Quelles conceptions tactiques pour l’aéronautique navale dans la bataille de France ?

Résumés

À l’ombre de l’historiographie abondante portant sur l’action de l’armée de l’Air pendant la bataille de France (mai-juin 1940), l’aéronautique navale a suscité assez peu de travaux pour elle-même. L’essentiel d’entre eux présentent les actions menées par les appareils de la Marine comme d’inutiles sacrifices causés par l’usage inconsidéré d’avions non conçus pour des missions d’appui tactique au sol. L’improvisation en matière tactique aurait été le facteur aggravant de ces échecs. Au contraire, les exploits de l’avion Jules Verne, premier à avoir bombardé Berlin dans un raid osé, sont encensés. Il est nécessaire de reconsidérer cette perspective historiographique. L’examen de sources plus diversifiées que celles utilisées jusqu’à présent permet de nuancer l’argument d’une improvisation totale, comme le présent article entend le montrer.

In the shadow of a plentiful literature on the operations of the Armée de l’Air during the Battle for France (May-June 1940), the naval aviation (aéronautique navale) by itself seldom attracted scholarship focus. Most of the studies explain the actions of the Navy planes as useless sacrifices caused by the reckless usage of planes whose function was not close air support. Tactical improvisation would have been, then, an aggravating factor. On the opposite, the achievements of the Jules Verne plane, first to bomb Berlin in a daring raid, are praised. It is necessary to reconsider this historiographic paradigm. The examination of more diversified sources than those used until now calls for, as the present article argue, a renewed view about the argument of a tactical improvisation for naval aviation.

Plan

Texte

Introduction

Le 27 juin 1940, l’exemplaire personnel de la Situation et prévisions hebdomadaires des bâtiments de la flotte de l’amiral de la flotte Darlan, chef d’état-major général de la Marine, n’indique même plus où sont situées les différentes formations de l’aéronautique navale : « La situation de l’aéronautique sera donnée ultérieurement1. » Cette note lapidaire évoque une désorganisation importante du commandement de la Marine après les armistices et suggère assez que les forces aériennes qu’elle met en œuvre sont, somme toute, secondaires. Pourtant, elles furent engagées au cœur des combat pendant la bataille de France, notamment dans le théâtre nord.

Il ne s’agit pas ici d’évaluer la part de responsabilité de l’aéronautique navale dans la défaite de 1940, ni pour l’en dédouaner en encensant ses exploits, ni pour l’en accuser. La participation opérationnelle de l’aéronautique navale à la bataille de France est aujourd’hui largement documentée, ne fût-ce que par l’intense activité mémorielle d’associations de marins aviateurs ou par le zèle des passionnés d’aviation2. Dans le cas des opérations les mieux connues, l’activité des escadrilles est parfois scrutée jusqu’à l’action individuelle des aéronefs. Plus rares sont les études d’historiens spécifiquement centrées sur l’aéronautique navale. Il faut citer l’article de Michèle Battesti en 1988, qui fournit une synthèse rapide des opérations à partir des données compilées par Hervé Cras en 19553. Ce dernier, assez représentatif d’un courant historique conscient de l’existence de mémoire conflictuelles dans l’immédiat après-guerre, propose au Service historique de la Marine (SHM) une histoire opérationnelle qui se veut dépassionnée mais dont la méthodologie peut être questionnée. Comme le rappellent Jean de Préneuf et Martin Motte : « Plusieurs des responsables du SHM ont en effet eu des liens étroits avec les responsables de la marine de Vichy et les consultent à l’heure d’en écrire l’histoire4. » L’action de l’armée de l’Air a focalisé l’attention des chercheurs qui, comme en passant, traitent en quelques lignes de l’aéronautique navale, mais l’examinent rarement pour elle-même5.

Les publications existantes sont prolixes sur le déroulement des opérations et narrent avec force détails les usages improbables d’avions torpilleurs contre des blindés, comme les avions de la flottille 5F le 23 mai 19406. D’autres soulignent le « sacrifice » de l’aviation pendant la bataille de France, qu’elle appartienne à l’armée de l’Air ou à la Marine7. D’autres encore exaltent les exploits du Farman 223.4 Jules Verne, dont les bombardements sur l’Allemagne et l’Italie en mai-juin 1940 culminent avec l’attaque de Berlin le 7 juin8. Ces raids, ainsi que l’apologétique du capitaine de corvette (CC) Daillière, commandant l’avion, tiennent une place de choix dans la mise en récit de la bataille de France de l’aéronautique navale9.

Mais peu d’études s’interrogent sur les raisons de ces choix opératifs. La plupart considèrent que l’urgence induite par la rapidité de l’avance allemande a été le principal moteur de l’emploi, parfois contre nature, des appareils de l’aéronautique navale10. Faut-il pour autant considérer, à la suite de Hervé Cras, « qu’il n’existait, en septembre 1939, aucune doctrine officielle en matière de guerre aéronavale ou aéroterrestre et que si une telle doctrine avait existé, les moyens manquaient pour la mettre en application11 » ?

C’est, sensiblement, l’avis d’autres historiens plus contemporains, parmi lesquels Michèle Battesti en 1988, qui considérait que « l’aéronavale [était] sans concept d’emploi très clair12 ». Cette conception est manifestement partagée par les travaux plus généralistes, tels que ceux de Christian-Jacques Ehrengardt.

Il est vrai que les réflexions sur les doctrines militaires dans la France de l’entre-deux-guerres concernent surtout l’Armée ou l’armée de l’Air ; et moins la Marine13. Il s’agira donc ici d’explorer cette piste pour la confronter aux opérations de mai-juin 1940.

Autre difficulté : à l’exception des monographies de René Caroff, peu d’études mentionnent en détail les opérations en Méditerranée ou en Atlantique14. C’est une conséquence de l’attractivité du théâtre d’opération nord, sur lequel se déroulent la plupart des combats. Or l’aéronautique navale ne se limite pas, et loin s’en faut, à des chasseurs ou des bombardiers. Comme l’écrit Christian-Jacques Ehrengardt :

Il faut comprendre que le rôle primordial et initial (celui pour laquelle elle a été créée) de l’Aéronavale (sic) était la surveillance des eaux territoriales, le repérage des navires hostiles, leur interception et leur destruction. À cet effet, en septembre 1939, 312 avions (sur les 362) étaient conçus pour remplir ces différentes missions15.

Il importe donc de prendre en compte de manière plus prononcée les actions des appareils de surveillance et d’exploration pendant la bataille de France, ainsi que celles des théâtres atlantiques et méditerranéens.

La focalisation des études existantes sur les opérations au contact de l’ennemi s’explique en partie par le choix des sources. Les journaux d’opérations (JO), les carnets de vol des appareils et les rapports de certains commandants d’unités sont les documents privilégiés16. Or, ces sources ne sont pas exemptes de fragilités. Les JO sont des documents à portée administrative et morale plus que tactique. Ces comptes-rendus sont destinés à « servir à l’établissement d’un travail d’ensemble » dont la nature n’est pas précisée, selon l’Instruction du 5 décembre 187417. En 1940, ils sont constitués de formulaires que le commandant d’unité est invité à remplir après chaque mission. En tous cas, ils ne sont pas destinés à l’exploitation opérationnelle en état-major, ni à la formation individuelle des officiers18.

Les JO doivent en particulier noter les « actions d’éclat […] dans tout leur détail », de façon à ce qu’elles puissent être « citées plus tard comme exemple à suivre »19. Aussi ne faut-il pas s’étonner de la prévalence des faits de gloire, par exemple les victoires aériennes ou les sacrifices tragiques, dans ces documents. En conséquence, faire l’histoire des opérations uniquement à partir des JO se révèle risqué : on peut être tenté de ne percevoir l’activité d’une escadrille qu’à travers le prisme de ses pertes, de ses « actions d’éclat » ou de ses mouvements.

Les rapports des commandants quant à eux sont souvent rédigés a posteriori et nécessitent une mise à distance critique.

En conséquence, il apparait nécessaire d’ouvrir de nouvelles pistes de recherche pour contourner ces difficultés. L’examen des JO et des rapports de commandants doit être complété par des documents ayant vocation à expliquer les choix de mission. C’est pourquoi chercher des traces de la doctrine d’emploi des forces de l’aéronautique navale semble pertinent ici. Aussi convient-il de relire les événements les plus marquants retenus par l’historiographie à l’aune de sources plus diversifiées.

Ces réflexions liminaires permettent d’établir un questionnement : dans quelle mesure l’emploi de l’aéronautique navale pendant la bataille de France relève-t-il d’improvisations tactiques ou de l’application d’une doctrine, ou à tout le moins d’une réflexion doctrinale préétablie ?

Cette question sera examinée en confrontant les actions les plus emblématiques de l’aéronautique navale en mai-juin 1940 à savoir, d’abord, les missions de combat air-sol et, ensuite, les raids du Jules Verne, à des éléments de doctrine.

I. L’appui au sol au prisme des conceptions tactiques

Parmi les missions les plus marquantes confiées à l’aéronautique navale pendant la bataille de France, figurent le bombardement par l’AB2 et l’AB4 du 19 mai, contre une colonne de blindés allemands, du carrefour routier de Berlaimont20 ; du pont d’Origny-Ste-Benoîte par trois appareils survivants de l’AB2 et AB4, accompagnés de l’AB1 ; enfin des missions des hydravions torpilleurs Latécoère 298 de la 5F contre des objectifs terrestres le 23 mai, pendant la défense de Boulogne21.

À en croire les auteurs qui relatent ces opérations, elles relèvent toutes d’une improvisation tactique22. La Marine avait-elle pu envisager, avant la bataille de France, des situations dans lesquelles ses avions auraient été engagés contre la terre ? À défaut d’une doctrine stable et largement diffusée, il y a bien, contrairement à ce que certains ont pu affirmer, des éléments de doctrine concernant les missions, l’utilité, l’emploi de l’aéronautique navale, à plusieurs échelles.

Les institutions de la Marine constituent une première matrice pour les conceptions d’emploi tactiques des forces de l’aéronautique navale. Selon le décret de 1921 les instituant, l’École de guerre navale (EGN) et son corollaire, le Centre des hautes études navales (CHEN) ont, parmi leurs attributions, l’objectif de rassembler les éléments de doctrine disponibles pour favoriser, à l’usage de l’état-major général de la Marine, une « unité de vue dans les réalisations des conceptions militaires du commandement23 ». Les réformateurs de l’enseignement supérieur naval, en 1921, cherchaient à développer un vivier d’officiers aptes à planifier des opérations de grande envergure, tant à l’échelon tactique qu’à l’échelon stratégique, compétence nécessitant une réflexion poussée dans de nombreux domaines. Dans cette optique, la doctrine est placée au cœur de la mission de l’EGN et du CHEN. L’amiral Ratyé, chef d’état-major général de la Marine en 1925, déclare : « Nos deux écoles seront donc, avant tout, des Écoles de doctrine navale, ou plus simplement des Écoles de guerre navale24 ». Il ajoute :

Le but essentiel et commun des deux Écoles est l’élaboration, l’enseignement et la diffusion de la doctrine de guerre navale en vue d’assurer, à tous les échelons du commandement et dans les états-majors, l’unité de conception de vue et d’action, soit dans la préparation, soit dans la conduite de la guerre25.

Antoine Coudre abonde dans ce sens lorsqu’il déclare qu’« […] en l’absence d’instructions officielles, les cours de l’École de guerre navale et du Centre des hautes études sont ce qui se rapproche le plus de l’expression de la doctrine officielle de la Marine26 ».

En ce qui concerne plus particulièrement l’aéronautique navale, différents types de travaux de l’EGN ou du CHEN reflètent les conceptions tactiques des officiers amenés à les fréquenter : les travaux d’entrée des stagiaires à l’EGN, qui reflètent les vues d’officiers subalternes avant leur passage éventuel à l’EGN ; les cours et conférences qui leur sont proposés, reflétant les conceptions tactiques d’officiers plus expérimentés ; les exercices pratiques, parfois interarmées auxquels ils se livrent ; enfin les études du CHEN, destinés à des officiers ayant une expérience du travail d’état-major.

Mehdi Bouzoumita et Antoine Coudre ont étudié les aspects stratégiques et tactiques des cours et des conférences consacrés aux questions aéronavales dans les années 1920-193027. Ils ont montré l’importance croissante de la réflexion portant sur les questions aériennes à l’EGN, en particulier à l’échelon tactique. Ces cours et conférence donnent à voir une doctrine en cours d’élaboration en fonction des évolutions techniques et de l’usage que la Marine souhaite donner aux forces aériennes. Toutefois, la contribution d’Antoine Coudre arrête l’étude à 1930 et celle de Mehdi Bouzoumita est surtout centrée sur la question stratégique. Medhi Bouzoumita a remarqué, avec raison, que :

Pour les années trente, on ne compte que trois études analysant la portée stratégique de la puissance aérienne : celle, importante, du futur commandant de l’École de guerre navale, le capitaine de corvette (sic) Odend’hal, intitulée Conduite des forces maritimes. La guerre aérienne ; celles des capitaines de corvette Amet, La guerre aérienne en 1938 et Braxmeyer (sic), Considérations sur la guerre aérienne en 193528.

L’étude du CC Amet en 1938 s’inspire très largement de celle du capitaine de vaisseau (CV) Odend’hal, en 1933, dont elle reprend des parties du plan, certains paragraphes entiers et développe les mêmes exemples29. C’est d’ailleurs une pratique qu’avait déjà observée Antoine Coudre pour la période 1920-193030. Cependant, il y a une différence majeure entre les destinataires de ces travaux : la conférence du CV Odend’hal du 23 juin 1933, est produite pour le CHEN, c’est-à-dire à destination des officiers supérieurs. En 1938, l’étude du CC Amet est destinée aux stagiaires de l’EGN, soit des officiers subalternes. Ce constat suggère un changement de culture au cours des années 1930 : la guerre aérienne à l’échelon stratégique n’est plus désormais la seule préoccupation des futurs planificateurs de l’état-major général. Elle concerne également les commandants de l’échelon intermédiaire qui auront à décider de ce que nous appelons aujourd’hui l’échelon opératif. Avec ce glissement, le nombre d’officiers familiarisés avec des réflexions sur l’usage stratégique de l’aviation croît et surtout, cela permet aux commandants d’unités de préparer leurs hommes à des missions dépassant leur théâtre immédiat.

Dans ces deux études sont présentées les théories du général italien Douhet et des éléments de critique31. Parmi les nombreuses considérations abordées, deux nous concernent au premier chef pour la bataille de France. D’abord, le CV Odend’hal affirme la nécessité d’une nombreuse aviation de coopération pour éviter une catastrophe en cas d’incapacité de l’armée française à résister à une invasion allemande :

En cas de conflit franco-allemand, quels que soient les résultats des bombardements aériens, même massifs, exécutés sur certaines villes allemandes, si notre armée est incapable de résister à la marche d’invasion des armées germaniques, l’issue de la guerre ne sera pas douteuse. Il nous faut donc maintenir notre armée à un haut degré d’efficacité et, pour cela, il faut que nos troupes disposent d’une nombreuse aviation de coopération32.

En 1933, ce commentaire peut signifier l’intense effort de la Marine pour s’opposer à ce qu’une armée de l’Air en gestation la prive de ses outils aériens, désignés comme « aviation de coopération33 ». Mais on peut également y voir l’incitation à faire participer les forces aériennes de la Marine à l’appui des troupes au sol en cas d’invasion ennemie. D’ailleurs, le CV Odend’hal développe cette idée un peu plus loin, lorsqu’il détaille l’idée de Douhet d’« attaque brusquée » et des moyens de s’en prémunir :

Indépendamment des changements de garnison du temps de paix qu’il envisage pour mettre nos Forces aériennes en meilleure posture en cas d’attaque brusquée, cet état-major considère que l’issue heureuse ou malheureuse qui constituera la phase initiale d’un conflit, aura, sur le développement ultérieur des opérations terrestres et navales, des répercussions telles qu’il faut être vainqueur dans cette lutte et y appliquer, dans toute sa plénitude, le principe de la concentration des moyens. Toute l’aviation de chasse devra participer à la lutte aérienne initiale. Toutes les escadrilles capables de porter des bombes quelle que soit leur destination future devront y participer34.

On y trouve développée l’idée qu’en cas d’attaque brusquée, la concentration des moyens est une nécessité vitale et que n’importe quel avion capable de « porter des bombes », quel que soit son usage initial, doit participer à l’action contre l’ennemi.

L’idée n’est pas propre au CV Odend’hal : elle figure déjà dans le Cours de tactique appliquée des forces aériennes du capitaine de frégate (CF) Fournié en 1927. Celui-ci s’appuie sur des Instructions provisoires sur l’emploi des forces aériennes de la Marine (v. 1925), dans lesquelles l’article 15 indique :

Quand les circonstances le nécessitent, il est possible d’employer les appareils des diverses catégories énumérées ci-dessus pour des missions autres que la mission à laquelle ils sont spécialement adaptés et entraînés35.

Il cite ensuite l’exemple du Cdt Ménard, qui ralentit une colonne allemande en 1918 en employant « tous les avions disponibles36 ». Doit-on, en conséquence, s’étonner de l’usage d’hydravions torpilleurs contre des objectifs terrestres en mai 1940 ?

En 1938, dans son cours de Tactique des forces de l'aéronautique navale à destination des stagiaires de l’EGN, le CC Amet indique que ce serait une

[…] erreur grave de considérer que les avions ne sont utilisables que pour la mission principale de leur classe. Leur assimilation aux bâtiments de guerre est complète sur ce point, et tous les avions sont aptes à remplir les missions confiées aux forces aériennes en mer, pour autant que l’exécution de ces missions est compatible avec leurs facteurs tactiques propres37.

S’il n’envisage pas directement un appui tactique vers la terre, ce commentaire du CC Amet abonde l’idée d’un caractère relativement interchangeable des avions à disposition de la Marine.

L’avis du CV Odend’hal n’est pas unanimement partagé, à commencer par le CC Amet lui-même. Il indique seulement dans sa conférence sur La guerre aérienne, pourtant très inspirée par celle du CV Odend’hal, que l’aviation de coopération dans la Marine doit « s’attaquer aux flottes, à la mer et au mouillage, et à leurs bases38 ». La focalisation sur les aspects proprement maritimes peut s’expliquer par le fait que la Marine s’est opposée à la création d’une armée de l’Air avant 1934 grâce à l’argument de la spécificité du milieu maritime et des opérations navales39. Ne confier à l’aéronautique navale que des missions liées au milieu maritime était un moyen pour la Marine d’en conserver le contrôle. C’est aussi un argument relatif à son identité, relevant d’un registre culturel40. En 1938, la répartition des moyens de l’aéronautique navale entre la Marine et l’Air a été tranchée par deux décrets : celui du 22 août 1936 et celui 16 mars 1937, complété par l’arrêté ministériel du 17 juin 193741. Le commentaire du CC Amet dans sa conférence pourrait donc refléter un atavisme identitaire lié à l’émergence de l’armée de l’Air plus qu’une véritable considération tactique. Par ailleurs, il n’aborde qu’assez peu les aspects proprement maritimes dans sa conférence, dont la contribution essentielle revient à présenter et critiquer les théories de Douhet sur la maîtrise de l’air. Rien donc, comme chez le CV Odend’hal, qui puisse inciter des commandants à utiliser n’importe quel avion disponible pour arrêter une percée ennemie. On saisit alors les tâtonnements quant à l’utilisation des appareils de l’aéronautique navale au cours des années 1930.

La plupart des cours donnés à l’EGN semblent surtout méconnaître les questions aéronautiques. L’affrontement entre flottes de surface reste la quintessence de la guerre navale. Pour ne prendre que cet exemple, les cours de tactique générale, les plus prestigieux – le professeur de tactique générale est également l’adjoint du directeur de l’EGN, reflètent une pensée navale encore très centrée sur l’action des forces de surface42. Le cours du CV Diaz de Soria, en 1935-1936, témoigne d’un embarras certain quant à l’usage et aux possibilités réelles des forces aériennes :

Il est difficile d’être très affirmatif sur ce sujet, parce que l’expérience réelle de la guerre fait entièrement défaut. Pour asseoir notre jugement, nous ne disposons que des résultats des exercices du temps de paix, dont l’interprétation est toujours objet de controverse.
[…]
Il est bien difficile de prévoir ce que pourra faire l’aviation seule contre les communications. Notre expérience pratique est nulle à ce sujet.
[…]
Il est impossible de dire quels services peuvent être attendus des avions dans cet ordre d’idées43.

La multiplication des marques d’hésitations est représentative de la défiance de l’état-major général de la Marine quant à l’ampleur des missions et l’efficacité de l’aviation. Il est également tout à fait possible que le parc aérien restreint dont dispose la Marine influence cette vision. S’il envisage bien l’utilisation de l’aviation embarquée dans le cadre d’opérations combinées, il nie son utilité pour des missions de bombardements et relativise fortement son impact dans les opérations :

Il est donc absolument indispensable que le corps expéditionnaire dispose, néanmoins, d’une aviation, si réduite soit-elle. Ce ne pourra être, le plus souvent, que l’aviation embarquée. Celle-ci pourra exécuter la plupart des missions d’observation, de reconnaissance et de chasse ; mais fort peu de missions de bombardement ; parce qu’elle est mal outillée pour cela. D’autre part, elle n’est pas très nombreuse. Même en lui demandant un effort exceptionnellement intense pendant quelques jours, elle ne pourra jamais remplacer entièrement l’aviation organique des corps, et encore bien moins l’armée de l’Air. Son emploi n’est qu’un pis-aller.

Deux ans plus tard, le contre-amiral (CA) Marquis ne s’embarrasse pas autant : il cantonne l’aéronautique navale aux missions de sûreté. Elle n’apparaît plus du tout dès lors que son cours aborde les manœuvres d’engagement, la constitution et les moyens de la ligne de bataille et les manœuvres de combat44. Si l’institution chargée de la diffusion de conceptions tactiques efficaces doute autant de l’utilité de ses forces aériennes en 1938, est-il étonnant que son utilisation en 1940 ait été aussi atypique ?

À l’encontre de ces hésitations sur l’utilité de l’aéronautique navale dans les cours de tactique générale, le cours du CC Amet à l’EGN en 1938, déjà évoqué, affirme avec force son utilité45. Cela interroge d’ailleurs sur la capacité de l’École à donner naissance à une « unité de vue » en matière de doctrine. Le cours du CC Amet contient dans sa troisième partie des considérations sur le bombardement ou l’attaque terrestre qu’il eut été utile de lire, mais nous n’avons pas conservé ce livret46.

Ces éléments de doctrine, assez instables il est vrai, sont-ils mis en pratique dans les exercices interarmées ou de grande ampleur menés en 1938-1939 ? Il semble que non.

Les exercices de février 1938 dans la Troisième Région maritime mettent en œuvre des bombardiers en piqué pour l’attaque d’une flotte au mouillage le 3 février, avec un résultat jugé décevant : sur six appareils engagés, quatre sont inutiles car trop vieux et fragiles pour ce genre d’attaque47. L’attaque est dirigée contre une flotte de surface, immobile. Il est bien projeté une attaque combinée d’avions torpilleurs et de bombardiers, de nuit, le 10 février, mais les cibles sont toujours deux flottes au mouillage48. L’aéronautique navale est donc cantonnée dans son rôle d’aviation de coopération ; la conception de l’exercice n’explore pas les pistes évoquées à l’EGN.

L’exercice combiné Marine-Armée des 5 et 6 Juillet 1938 a lieu entre Étel et Penmarc’h sur la côte bretonne. Le commandant du parti bleu, le vice-amiral commandant en chef la Deuxième Région maritime insiste sur l’utilité d’une aviation de chasse pour la défense et rapporte avoir compensé son absence dans son camp par la concentration de « toutes les forces aéronavales disponibles ». Il s’agissait de se prémunir de l’action de l’aviation embarquée du Béarn, aux couleurs du parti rouge. L’emploi des avions torpilleurs de la 1T1 et les bombardiers de la 1B1 est conforme avec leur spécialisation, mais le commandant bleu doute de leur capacité à endommager sérieusement le porte-avions. Il ne lui vient pas à l’esprit de les employer contre des forces terrestres. Formé avant les réflexions du CV Odend’hal ou du CC Amet, le commandant bleu est donc représentatif de conceptions tactiques limitant assez largement l’emploi des forces aéronautiques.

Il ressort de cet examen que, sans négliger la part d’explication conjoncturelle due à l’organisation du commandement entre l’Air et la Marine, aux décisions tactiques manquant parfois de discernement ou à une sidération éventuelle du haut commandement face à la rapidité de l’avance allemande, la Marine a bien envisagé préalablement l’utilisation de tous ses avions en cas d’« attaque brusquée » sur le sol national. Les avions perdus face à l’ennemi à Berlaimont ou à Origny-Ste-Benoîte relèvent d’un cas de figure au moins envisagé par les réflexions doctrinales. Il faut donc nuancer l’idée d’une improvisation totale dans ce domaine.

II. Les raids du Jules Verne : des rarae aves stratégiques

Les raids menés par le Jules Verne sont systématiquement cités quelque soit la nature des travaux postérieurs à la guerre : témoignages et récits à portée mémorielle, travaux d’amateurs passionnés, études historiques. Leur audace, l’impression d’impunité qu’ils ont laissé dans la mémoire collective, leur fureur vindicative en pleine défaite, enfin la persistance de discours laudateurs concernant le CC Daillière, commandant du Jules Verne, expliquent la place de choix qui leur est faite. Le caractère exceptionnel de ces raids a été noté dès le mois de mai 1940, se traduisant le 24 par une citation à l’ordre de l’armée de Mer pour tout l’équipage en ces termes : « Équipage d’élite, d’une hardiesse et d’une bravoure exemplaire. A effectué de nombreux raids de bombardement nocturnes sur des objectifs importants situés à grande distance derrière les lignes ennemies49 ». Pourtant, les effets opérationnels de ces raids restent très modestes : le CA Paul Auphan (Secrétaire d’État à la marine sous le régime de Vichy) et le LV Paul Comet, navigateur du Jules Verne, reconnaissent tous deux que les effets de ces raids sont « surtout psychologiques 50».

Un compte-rendu très minutieux et détaillé des opérations de cet appareil a été établi en 1955 par Hervé Cras51. Il a par ailleurs contribué à la construction de la légende du Jules Verne en donnant une conférence au musée de la Marine en novembre 1954, sous son pseudonyme de Jacques Mordal52. Cette recherche était dirigée par le Service historique de la Marine, lequel a conservé de nombreux courriers demandant aux témoins survivants des renseignements sur les activités du Jules Verne. En parallèle, le succès d’édition du témoignage d’Henri Yonnet, Le Jules Verne, avion corsaire avec quatre éditions entre 1956 et 1983 participe aussi à l’intérêt persistant pour ces raids53.

Le Jules Verne atterrit sur le terrain de Lanvéoc-Poulmic le 8 mai 1940. Il mène ensuite une série de missions de bombardement nocturnes selon un mode opératoire assez constant : après un long vol d’approche au-dessus de la mer, il pique droit sur l’objectif, lâche ses bombes à basse altitude, puis selon les cas fait route vers les lignes françaises sans détour ou repart par un itinéraire maritime. Placé sous les ordres de l’amiral Nord, il bombarde Aix-la-Chapelle et Maastricht dans la nuit du 13 au 14 mai et recommence la nuit suivante. Sont ensuite bombardés Walcheren les 18-19 mai, à nouveau Aix-la-Chapelle les 19-20 mai, Flessingue les 25-26, la forêt de Clairmarais les 26-27 mai. Le mauvais temps compromet un raid sur Anvers-Flessingue les 29-30 mai et un autre sur Flessingue les 30-31 mai.

L’amirauté reprend alors le commandement direct du Jules Verne et l’utilise le 3 juin comme explorateur et protecteur du paquebot Ville-d’Oran, transportant un important chargement d’or vers Casablanca. Dans la nuit du 7-8 juin, le Jules Verne mène avec succès un raid de bombardement sur Berlin. Puis, les 10-11 juin, sur Rostock. L’amirauté lui désigne alors des cibles en Italie : les 13-14 juin, bombardement de Porto Maghere, près de Venise, puis de la base navale de Livourne, les 15-16 juin. À chacun de ces deux voyages, l’avion a survolé Rome pour lancer des tracts.

Dans quelle mesure les missions assignées au Jules Verne relèvent-elles d’un emploi exceptionnel ou à l’inverse, préalablement envisagé, d’aéronef à long rayon d’action par la Marine ?

Si l’on reprend les cours de l’École de guerre navale, on constate qu’en 1927 déjà, le CF Fournié, évoque une « aviation spéciale pour le bombardement de nuit » :

Les Instructions prévoient à l’article 14 une « aviation spéciale » pour bombardements lointains de nuit, constituée par les unités organisées et équipées spécialement pour l’attaque des bases ennemies. Ces appareils beaucoup moins vulnérables aux réactions aériennes de l’ennemi que les bombardiers de jour pourront se contenter de qualités de vol moindres et d’un armement plus réduit. Ce seront de « gros porteurs54 ».

Cette description correspond presque exactement aux missions assignées au Jules Verne en mai-juin 1940. Dans sa conférence au CHEN de 1933, le CV Odend’hal explique :

L’un des meilleurs procédés de défense est probablement la menace des représailles […] Il nous faut donc une solide aviation d’action lointaine capable de rendre immédiatement coup pour coup55.
[…] Le meilleur moyen pour assurer notre tranquillité est probablement de déclarer que nous nous livrerons à des représailles et de posséder l’outil capable de les exercer56.

Cette vision stratégique, influencée par les thèses douhetistes (« aviation d’action lointaine ») porte en elle les germes des raids du Jules Verne sur l’Allemagne et l’Italie.

Avant même d’être confrontés aux cours de l’EGN, les officiers souhaitant l’intégrer proposent des travaux d’entrée dont certains reflètent un intérêt pour les raids stratégiques et l’emploi d’unités à long rayon d’action. Henri Daillière lui-même intègre l’EGN pour la session 1938-1939 après avoir présenté un mémoire sur L’Utilisation des hydravions de croisière Latécoère 302 et ses enseignements57. Bien que ce type d’appareil soit sa spécialité – il commande au moment de la rédaction de son mémoire le Latécoère 302 Cavalier-de-Cuverville au sein de la E4 – il n’est pas le seul à s’y intéresser58. En 1935-1936, le lieutenant de vaisseau (LV) Suquet propose un mémoire sur L’Emploi des hydravions de grande autonomie et le LV Huber sur Les Possibilités tactiques et stratégiques de l’hydravion de gros tonnage 59. À la différence de Daillière, ils n’intègrent pas l’EGN, mais leurs travaux montrent une communauté d’intérêts quant à l’emploi des hydravions d’explorations. Les hydravions de croisière (plus de 10 000 t) sont alors les seules unités de fort tonnage possédées par la Marine : le Farman 223-4, avion terrestre, n’est réquisitionné qu’à la déclaration de guerre.

Les LV Suquet et Huber commencent tous deux leur section de chapitre consacrée aux missions de combat par le bombardement. Le premier différencie le « bombardement lourd » du simple bombardement, plutôt destiné à une lutte anti-navire. Globalement, il émet des réserves considérables quant à l’utilité au combat des grands hydravions60. Cependant, le LV Huber considère l’usage des grands hydravions comme une option tactique particulièrement intéressante :

[…] des trajets de nuit au-dessus de la mer permettent d’envisager des raids nocturnes sur des points sensibles éloignés avec le maximum de discrétion, de surprise, et le minimum de risques.
En diminuant le rayon d’action, on peut augmenter la charge d’explosif, et envisager des opérations de bombardement de nuit à l’intérieur des terres, avec une escorte pour réagir contre la chasse de nuit adverse […]. Étant donné le poids d’explosif qu’il peut emporter, et qu’il est utilisable indépendamment de l’état des terrains de départ, nous n’avons pas le droit de ne pas envisager l’utilisation de l’hydravion de gros tonnage en bombardier même contre des objectifs terrestres61.

Il décrit ainsi en quelques lignes ce qui sera le mode opératoire du Jules Verne en mai-juin 1940 : des raids de bombardement contre la terre, effectués de nuit, en survolant la mer pour l’approche. Ces exemples, bien qu’émanant d’officiers subalternes qui ne sont pas admis à l’EGN, montrent bien qu’il existe un terrain de réflexion actif à la fin des années 1930 portant sur l’emploi au combat des appareils de fort tonnage.

Dans les cours et conférences de l’EGN, la question du bombardement stratégique est bien abordée, même si cela reste succinct : la doctrine de la Marine se veut exclusivement navale. Une exception existe avec le CC Amet qui, dans sa conférence sur La guerre aérienne, en 1938, indique bien que des unités de bombardement isolées et bombardements de nuit sont plus efficaces :

Ne pouvant briser la défense ennemie, on pourra essayer de la tourner, soit en effectuant le bombardement de jour avec des groupements moins nombreux et constitués d’avions très rapides, soit en agissant de nuit. La première solution est la plus généralement préconisée aujourd’hui. Après avoir examiné les théories de Douhet, le Colonel Matricardi, commandant l’École de bombardement de Turin, estimait que l’emploi d’avions isolés et de petites patrouilles était d’un rendement bien supérieur à l’attaque massive, sur des objectifs de petites dimensions.
Les bombardements nocturnes ne peuvent pas être effectués par des flottes aériennes aussi importantes que celles auxquelles Douhet rêvait. Dans ce cas, l’effet de masse est bien diminué et le tir ne peut plus être précis62.

Il précise également l’opportunité de cibler les « centres politiques et démographiques » de l’ennemi63. À nouveau, ces réflexions correspondent au mode opératoire du Jules Verne.

En dehors de l’EGN et du CHEN, d’autres acteurs réfléchissent également à l’action de l’aviation de bombardement. Les intenses débats soulevés par l’énonciation des thèses de Douhet et par l’émergence de l’armée de l’Air ont également touché la Marine. Pour ne citer que cet exemple, l’ingénieur maritime Camille Rougeron vante en 1936 les mérites du bombardement de petite envergure, mais répété dans le temps, et dont l’impact moral est plus important que les dommages matériels64.

Quelle est la mise en application de ces conceptions tactiques ? Lors de l’exercice mené en Méditerranée du 1er au 6 février 1939 et mettant en scène la France et le Royaume-Uni contre l’Italie et l’Allemagne, le « Bulletin de renseignement n°1 » destiné à la direction de l’exercice fait mention d’un bombardement de représailles le 5 février, sur Palerme, après un bombardement à Tunis65. Le troisième bulletin évoque à nouveau un bombardement, sur Tripoli66. Ces documents n’indiquent pas si le bombardement est effectué par l’aéronautique navale ou l’armée de l’Air. On peut noter malgré tout l’intérêt pour le bombardement de représailles. L’exercice reste centré sur le cœur de la pensée navale française de 1939 : l’action des forces de surface.

En revanche, dans les escadrilles pendant la « Drôle de guerre », le constat n’est pas le même. En changeant d’échelle et en travaillant au niveau de l’escadrille, on peut voir un intérêt croissant vers le bombardement terrestre. Un sondage effectué sur l’activité de l’escadrille d’exploration E3 à partir du journal des opération de l’unité, entre septembre 1939 et juin 1940, montre qu’il y a de plus en plus d’exercices de bombardement sur but fixe67. On en dénombre 53 occurrences dans la période, contre 21 exercices de bombardement sur but remorqué, sur balise phoscar ou mené avec des sous-marins. La progression des exercices de bombardement sur but fixe est assez parlante : 2 exercices en octobre 1939, 8 en novembre, 13 en janvier 1940, 1 en février, 4 en mars, 13 en avril, 6 en mai. À titre de comparaison, les missions de guerre, indiquées par la mention « opérations » en rouge dans le journal des opérations sont au nombre de 196 sur la période. Cela donne un ratio d’environ une mission d’exercice de bombardement sur but fixe pour trois missions de guerre pour les avions de la E3. Parfois, une opération est d’ailleurs suivie par un tel exercice. Ces entraînements intensifs reflètent un vif intérêt du commandement de l’escadrille pour le bombardement sur but fixe par les gros hydravions d’exploration (Bréguet 521). Au-delà des missions de surveillance et de sûreté pour lesquelles on les a conçus, on envisage leur emploi pour le bombardement, y compris terrestre. À cela il faut ajouter les 13 exercices de vol de nuit réalisés sur la période, corroborant l’intuition d’une utilisation des hydravions d’exploration comme appareils de bombardement : repérer une force de surface à la mer, de nuit, même en Méditerranée, est très malaisé ; espérer repérer un sous-marin dans ces conditions est illusoire.

Un autre sondage dans l’escadrille E2, dotée du même appareil mais basée à Cherbourg-Chantereyne, montre une emphase moins grande sur les exercices de bombardement, qui d’ailleurs ne précisent pas souvent la nature de la cible68. On note simplement un pic en avril et mai 1940 avec 4 et 5 exercices de bombardement contre une moyenne de 2 les autres mois. Cela peut être expliqué par les très nombreuses missions de guerre réalisées par ces appareils.

Ces exercices montrent que l’intérêt pour les missions de bombardement menées par les appareils de fort tonnage et à long rayon d’action se maintient tout au long de la période. Aussi les raids du Jules Verne, tout exceptionnels qu’ils aient été, s’inscrivent-ils dans un continuum de réflexion de la part de la Marine sur l’utilisation optimale de ses gros avions en dotation.

Conclusion

Pour l’aéronautique navale, la bataille de France remet en cause la planification d’emploi établie pendant les années précédant le conflit. Certains officiers ont bel et bien envisagé des opérations d’appui tactique telles qu’elles ont été entreprises dans le nord de la France. D’autres ont longuement réfléchi sur l’emploi des unités à long rayon d’action comme unités de bombardement.

Certaines de ces réflexions en matière de conception tactique sont évoquées à l’EGN et au CHEN. Mais les officiers qui échouent à intégrer ces institutions prestigieuses témoignent d’un intérêt pour la doctrine de l’aéronautique navale. Les commandants d’unités d’exploration, par les missions qu’ils assignent à leurs appareils, montrent un tropisme vers le bombardement qui dépasse la fonction pour laquelle ils ont été conçus.

Les choix d’emploi tactique qui paraissent uniquement guidés par l’urgence d’une situation intenable ou par le désir de vengeance, sont envisagés et macérés avant le conflit. Certes, les voix de ces officiers ne sont pas majoritaires, mais elles existent bel et bien.

Sans qu’il soit possible d’affirmer qu’une conception d’emploi claire existe pour les différentes composantes de l’aéronautique navale en mai-juin 1940, il est important de nuancer les explications fondées uniquement sur la notion d’improvisation tactique.

Notes

1 Amirauté, 3e Bureau, Situation et prévisions hebdomadaires des bâtiments de la flotte à la date du 27 Juin 1940, Exemplaire n° 1, p. 19. SHD-MV TTA 279. Retour au texte

2 Parmi d’autres publications, on peut citer (par ordre chronologique) : Icare. Revue de l’aviation française, n° 60, 1972, « La Bataille de France, Vol. V : L’Aéronavale, première partie » ; Idem, n° 61, 1973, « La Bataille de France, Vol. VI : L’Aéronavale, deuxième partie » ; Morareau Lucien, « L’aéronautique navale française de septembre 1939 à juin 1940 », Avions, Hors-Série n° 1, 1994 ; Ehrengardt Christian-Jacques, « L’Aviation Française, 10 mai 1940 », Aéro Journal magazine, n° 1 Spécial, Juillet 1997, pp. 1-14 ; Idem, « mai-juin 1940 : autopsie d’une débâcle », Aéro-Journal. Histoire de l’aviation, n° 2, août-septembre 1998, pp. 4-37 ; Vercken Roger, Histoire succincte de l’aéronautique navale : 1910-1998, ARDHAN, Paris, 1998 (1992) ; Desgouttes Norbert, Les Commandements de l’aéronautique navale (1912-2000), ARDHAN, Paris, 2001 (1994) ; Macquet Victor, « Le Sacrifice de l’Aéronautique navale à Berck : mai 1940 », Cahiers de l’ARDHAN, n° 3, 2003. Retour au texte

3 Battesti Michèle, « L’aéronautique navale et la campagne de France (mai-juin 1940) », Revue Historique des Armées, n° 172/4, 1988, pp. 26-29 ; Cras Hervé, Les Forces maritimes du Nord (1939-1940), Vol. II Les opérations des Forces maritimes du Nord du 10 mai 1940 au 4 juin 1940, Service historique de la Marine, Vincennes, 1955, p. 149. Retour au texte

4 Concernant une historiographie empreinte d’une certaine nostalgie de l’État français, dont Hervé Cras fut l’un des représentants particulièrement actifs, voir Jean-Baptiste Bruneau, « “Gloria victis”. L’écriture de l’histoire navale de la Seconde Guerre mondiale », Revue d’histoire maritime, n° 10/11, 2010, pp. 357-366 », Jean de Préneuf « Neptune et Clio : le Service historique de la Marine 1919-1974 », Revue historique des armées, n° 216/3, 1999, pp. 3-20 ; Jean de Préneuf et Martin Motte, « L’écriture de l’histoire navale à l’époque contemporaine : un modèle national », Revue historique des armées, n° 257/4, 2009, pp. 27-43 ; Thomas Vaisset, « L’impuissance navale au musée ? La “Royale” et la Seconde Guerre mondiale au Musée national de la Marine », in Patrick Louvier (dir.), Neptune au musée. Puissance, identité et conflits dans les musées maritimes et navals, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013, pp. 97-115. Retour au texte

5 Par exemple, Garraud Philippe, « L’action de l’armée de l’Air en 1939-1940 : facteurs structurels et conjoncturels d’une défaite », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 202-203, 2001, pp. 7-31 ; Idem, « Les contraintes industrielles dans la préparation de la guerre de 1939-1940. La modernisation inachevée de l’aviation française », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 207, 2002, pp. 37-59. Dans sa synthèse sur l’armée de l’Air, Patrick Facon n’évoque pas l’aéronautique navale du tout dans le chapitre consacré à la défaite de 1940 : Facon Patrick, Histoire de l’armée de l’air, La Documentation française, Paris, 2009, pp. 139-170. Retour au texte

6 Cras Hervé, Les Forces maritimes du Nord, op. cit., vol. 2, pp. 144-146 ; Lamiot Jacques, « Hydravions torpilleurs contre panzer », Icare, n° 61, 1973, pp. 106-114. On trouvera un tableau résumant l’action des différentes unités dans Morareau Lucien, « L’aéronautique navale française… », op. cit., pp. 15-84. Retour au texte

7 Par exemple, Ehrengardt Christian-Jacques, « Bilan et chronologie de l’Aéronavale en guerre », Icare, n° 61, 1973, pp. 38-73 ; Idem, « Mai-juin 1940… », op. cit., p. 19. Retour au texte

8 Yonnet Henri, Le Jules Verne, avion corsaire, Éditions France-Empire, Paris, 1956 ; Auphan Paul, « Quand la Marine française bombardait l’Allemagne », Icare, n° 61, 1973, pp. 90-91 ; Comet Paul, « Sur Berlin avec Daillière », Icare, n° 61, 1973, pp. 92-101. Retour au texte

9 Sur Daillière en particulier : Taillemite Étienne, « Daillière (Henri-Laurent) », Dictionnaire des marins français, Tallandier, Paris, 2002 (1982), pp. 121-122. Retour au texte

10 Cras Hervé, Les Forces maritimes du Nord, op. cit., vol. 2, p. 149 ; Ehrengardt Christian-Jacques, « Mai-juin 1940 : autopsie d’une débâcle », op. cit., p. 19. Retour au texte

11 Cras Hervé, Les Forces maritimes du Nord, op. cit., p. 149. Retour au texte

12 Battesti Michèle, « L’aéronautique navale », art. cit., pp. 26-29. Retour au texte

13 Par exemple, pour l’Armée : Doughty Robert, The Seeds of Disaster. The Development of the French Army Doctrine 1919-1939, Archon Press, Hamden (Connecticut), 1985 ; Kier Elizabeth, Imagining War: French and British Military Doctrine between the Wars, Princeton (New Jersey), Princeton University Press, Princeton, 1997 ; Alexander Martin S., « French Grand Strategy and Defense Preparation », in Ferris John, Mawdsley Evan (dir.), Cambridge History of the Second Word War, Vol. 1 Fighting the War, Cambridge University Press, Cambridge, 2015, pp. 78-106 ; Garraud Philippe, « L’ombre portée de 1914-1918 dans les années 1930. La définition d’une conception différente de la guerre », Vingtième siècle, n° 104, 2009, pp. 17-27. Pour l’armée de l’Air, Vivier Thierry, La Politique aéronautique militaire de la France. Janvier 1933-septembre 1939, L’Harmattan, Paris, 1997 ; Garraud Philippe, « Le rôle de la “doctrine défensive” dans la défaite de 1940 : une explication trop simple et partielle », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 214, 2004, pp. 97-123. Retour au texte

14 Les opérations sur les théâtres atlantique et méditerranéen sont présentées par Caroff René, Les Forces maritimes de l’Ouest 1939-1940, Service historique de la Marine, Vincennes, 1954 ; Idem, Le Théâtre atlantique, 2 Vol., Service historique de la Marine, Vincennes, 1958-1959 ; Idem, Le Théâtre méditerranéen, Tome 1 : Du 2 septembre 1939 au 25 juin 1940, Service historique de la Marine, Vincennes, 1960. Retour au texte

15 Ehrengardt Christian-Jacques, « Bilan et chronologie de l’Aéronavale en guerre », Icare, n° 61, 1973, pp. 38-73. Lucien Morareau prend aussi en compte cet aspect : Morareau Lucien, « L’aéronautique navale française… », op. cit., p. 15. Retour au texte

16 Lucien Morareau le dit clairement : Ibid. p. 15, mais les autres travaux s’inspirent directement de ces sources ou des synthèses produites par Hervé Cras ou René Caroff. Retour au texte

17 État-major général, 3e bureau, « Instruction pour la rédaction des historiques des corps de troupe », Versailles, Ministère de la Guerre, 5 décembre 1874. Ce texte concerne l’Armée et non la Marine, alors constituée en un ministère propre. Cependant, compte tenu de la situation de pandémie et de l’application stricte de l’IG-1300 par le SHD, il ne nous a pas été possible, dans le cadre de cette recherche, d’avoir accès à un document produit par le Ministère de la Marine. Retour au texte

18 « Journal des opérations. Escadrille d’exploration E3. Bizerte-Karouba », du 14 novembre 1938 au 15 juin 1940 ; SHD, MV TTV 4 : « Le journal d’opérations doit être rempli après chaque vol. Il fait foi en ce qui concerne l’escadrille, permet le contrôle de cette activité (rapports périodiques) et des vols accomplis par le personnel. Le compte rendu de chaque vol doit être rédigé personnellement par le Commandant d’appareil qui signe. En ce qui concerne le Bréguet Bizerte, l’Officier en second de l’appareil peut en préparer la rédaction. Le Journal est signé toutes les semaines (Lundi) par le Commandant d’Escadrille. En particulier, ne pas oublier de noter : 1. Indication générale sur la nature de l’exercice en précisant s’il y a lieu (Ex : Tir n° 11) ; 2. Chargement de l’appareil (combustible-armement) ; 3. Pour les bombardements : le Pilote, l’Observateur, le nombre de bombes larguées par chacun ; 4. Pour les tirs : les noms des tireurs et postes occupés par eux ; 5. Pour l’entraînement au pilotage de jour : le nombre d’amerrissages […] ; 6. Pour les vols de nuit les indications : sur piste ou au large, par nuit lunaire ou stellaire, le nombre d’amerrissages fait par chaque pilote et la nature de ces amerrissages ; 7. Les observations éventuelles sur le fonctionnement de l’hydravion, de ses moteurs, de la TSF, instruments de bords, etc. ». Retour au texte

19 État-major général, 3e bureau, « Instruction… », op. cit. Retour au texte

20 Sur le mode de désignation des escadrilles, voir Desgouttes Norbert, Les Commandements de l’aéronautique navale, op. cit., pp. 159-163. Retour au texte

21 Cras Hervé, Les Forces maritimes du Nord, op. cit., vol. 2, pp. 144-146, 278-279. Retour au texte

22 Comme nous l’avons précisé en note 17, le contexte particulier de pandémie dans lequel cette étude a été conduite n’a pas permis d’avoir accès à toutes les archives souhaitées, parmi lesquelles les archives opérationnelles. Retour au texte

23 Ministère de la Marine, « Décret du 2 mai 1921 », Journal officiel de la République française, 6 mai 1921, article 5 : « La mission essentielle de l’EGN est de former aux fonctions d’état-major. Elle a pour objet de les préparer au commandement et de développer leur culture militaire. Elle doit enfin assurer l’unité de vue dans les réalisations des conceptions militaires du commandement. » Retour au texte

24 Cité par Monaque Rémy, L’École de guerre navale, Service historique de la Marine, Vincennes, 1995, p. 48. Retour au texte

25 Ibid., p. 49. Retour au texte

26 Coudre Antoine, « Prédécesseurs et collègues de Castex. Les cours de stratégie et de tactique de l’École de guerre navale de 1920 à 1930 », in Coutau-Bégarie Hervé (dir.), L’Évolution de la pensée navale VIII, ISC Économica, Paris, 2007, pp. 215-250. Retour au texte

27 Bouzoumita Mehdi, « Intégration du fait aérien par l’enseignement supérieur naval dans l’entre-deux-guerres », Stratégique, n° 102/1, 2013, pp. 101-130 ; Coudre Antoine, « Prédécesseurs et collègues… », op. cit., pp. 229-238. Retour au texte

28 Bouzoumita Mehdi, « Intégration du fait aérien… », op. cit., p. 110. Retour au texte

29 CV Odend’hal, Conduite des forces maritimes. La guerre aérienne, Centre des hautes études navales, 1933, SHD, 1CC 203 ; CC Amet, La guerre aérienne, op. cit. Je n’ai pu consulter pour cet article les travaux du CC Braxmeyer, car il est absent du carton censé le contenir : SHD-MV, 1CC 229. Retour au texte

30 Coudre Antoine, « Prédécesseurs et collègues… », op. cit., p. 234. Retour au texte

31 Sur Douhet, voir la récente contribution de Nacelles, n° 9, 2020 [en ligne], http://revues.univ-tlse2.fr/pum/nacelles/index.php et la présentation des différents courants de réception de son œuvre dans Vivier Thierry, La Politique aéronautique militaire de la France, op. cit., pp. 152-169. Retour au texte

32 CV Odend’hal, Conduite des forces maritimes. La guerre aérienne, op. cit., p. 10. Retour au texte

33 L’idée est d’ailleurs martelée un peu plus loin dans la conférence, p. 20 : « En tout cas, si l’armée de Terre […] n’est pas au contact pendant les premiers jours de la guerre avec le gros des forces ennemies et est peut-être à même de consentir pendant ce délai une certaine réduction de son aviation de coopération, il n’en est pas de même pour la Marine. Dès le premier jour, les opérations navales commenceront avec la même intensité qu’ultérieurement. Au cours de la crise stratégique du début des hostilités, avec les servitudes qui lui sont imposées à cette période par suite des transports de troupe, notre flotte a absolument besoin de son aviation auxiliaire et elle ne peut pas consentir à des prélèvements sur l’aviation maritime au bénéfice de l’armée aérienne indépendante ». Retour au texte

34 Ibid., pp. 19-20. Retour au texte

35 CF Fournié, Cours de tactique appliquée des forces aériennes, Vol. I Historique : Rôle et moyens de l’Aéronautique maritime ; Missions de combat, EGN, 1927, p. 61. Disponible en ligne : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k97600020.r=r%C3%A8glement%20manoeuvre%20a%C3%A9ronautique%20navale?rk=21459;2. Retour au texte

36 Ibid., p. 63. Retour au texte

37 CC Amet, Tactique des forces de l’aéronautique navale, Partie 1, École de guerre navale, 1938, p. 12. SHD-MV, 1CC 210. Le soulignement figure dans le document. Retour au texte

38 CC Amet, La guerre aérienne, op. cit., p. 8. Retour au texte

39 Sur ces querelles, voir Hodeir Marcellin, « Les partisans de l’aviation navale face aux thèses de l’air intégral (1919-1932) », Revue historique des armées, n° 181/4, 1990, pp. 98-107 ; Querel Philippe, « Les relations entre l’aéronautique militaire et la Marine, de l’incompréhension à l’entente forcée (1919-1932) », Revue historique des armées, n° 233, 2003, pp. 41-52. Retour au texte

40 Sur l’utilisation de la doctrine comme élément d’identité, voir E. Kier, Imagining War, op. cit., passim. Retour au texte

41 Ministère de la Marine, « Décret du 22 août 1936 », Journal officiel de la République française, 26 août 1936 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65501716/f5.item.r=ao%C3%BBt%20ao%C3%BBt.zoom ; Idem, « Décret du 16 mars 1937 », Journal officiel de la République française, 21 mars 1937 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65507392/f12.item ; Idem, « Arrêté ministériel du 17 juin 1937 », Journal officiel de la République française, 23 juin 1937 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6550922g/f23.item. Retour au texte

42 Décret du 2 mai 1921, op. cit., article 4 : « L’officier général commandant l’École et le Centre des hautes études est secondé dans ses fonctions par l’officier de Marine chargé des cours de stratégie et de tactique navale ». Retour au texte

43 CV Diaz de Soria, Cours de Tactique Générale, 3 parties, École de guerre navale, 1935-1936, SHD-MV, 1CC 203, pp. 29, 32, 33. Retour au texte

44 CA Marquis, Cours de tactique générale - IIe Partie. Manœuvres tactiques modernes, École de guerre navale, 1937-1938, SHD-MV, 1CC 205, Titres III, IV et V. Retour au texte

45 CC Amet, Tactique des forces de l’aéronautique navale, op. cit. Retour au texte

46 Ibid., Partie 3, d’après le sommaire introductif. Le carton ne contient malheureusement que les deux premières parties, les parties 3 et 4, traitant des missions de combat et de l’aviation embarquée, sont manquantes. Retour au texte

47 Porte-Avions Béarn, Compte rendu d’exercice, 3 février 1938. SHD-MV, 1BB4 92. Retour au texte

48 BAN d’Hyères, Ordre d’opérations, Hyères, 8 février 1938. SHD-MV, 1BB4 92. Retour au texte

49 Ordre 1192/FMF 3 du 24 mai 1940, Amiral de la Flotte Darlan, SHD, MV TTV 4. En tout, le CC Daillière est trois fois cité à l’ordre de l’armée de Mer et une fois à celui de l’armée de l’Air, cf. Mordal Jacques (Cras Hervé), « Henri Daillière et le premier bombardement de Berlin », Conférence au musée de la Marine de Brest, 9 novembre 1954, SHD-MV TTV 4. Retour au texte

50 Auphan Paul, « Quand la Marine française », op. cit., p. 91 ; Comet Paul, « Sur Berlin avec Daillière », op. cit., p. 99. Retour au texte

51 Cras Hervé, Les Forces maritimes du Nord, op. cit., vol. 2, pp. 291-298. Retour au texte

52 Voir note 48. Un écho de cette conférence peut être trouvé dans la presse locale : « Un curieux point d’histoire », Le Télégramme, Brest, 10-11 novembre 1954, pp. 3 et 6. Retour au texte

53 Yonnet Henri, Le Jules Verne, avion corsaire, op. cit. Retour au texte

54 CF Fournié, Cours de tactique appliquée des forces aériennes, op. cit., pp. 61-62. Retour au texte

55 CV Odend’hal, Conduite des forces maritimes. La guerre aérienne, op. cit., p. 15. Retour au texte

56 Ibid., p. 27. Retour au texte

57 Je n’ai pas consulté ce mémoire pour le présent article. Il est conservé au SHD-MV, 1CC 294. Retour au texte

58 Desgouttes Norbert, Les Commandements de l’aéronautique navale, op. cit., p. 151. Retour au texte

59 LV Suquet, L’Emploi des hydravions de grande autonomie, EGN, 1935-1936 ; LV Huber, Les Possibilités tactiques et stratégiques de l’hydravion de gros tonnage, EGN, 1935-1936. SHD-MV, 1CC 293. Retour au texte

60 LV Suquet, L’Emploi des hydravions…¸ op. cit., pp. 17-18. Retour au texte

61 Les Possibilités tactiques et stratégiques de l’hydravion…, op. cit., pp. 30-31. Retour au texte

62 CC Amet, La guerre aérienne, op. cit., pp. 50-51. Retour au texte

63 Ibid. : « Du fait que la maîtrise de l’air ne peut plus être obtenue en quelques heures, la doctrine de Douhet reçoit une rude atteinte. Néanmoins elle se justifierait si les forces aériennes capables de porter sur les centres politiques ou démographiques des coups assez puissants, assez soudains pour contraindre la nation ennemie à capitaliser (sic) ». Retour au texte

64 Camille Rougeron est cité dans Le Goyet Pierre, « Évolution de la doctrine d’emploi de l’aviation française entre 1919 et 1939 », Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, n° 73, 1969, p. 13. Sur la doctrine stratégique de Camille Rougeron, voir d’Abzac-Epezy Claude, « La pensée militaire de Camille Rougeron : innovations et marginalité », Revue française de science politique, n° 54/5, 2004, pp. 761-779. Retour au texte

65 « En représailles, bombardement de palerme par avions volant bas et venant de la mer. – Gros incendie sur la ville ». Bulletin de renseignement n° 1, Direction de l’exercice. SHD-MV, 1BB4 92. Retour au texte

66 Bulletin de renseignement n° 3, Direction de l’exercice. SHD-MV, 1BB4 92. Retour au texte

67 « Journal des opérations. Escadrille d’exploration E3. Bizerte-Karouba », du 14 novembre 1938 au 15 juin 1940 ; Idem, du 16 juin au 12 août 1940. SHD-MV TTV 4. Retour au texte

68 « Journal des opérations. Escadrille d’exploration E2. Cherbourg-Chantereyne », du 3 juillet 1939 au 9 juillet 1940. SHD-MV TTV 4. Retour au texte

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Référence électronique

Camille Bataille, « Quelles conceptions tactiques pour l’aéronautique navale dans la bataille de France ? », Nacelles [En ligne], 10 | 2021, mis en ligne le 10 mai 2021, consulté le 24 avril 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/nacelles/1229

Auteur

Camille Bataille

Docteur en histoire, professeur d’histoire-géographie, Officier de réserve de la Marine nationale, SHD. CRAHAM (UMR 6273).
camillepj.bataille@gmail.com