Entretien avec Justo Bolekia Boleká

  • En torno a las diásporas guineoecuatorianas en el mundo: política, imaginarios y literaturas. Entrevista con Justo Bolekia Boleká

Les spécialistes sont d’avis qu’il est difficile d’aborder la formation sociale et culturelle Guinéo Equatorienne sans prendre en compte l’importance de ses diasporas dans le monde. Notre recherche portant en partie sur la Guinée Équatoriale, nous avons voulu aborder cette question avec le professeur Justo Bolekia Boleka dans un entretien écrit, et la situer dans les temporalités actuelles.

Los especialistas están de acuerdo para reconocer que todo estudio sobre la formación social y cultural Guineo Ecuatoriana debe necesariamente tomar en cuenta la importancia de sus diásporas en el mundo. Ya que parte de nuestra investigación integra la Guinea Ecuatorial, quisimos abordar esa cuestión con el profesor Justo Bolekia Boleká en esta entrevista escrita y situarla en las temporalidades actuales.

Specialists agree to recognize that any study on social and cultural formation of Equatorial Guinea must necessarily take into account the importance of its diasporas in the world. Since part of our research integrates Equatorial Guinea, we wanted to address this issue with Professor Justo Bolekia Boleká in this written interview, and place it in the current temporalities.

Texte

Je vous remercie cher professeur d’avoir généreusement accepté, grâce à la médiation de mon directeur de thèse, de répondre par écrit à mes questions au sujet des diasporas noires. Je me centrerai davantage, si vous me le permettez, sur la formation des diasporas Guinéo-Équatoriennes dans le monde après l’accession de votre pays à l’indépendance en 1968. Vous pouvez répondre partiellement ou entièrement à mes questions en espagnol si vous le souhaitez parce que ce numéro, si j’ai bien compris, accueillera aussi des communications dans cette langue.

1. Est-ce que vous faites une différence nette entre les termes d’exil, de migration et de diaspora ? Dans les travaux universitaires portant sur la Guinée Equatoriale, leur usage n’est pas toujours discriminé j’ai l’impression.

Cela fait plus de 44 ans que je suis « exilé ». Je considère l’exil comme le départ forcé qui impose un séjour aussi forcé marqué, comme c’est souvent le cas, par un rêve de retour, même si celui-ci n’a jamais lieu ou a rarement lieu.

L’Union Africaine définit la Diaspora Africaine (Amériques/Caraïbes) comme la sixième région du continent. C’est une réalité communautaire nouvelle que j’ai dû appréhender, et qui me fait toujours penser à ma citoyenneté post-africaine. On assume le fait d’être culturellement Africain malgré une absence à vie ou durable. Nous ne sommes pas inclus dans cette réalité communautaire nouvelle et nous évitons notre isolement avec notre adhésion inconditionnelle à la nature diasporique.

Quant à la migration, je la vois comme un besoin de se déplacer pour des raisons économiques, familiales, académiques, etc., lesquelles conditionnent notre retour ou notre rentrée au terroir, au pays natal, comme dirait Aimé Césaire.

2. Je prépare actuellement une thèse de doctorat dans laquelle je mets en perspective votre pays, La Guinée Équatoriale et le Guatemala, à partir de la littérature ; l’histoire postcoloniale des deux pays y occupe une place importante aussi. J’ai ainsi pu remarquer dans mes recherches que la formation des diasporas en Guinée Équatoriale semble très liée à la terreur exercée en post-colonie par Macías Nguema (1968-1979) et, par la suite, par Teodoro Obiang (depuis 1979 jusqu’à l’heure actuelle). Pouvez-vous revenir sur cela s’il vous plaît en indiquant les moments-clé de cette terreur, le nombre estimé des personnes qui ont dû fuir le pays, les destinations où ces personnes ont trouvé refuge et se sont installées et ce qu’il en est actuellement ?

La historia postcolonial de Guinea Ecuatorial está llena de episodios violentos desde aquel 5 de marzo de 1969. Pero previamente a esa fecha ya se respiraba un ambiente de crispación entre los protagonistas de los partidos políticos en liza que buscaban dirigir los destinos del nuevo país africano. El ganador de esta contienda política, Francisco Macías Nguema, de la etnia fang de Rio Muni, aprovechó, por él inventado, el golpe de Estado del 5 de marzo de 1969 para acabar con sus adversarios políticos, muchos de quienes ocupaban cargos como ministros, secretarios de Estado, etc., y sembrar el terror en todo el país.

Entre 1969 y 1979 todo quedó paralizado a nivel educativo, cultural, económico, religioso, etc. Hubo quema y cierre de iglesias, violaciones, asesinatos, exilios, etc. La fuerte impresión traumática que se llevaron quienes lograron salir del país les marcaría para siempre como testigos directos y víctimas de tanta violencia.

Desde agosto de 1979 hasta la fecha ha habido momentos en los que hubo cierta esperanza de que la vida iba a ser normal en Guinea Ecuatorial. El boom del petróleo desde 1995 hasta ahora, hizo que muchos exiliados regresaran al país. Sin embargo, en materia de derechos humanos y su violación, así como la discriminación étnica, o la persecución de los considerados intelectuales y pro-occidentales, por parte de quienes en su momento formaron parte del aparato represor (las milicias en marcha con Macías) y que eran miembros muy influyentes en los sucesivos gobiernos del nuevo y ya vitalicio hombre fuerte de Guinea Ecuatorial, Teodoro Obiang Nguema (sobrino del primer presidente Macías Nguema), nada cambió fundamentalmente.

Si con el primer presidente, los exiliados guineoecuatorianos fijaban su residencia en España, en Camerún, en Gabón o en Nigeria, con el golpista Teodoro Obiang Nguema los nuevos exilados guineoecuatorianos buscaron otros lugares, como Francia, Estados Unidos, Inglaterra, etc. Se calcula que el número de exiliados ronda los 50 mil.

3. Pensez-vous que la constitution de ces diasporas a pu changer la perception que les Africains en général ont de la Guinée Équatoriale et, inversement, le regard que les habitants de votre pays portent sur l’Afrique noire ? Je me rends compte, par exemple, que ce n’est que très récemment que votre pays existe publiquement dans mon pays la Côte d’Ivoire, notamment au Département des Études Ibériques où on enseigne et étudie son histoire et ses littératures.

Sauf dans les pays voisins (Cameroun et Gabon), la Guinée Équatoriale n’existait pas dans le contexte académique africain. L’organisation de congrès et rencontres internationaux par les enseignants-chercheurs « africains » aux États Unis et ailleurs, notamment en Espagne, avec la participation des écrivains Guinéo-équatoriens, a attiré l’attention des enseignants-chercheurs Africains. Ceux de la Diaspora et ceux de l’Afrique ont trouvé chez ces écrivains l’occasion de résister au « néo-colonialisme » de la langue espagnole encore très dissociée des réalités autochtones directes ou indirectes des étudiants et enseignants.

Quant à la connaissance de l’Afrique par les Guinéo-équatoriens, celle-ci doit être associée au retour des exilés après le coup d’état mené par le neveu (Obiang Nguema) du premier président (Macías Nguema) en 1979. Un autre aspect dont il faut tenir compte est le boom du pétrole découvert en Guinée Équatoriale dans les années 90. Les informations transmises par les médias internationaux et africains de ce nouveau « El Dorado » a accéléré la connaissance de la Guinée Équatoriale ainsi que l’ouverture sur le reste de l’Afrique chez les Guinéo-équatoriens. De là à vouloir traduire exactement le regard qu’ils portent sur elle… je ne m’y risquerai pas et vous comprendrez aisément pourquoi.

4. Certaines études établissent un lien entre l’exercice de la terreur par le pouvoir dictatorial du « Tigre » et de la « Panthère » et l’éclosion en diasporas, surtout en Espagne, de la littérature écrite moderne de la Guinée Équatoriale. Pouvez-vous revenir là-dessus et sur l’importance de cette genèse dans la compréhension et appréciation globales de cette littérature qu’on dit désormais émergente ?

La producción literaria durante los años de la dictadura de Macías Nguema (de 1968 a 1979) fue muy exigua y se cuentan con los dedos de una mano (y sobrarían dedos) los escritores guineoecuatorianos que lograron publicar algo. Habrá que esperar a los años ochenta para asistir al inicio de una eclosión en lo que se refiere a las escrituras guineo-ecuatorianas.

5. Dans cette littérature, et dans la vôtre, car vous écrivez aussi, dans ces différentes expressions (romans, contes, poésie, théâtre, essais), quelle place occupe l’idée de diaspora et comment s’y manifeste-t-elle ?

La publicación de novelas, poesía y cuentos por parte de los escritores guineoecuatorianos de la diáspora (muchos de ellos tenían ya – y tienen – la nacionalidad española) estuvo durante mucho tiempo (y sigue siendo así) en el centro de las actividades literarias. En algunas ocasiones, algunos escritores tenían que recurrir a la autoedición para publicar sus obras, debido a la existencia de escasas editoriales capaces de arriesgarse en una empresa sin lectores asegurados. El tema de la diáspora, del regreso añorado o imposible siempre permeó esas obras. A veces ya desde sus títulos uno se da cuenta de ello. En las antologías (Donato Ndongo y Mbare Ngom, entre otros) sobre las literaturas guineo-ecuatorianas usted se dará cuenta de ello.

6. Dans les différentes discussions critiques informelles que nous avons parfois entre membres ekobias.os du Groupe de Recherches et d’Étude sur les Noir.e.s d’Amérique Latine (GRENAL), j’ai l’impression que l’on accorde beaucoup d’importance à la diaspora en tant qu’alternative critique, transformations, que ce soit au plan culturel ou politique. Êtes-vous d’accord avec cela ? Mais peut-on oublier que vivre en diaspora, comme dans le cas des personnes de votre pays, peut aussi conduire à une perte de repères, à une logique d’accommodement, à l’expression exacerbée d’une mélancolie passive par rapport au « pays perdu », par rapport au pays d’avant ? Il y a là aussi une question de générations et de la durée de vie politique des dictateurs en Guinée Équatoriale. Vu la dernière réforme constitutionnelle, en 2011, je crois, le Président actuellement en exercice peut normalement diriger votre pays jusqu’en 2030. Sans compter sa succession qui sera peut-être assurée par un de ses fils.

Es verdad que se concede mucha importancia a la diáspora guineo-ecuatoriana. Pero eso era antes (entre 1969 y 2015) y a nivel político. Sin embargo, desde que los escritores empezaron a crear sus obras desde dentro del país, la producción literaria de la diáspora va cediendo paso a las creaciones autoeditadas del interior. Además, el hecho de que exista mayor información, presentación y difusión de tales obras a través de las redes sociales, está sirviendo para que los escritores de la diáspora sean eso, escritores de la diáspora, y en quienes va habiendo ya una débil referencia a la transformación social del país en sus obras.

7. L’Afrique dans son ensemble est sujette à la formation des diasporas. C’est le cas dans mon pays aussi. D’après vous qu’est-ce que cela dit de notre Continent et croyez-vous aussi que cela ait pu donner lieu à une vision plus complexe de l’Afrique ?

El sueño de la salvación de África a través de la diáspora es un sueño político con una fuerte carga económica y mediática. Cada vez son más los escritores africanos que escriben desde África, al igual que cada vez va habiendo necesidad de escribir para los africanos reales que, lamentablemente, no son todavía profundamente alfabetizados. Esto ha provocado el debate entre literaturas africanas « reales » y « ficticias », es decir, lo que debe entenderse por literaturas africanas escritas en lenguas africanas, o literaturas africanas escritas en lenguas extranjeras. Sean cuales sean estas literaturas africanas, todavía siguen compartimentadas, cada una tiende a restringirse a su espacio neocolonial. Poco se sabe de las literaturas escritas desde las otras diásporas de África. Desde el punto de vista económico no veo hasta el momento iniciativas concretas y fundantes que unan las diásporas negras con África y la inversa. No sé si los « retornos » a Benín, Gana, Sierra Leone, Liberia, por citar estos ejemplos, dieron lugar a un « gran abrazo fraternal ». Hay que seguir investigando ello.

8. Quels rôles politiques et culturels ont joué et jouent les femmes dans les diasporas équato-guinéennes ? Je n’ai pas vraiment l’impression qu’on parle souvent de cela.

En tant qu’écrivaines de la diaspora (il y a eu deux ou trois) elles ont aussi participé à la création de l’imaginaire littéraire de la Guinée Équatoriale. On parle beaucoup d’elles dans le monde académique étasunien, mais moins en Espagne et je ne sais pas ce qu’il en est en France où vous vous trouvez actuellement. Si nous parlons des longues périodes dictatoriales, la femme écrivaine guinéo-équatorienne de la diaspora a évidemment participé à la création d’une culture littéraire dans deux contextes : celui de la diaspora et celui du pays. Elle continue à créer sans avoir à se comparer à l’homme. Au plan socio-culturel ce sont les grandes gardiennes de différentes mémoires de la « tribu » guineo-écuatorienne ; ce rôle, comme dans le reste de l’Afrique, leur est dévolu généralement. Elles ont aussi pris une part active oui dans les combats politiques liés aux moments dont nous parlons.

9. Pouvez-vous évoquer, en partant de votre propre expérience, les rapports qu’on considère comme complexes entre diasporas et identités ? On nous apprend, par exemple, que c’est une problématique importante quand on veut examiner les liens entre l’Afrique et ses diasporas en Amériques, Caraïbes, Europe, à la suite de la traite négrière et aux migrations postcoloniales.

Los escritores de uno y otro lado viven realidades diferentes. Los de dentro de Guinea Ecuatorial, como hemos indicado más atrás, viven las atrocidades del régimen y del embrutecimiento de la misma sociedad. A pesar de eso, no dejan de crear obras en las que existe una fuerte carga catártica. Sueñan con una sociedad en la que se pueda vivir buscando las soluciones de los problemas que recogen en sus obras. Los escritores de fuera deben acudir a los medios de comunicación internacionales para estar un poco al corriente de los sucesos del país. Sin embargo, su distanciamiento les impide implicarse, como víctimas o testigos de esta violencia institucional y gubernamental que va afectando a las sociedades guineo-ecuatorianas en todas sus facetas. El escritor guineoecuatoriano, sea de dentro o de la diáspora, está desvinculado de las diásporas transatlánticas. No existen marcadas referencias a este trauma histórico en sus creaciones literarias. Salvo contadas excepciones, yo diré que esto es la tónica general en las literaturas negras africanas. Habrá que tratar de entender por qué es así. Tal vez las urgencias poscoloniales y el papel que entonces se les dio a las esas literaturas expliquen ese silencio. Me parece sin embargo que las cosas van cambiando.

10. Il y aurait-il un point non évoqué dans ce questionnaire sur lequel vous souhaiteriez mettre l’accent pour ce qui est de l’importance des diasporas en Guinée équatoriale ?

Como he señalado en alguna ocasión durante esta entrevista, los escritores guineoecuatorianos de la diáspora están siendo ya desplazados por los nacientes lectores del interior del país debido a la imposibilidad de que se acceda a sus obras por falta de librerías, de editoriales nacionales y de una política cultural digna de ese nombre. Gracias por su interés por mi país, por sus literaturas escritas modernas. Que le cunda la tesis

Bibliographie

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Citer cet article

Référence électronique

Adjo N’Go Rosine Bohoussou, « Entretien avec Justo Bolekia Boleká », Sociocriticism [En ligne], XXXVI-1-2 | 2022, mis en ligne le 15 juillet 2022, consulté le 20 avril 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/sociocriticism/3295

Auteur

Adjo N’Go Rosine Bohoussou

Doctorante
GRENAL-CRESEM, Université de Perpignan
Justo Bolekia Boleká, Écrivain et Professeur
Universidad de Salamanca