCA, le 27 mai 1940 à Calais, qui effectue des tirs antichars faisant reculer les blindés allemands et suscitant l’admiration des troupes anglaises. Voir Scherer Rémy, « 402° RADCA », [en ligne] URL : https://artillerie.asso.fr/docs/DIVERS/402%20RADCA%201940.pdf. Consulté le 3 décembre 2020. Retour au texte

63 SHD, GR 27 N 134, Commandement supérieur des FTA, État des avions abattus par les F.T.A. (mai-juin 1940), 24 juin 1940. Retour au texte

64 Garraud Philippe, « L’action de l’armée de l’Air en 1939-1940 : facteurs structurels et conjoncturels d’une défaite », Guerres mondiales et conflits contemporains, vol. 202-203, no 2-3, 2001, pp. 7-31. Retour au texte

65 SHD, GR 9 N 301, Direction de la Défense passive, bulletins quotidiens de renseignements de l’activité aérienne ennemie intéressant le territoire, 18 mai-8 juin 1940. Retour au texte

66 Porte, op. cit., pp. 48-59. Retour au texte

67 Cité par Lanata Vincent (général), Les Jours de mai qui ont fait l’histoire de France, Odile Jacob, Paris, 2018, p. 271. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Christophe Pommier, « Maîtriser les airs depuis le sol : la DCA française en 1940 », Nacelles [En ligne], 10 | 2021, mis en ligne le 10 mai 2021, consulté le 19 avril 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/nacelles/1240

Auteur

Christophe Pommier

Chargé d’études documentaires, conservateur-adjoint au département Artillerie du musée de l’Armée (Paris), enseignant à l’école du Louvre dans la spécialité « Patrimoine et archéologie militaires ». Il travaille sur la guerre de 1870-1871 et sur l’histoire de l’armement, plus particulièrement sur les innovations de l’artillerie aux xviiie, xixe et xxe siècles.
christophe.pommier@musee-armee.fr